Intervention de Éliane Assassi

Réunion du 3 juin 2015 à 21h45
Renseignement et nomination du président de la commission nationale de contrôle des techniques de renseignement — Article 2

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

Le Freedom Act, je le rappelle, a tout de même des limites. Ainsi ne change-t-il rien à la surveillance, par la NSA, des communications extérieures aux États-Unis.

La NSA ne peut d’ores et déjà plus collecter les métadonnées téléphoniques. Les dispositions adoptées hier la priveront définitivement de cette capacité.

Le présent projet de loi permet aux services de renseignement de scruter les fameuses métadonnées de nos concitoyens. De quoi s’agit-il précisément ? Plus que le contenu, les métadonnées décrivent les caractéristiques des communications. Cela ne constitue donc aucunement une violation de la vie privée, me rétorquerez-vous.

Hélas, tel n’est pas le cas. Ces données incluent notamment l’adresse IP, les date et heure de début et de fin de la connexion, les pseudonymes utilisés, l’objet des mails et le nom des pièces jointes envoyées, mais aussi les informations administratives détenues par les opérateurs telles que les nom prénom ou raison sociale de l’abonné, les adresses postales associées, l’adresse de courrier électronique, les numéros de téléphone et les mots de passe utilisés.

Une fois toutes ces données centralisées et recoupées, l’utilisateur se retrouve parfaitement « profilé » : il sera possible de retracer avec précision ses relations sociales, ses activités, ses centres d’intérêt et ses habitudes. Celles et ceux qui réalisent couramment des achats sur internet savent de quoi je parle…

Monsieur le ministre, nous avons pu mesurer l’agacement que de telles considérations pouvaient susciter chez vous. Face aux quelques députés bataillant contre le texte, vous avez lancé : « Les opérateurs internet détiennent nos données personnelles et je suis convaincu que nombre d’entre eux utilisent des techniques extraordinairement intrusives à l’égard de nos propres existences. [...] Cela ne pose aucun problème lorsqu’il s’agit de grands trusts internationaux [...] Mais lorsqu’un État se propose de prévenir le terrorisme sur internet, il est nécessairement suspect de poursuivre des objectifs indignes ! »

Considérer que la mainmise d’entreprises privées sur nos données personnelles ne suscite « aucune indignation » dans l’opinion publique comme dans les administrations indépendantes ne semble pas très sérieux.

Par ailleurs, si je ne souhaite pas m’abonner à Facebook, Twitter et autres ou afficher ma vie privée sur internet, c’est un choix, au même titre que j’accepte ou non de signer – et de lire – les conditions générales d’utilisation que doivent mettre en place les acteurs numériques.

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