Intervention de François Zocchetto

Réunion du 9 juin 2015 à 14h30
Renseignement et nomination du président de la commission nationale de contrôle des techniques de renseignement — Explications de vote sur l'ensemble

Photo de François ZocchettoFrançois Zocchetto :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’exercice est difficile pour le législateur aujourd’hui. En effet, comment concilier le respect des libertés publiques, fondement de nos démocraties, et l’efficacité en matière de lutte contre les déviances des terrorismes ?

Je salue nos deux rapporteurs, M. Bas et M. Raffarin, pour qui l’exercice était tout aussi difficile : grâce à leur travail, nous pouvons considérer sérieusement le présent projet de loi.

Le précédent texte portant sur le même sujet datant de 1991, à une époque où la téléphonie mobile était balbutiante et où internet n’existait pas, ce projet de loi était nécessaire. Nous avions besoin d’une loi pour sécuriser les actions des agents du renseignement souvent à l’origine de procédures judiciaires délicates, pour apporter des garde-fous supplémentaires en termes de protection des libertés publiques, pour garantir un contrôle indépendant, de façon que le pouvoir exécutif, en particulier les services du Premier ministre, ne puisse pas disposer d’une liberté totale en matière de renseignement, pour permettre aussi le recours au juge, qu’il soit administratif ou judiciaire, à tous les niveaux de procédure.

Je comprends les craintes exprimées par toutes celles et ceux d’entre nous qui ont émis des critiques et les réitèrent aujourd’hui. En effet, au-delà du texte qui nous est présenté, nous sommes confrontés à un double problème : d’une part, l’évolution des techniques qui n’est pas nouvelle, mais s’accélère et, d’autre part, le développement du terrorisme. C’est bien cette double confrontation que nous avons du mal à assumer les uns et les autres.

Les objectifs sont louables : encadrer la procédure d’urgence absolue, raccourcir les délais de conservation des informations, et veiller à ce que les algorithmes et les IMSI catchers soient utilisés de la façon la plus restreinte possible. Les propositions présentées vont, me semble-t-il, dans le sens d’une réduction des risques.

Toutefois, nous devons rester extrêmement vigilants. Indépendamment de l’examen et de l’adoption, ou non, de ce projet de loi, nous devons conserver un contrôle permanent sur les procédures. À chaque instant, nous devrons, avec les acteurs eux-mêmes, nous interroger sur la responsabilité pénale des agents du renseignement, sur la manière d’assurer un contrôle parlementaire efficace et sur la façon d’encadrer les services de l’exécutif, notamment du Premier ministre, comme je l’ai déjà souligné précédemment.

Chaque famille politique est confrontée à des divergences sensibles. Pourtant, gardons-nous de creuser entre nous des fossés d’incompréhension : il n’y a pas d’un côté ceux qui luttent contre le terrorisme et, de l’autre, ceux qui défendent les grands principes de la démocratie. Comme vous le savez, mes chers collègues, les choses sont bien plus complexes. Ce projet de loi n’est pas, comme cela a déjà été indiqué, un texte de circonstance, même si nous l’étudions dans un contexte particulier et douloureux.

De telles divergences existent aussi au sein du groupe UDI-UC, dont un certain nombre de membres ne voteront pas en faveur de ce texte, pour les raisons que j’ai évoquées.

Cela étant, notre devoir de législateur sera de rester extrêmement attentif à l’application des dispositions que comporte le projet de loi. Une clause de revoyure est prévue dans cinq ans. Même si celle-ci est un peu lointaine – mieux vaut cependant une telle clause que pas du tout –, elle nous permettra de déterminer si nous devons revenir ou non sur certaines mesures que nous prenons aujourd’hui la responsabilité d’autoriser.

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