Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les communes, comme le rappelle notre collègue Hervé Maurey dans son rapport d’information, sont les premières interlocutrices des religions dans notre pays.
Le travail juridique très précis du rapporteur nous permet de mieux appréhender la diversité des situations en France. En effet, depuis la loi de 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État, la société française, tout comme le paysage religieux, a fortement évolué.
Les maires se heurtent aujourd’hui à de nombreuses difficultés pour appréhender les contours de la laïcité et en assurer le respect au quotidien, notamment pour ce qui relève du financement des cultes. L’entretien des nombreux bâtiments religieux mis à la charge des collectivités territoriales ou les réponses à donner aux projets de construction de nouveaux lieux de culte sont des sujets régulièrement abordés par les élus de nos territoires.
Si le principe est l’interdiction du financement public, la loi et la jurisprudence autorisent les collectivités à apporter aux associations cultuelles différentes aides telles que le bail emphytéotique administratif, la garantie d’emprunt ou la mise à disposition de locaux. Quelle que soit la nature de ces aides, il est impératif de garantir la transparence du financement des lieux de culte. Actuellement, beaucoup de fantasmes et quelques réalités ennuyeuses imposent aux pouvoirs publics, aux élus et aux organismes représentatifs des différents cultes, dans leur diversité, de travailler ensemble pour avancer sur la voie de cette transparence.
Dans ce contexte, les élus de mon département, les Alpes-Maritimes, font preuve de volontarisme. Ils sont à l’écoute des besoins cultuels des différentes communautés religieuses, mais ils demeurent confrontés à au moins quatre problèmes récurrents.
Premièrement, le lien ténu existant entre associations culturelles et associations cultuelles nécessite une clarification de la structure qui porte le projet – relève-t-elle de la loi de 1901 ou de la loi de 1905 ?
Deuxièmement, les maires s’interrogent sur l’origine du financement d’une construction. Ainsi, à Nice, nous avons été amenés à solliciter officiellement le Premier ministre pour connaître l’origine d’un financement mal identifié provenant de l’étranger, celui du centre En-Nour, situé dans le quartier de Nice-La Plaine, dans le canton où j’ai été élue pour siéger au conseil départemental, dont je suis aussi vice-présidente. Ainsi, la mairie de Nice a adressé un courrier au Premier ministre, afin que ses services enquêtent sur l’origine du financement, non contrôlé et non identifié.
Troisièmement, les élus ont des difficultés à disposer d’interlocuteurs reconnus par les pouvoirs publics afin de pouvoir mener à bien des discussions constructives et conduire un projet cohérent sur un territoire donné. C’est notamment tout le débat sur la représentation de l’islam de France.
Quatrièmement, enfin, les élus sont confrontés à la création de lieux de culte dans des locaux détournés de leur vocation. Je pense plus particulièrement aux caves, aux parkings, à certains commerces ou même à des salles communales réservées par des associations culturelles qui s’orientent davantage vers des activités cultuelles.
En tant que présidente de Côte d’Azur Habitat, premier bailleur social des Alpes-Maritimes et cinquième bailleur de France, je rencontre quotidiennement des situations de transgression de la loi. Nous avons connaissance d’au moins deux lieux de culte improvisés dans le périmètre de notre patrimoine, sans compter ceux qui échappent à tout contrôle…
Ces lieux de culte improvisés entraînent, pour les collectivités, des problèmes de sécurité, de droit, de voisinage ou encore de radicalisation. En outre, ils ne sont pas prévus pour accueillir des personnes et ne répondent donc pas aux normes des établissements recevant du public prévues par le code de l’urbanisme. La sécurité des personnes qui se réunissent et des biens est donc directement engagée.
Sur le problème spécifique du financement, l’État doit garantir la plus grande transparence possible, tout en respectant le principe de loi de 1905.
À ce propos, je partage les propositions de notre collègue François Baroin, président de l’Association des maires de France, l’AMF, qui s’est dit opposé au financement de la construction des lieux de culte par les mairies et les associations, mais qui souhaite la surveillance du financement de ces constructions.
D'ailleurs, je serai très attentive aux conclusions du groupe de travail que l’AMF a constitué sur les questions relatives à la laïcité dans l’objectif d’arrêter un document de référence sur lequel les maires et les présidents d’intercommunalité pourraient s’appuyer pour mieux faire face aux réalités.
Je ne saurais terminer sur le sujet des lieux de culte sans évoquer la situation désastreuse des chrétiens d’Orient, qui assistent à la destruction de leurs édifices religieux, mais qui sont surtout persécutés, et dans des conditions effroyables.
La France doit les soutenir, en les accueillant sur son territoire, dans nos communes, pour les protéger, mais aussi et surtout en leur permettant de rester libres en Orient, où il nous faut défendre la diversité religieuse et cultuelle : c’est notre histoire !