Le président Hyest a, me semble-t-il, raison. Vous avez évoqué, tout à l'heure, les différentes hypothèses de recours à la sédation. Quand le malade est à l'agonie et que malgré un recours à toute l'échelle des soins palliatifs, la souffrance reste réfractaire, la sédation profonde, si elle peut avoir pour effet d'abréger le nombre d'heures qui restent au patient à vivre, est plus aisément justifiable que dans d'autres cas. Elle n'est au fond que l'étape ultime de l'application du droit aux soins palliatifs. Le cas dont nous discutons est plus complexe. Il faut admettre une réponse positive à plusieurs questions difficiles avant d'accepter de lier l'arrêt de l'alimentation, de l'hydratation et de la respiration artificielle et le droit à la sédation profonde. Il faut admettre, alors, qu'il s'agit de « traitements ». Ce saut a été opéré par le juge. Dès 2009, le Conseil d'État a estimé, dans son rapport, qu'il fallait englober dans la notion de « traitement » ces trois soins supplétifs. Il a confirmé cet avis par jugement, dans l'affaire Vincent Lambert. Le droit positif actuel englobe donc ces soins de suppléance vitale dans la catégorie des traitements. Le législateur pourrait retenir une réponse différente, mais à supposer qu'il admette ce point, il reste que la nature du geste médical n'est plus la même que dans le premier cas. L'ordre des facteurs peut même s'inverser : c'est parce que l'on décide d'arrêter les traitements de suppléance vitale, ce qui va entraîner la mort, mais une mort horriblement douloureuse, que l'on applique la sédation. La loi, dont on a souvent dit que sa visée était de rendre effectif le droit aux soins palliatifs, ne traite plus là de la même question que précédemment. Elle opère un saut, dont il revient ici à chacun de se demander s'il faut l'opérer.