En première lecture, l'Assemblée nationale a adopté un amendement du Gouvernement tendant à intégrer, sous certaines conditions, les élèves, les étudiants et les apprentis parmi les bénéficiaires de la prime d'activité.
Par exception au principe selon lequel ces personnes sont exclues du bénéfice de la prestation, au même titre que pour le RSA « activité » aujourd'hui, il est proposé qu'elles puissent y prétendre si elles justifient percevoir des revenus professionnels dont le montant serait fixé à 0,78 SMIC net mensuel, soit environ 900 euros, et exercer leur activité professionnelle depuis une période déterminée, qui devrait être de trois mois.
L'ouverture à ces publics semble pour le moins paradoxale dans la mesure où la prime, qui a pour principal objectif de faciliter et soutenir la reprise d'une activité professionnelle, serait alors servie à des étudiants conduits, en vertu du seuil retenu, à travailler sur des durées importantes, alors qu'ils devraient bien plutôt être encouragés à se consacrer à leurs études, pour les réussir. De fait, un étudiant payé au SMIC horaire devra travailler un nombre d'heures important, au détriment de ses études, pour bénéficier du dispositif.
Je ne méconnais pas les difficultés financières que peuvent rencontrer certains étudiants pour poursuivre leurs études, mais il semble que, plutôt que de les inciter à avoir une activité salariée, il serait préférable de s'appuyer sur un système de bourses sur critères sociaux efficace et une offre de logements adaptée aux besoins.
La mesure adoptée par l'Assemblée nationale propose ainsi, selon moi, une mauvaise réponse aux difficultés rencontrées par des étudiants qui, disposant de peu de moyens financiers, pourraient être incités à travailler davantage pour bénéficier de cette prime.
Le fait de cibler les étudiants percevant plus de 0,78 SMIC conduit, en effet, à soutenir ceux qui ont a priori un temps de travail hebdomadaire difficilement compatible avec leurs scolarité et susceptible de remettre en cause leurs chances de réussite, comme l'ont déjà démontré plusieurs études économiques.
Enfin, il ne paraît pas raisonnable d'étendre le champ des bénéficiaires alors que la réforme doit être réalisée à périmètre financier constant, soit une enveloppe de 4,1 milliards d'euros. Alors qu'il est d'ores et déjà permis de douter de la soutenabilité financière de la réforme proposée, cette extension aux étudiants et apprentis aurait un coût de 100 millions d'euros. Sera-t-il couvert par l'enveloppe prévue ? La question n'est toujours pas tranchée. Je ne manquerai pas d'interroger le Gouvernement sur ce point.
Je vous propose donc, par mon amendement FINC 1, de n'ouvrir le bénéfice de la prime d'activité qu'aux apprentis répondant aux critères envisagés par le Gouvernement - être rémunéré au moins 0,78 SMIC net mensuel et exercer cette activité depuis plus de trois mois. Sont ainsi visés les apprentis déjà bien avancés dans leur scolarité et pour lesquels le bénéfice d'une telle prestation peut se justifier par le souci d'encourager et de faciliter leur intégration dans le monde du travail.
Il s'agit, par cet amendement, de pousser le Gouvernement à répondre de ses contradictions. Affirmer que la prime vise avant tout à inciter à l'exercice d'une activité professionnelle, pour finir par en ouvrir le bénéfice aux étudiants et aux apprentis selon des modalités très circonscrites, qui conduiront à détourner de leur scolarité les étudiants les plus en butte à des difficultés financières en est une. Le texte initial me semblait plus cohérent.