Intervention de Jean-Pierre Godefroy

Réunion du 16 juin 2015 à 14h30
Malades et personnes en fin de vie — Discussion d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Jean-Pierre GodefroyJean-Pierre Godefroy :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, depuis le vote de la loi Leonetti, la question de la fin de vie a régulièrement été débattue par notre assemblée.

Le 8 avril 2008, sous la forme d’une question orale avec débat, nous avons abordé les insuffisances de la loi Leonetti promulguée trois ans plus tôt. Puis, en janvier 2011, la commission des affaires sociales a adopté une proposition de loi commune de sénateurs membres des groupes socialiste, UMP et communiste visant à instaurer une véritable aide active à mourir, qui a été rejetée en séance publique. En 2012, cinq propositions de loi allant dans le même sens ont été déposées au Sénat. Le président du Sénat a soumis pour avis ces cinq textes au Conseil d’État, qui a rendu ses conclusions le 7 février 2013 : il a estimé qu’aucun obstacle de nature constitutionnelle ou conventionnelle ne pourrait empêcher l’adoption d’une telle disposition.

Mes chers collègues, cela fait dix ans que j’interviens sur ce sujet tant en commission qu’en séance publique. Aussi, je suis aujourd'hui contraint de « recycler » des arguments maintes fois répétés dans cet hémicycle.

Dans La Comédie humaine, Balzac posait la question suivante : « Les souffrances les plus vives ne viennent-elles pas du libre arbitre contrarié ? »

Traiter par la loi de l’assistance pour mourir, c’est légiférer sur ce qui nous échappe le plus : la mort. C’est ce qui rend notre débat si délicat et si grave, en faisant appel à notre vécu, à nos convictions les plus intimes. Mais la fin de notre vie n’appartient ni aux médecins, ni aux philosophes, ni aux juges, ni aux hommes de religion, ni aux opérateurs des machines destinées à maintenir artificiellement en vie les patients. Dans ce moment qu’est la fin de l’existence, la considération la plus grande doit être accordée à l’individu. C’est pourquoi notre préoccupation première doit être de le respecter dans sa dignité, ses choix, ses valeurs, en lui offrant, autant que possible, le droit de décider pour lui-même au moment où vient la fin de son existence.

Il n’est question que d’un droit. D’une liberté. D’une toute dernière liberté ! Que l’on en use ou non, la possibilité de bénéficier d’une assistance médicalisée pour mourir lorsque des conditions strictes sont réunies constituerait une liberté en soi, qui suffirait souvent à apaiser psychologiquement certains malades et ne s’imposerait à personne.

Nous devons aussi considérer la question de la souffrance, la souffrance mentale, la souffrance physique. Cette souffrance doit pouvoir être enrayée, car on ne doit pas mourir dans ces conditions. Les soins palliatifs existent à cet effet, et ils doivent d’ailleurs être développés afin que tous y aient effectivement accès, ce qui est actuellement loin d’être le cas. Mais opposer les soins palliatifs à une aide active à mourir est tout à fait déraisonnable ! Ce sont des choses complètement différentes. Les soins palliatifs ont un temps ; décider des conditions dans lesquelles on met fin à son existence, c’est autre chose.

Toutefois, lorsque les soins palliatifs sont insuffisants pour soulager la douleur ou lorsqu’ils ne conviennent pas à la personne, ne faut-il pas aller plus loin ? La loi doit être là pour laisser à chacun, de façon très encadrée, la possibilité de décider d’échapper à ses dernières souffrances.

Concernant la question de l’aide médicalisée pour mourir, les principes s’opposent, les avis sont divergents et le resteront. Laissons donc aux individus la liberté de décider pour eux-mêmes ! Ils sont le juge suprême de leur propre volonté.

Le texte qui nous est proposé instaure une sédation profonde. La sédation endort, elle ne sert qu’à faire perdre au patient ses perceptions.

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