Cet amendement, qui aurait pu être déposé à un autre endroit du texte, vise à faire le point sur l’état du droit des malades et ses évolutions possibles.
La loi de 1999 puis celle de 2002 ont posé le principe du droit des malades. Il s’agissait d’une avancée considérable. En 2005, la loi dite Leonetti a précisé que ce droit des malades s’appliquait y compris lorsque l’interruption du traitement que le malade peut demander pouvait entraîner la mort.
Ce texte a précisé non seulement les conditions et les cas très particuliers dans lesquels ce droit pouvait presque être opposable aux médecins – évidemment, si le malade n’était pas inconscient –, mais aussi, ce qui relativise beaucoup le débat sur la sédation profonde, que le médecin était alors appelé à prendre toutes les mesures nécessaires pour soulager le malade et assurer sa qualité de vie au moment de son agonie.
Cette loi a constitué un progrès. J’étais président de la commission spéciale, dont Jean Leonetti était le rapporteur. Nous l’avons votée à l’unanimité à l’Assemblée nationale. Elle constituait, de mon point de vue, une étape. Pourquoi ? Parce que la question qui nous est posée n’est pas tant de savoir si les uns ou les autres ont raison d’un point de vue idéologique ou philosophique sur le fait de savoir si l’on a le droit ou non de disposer de sa vie. C’est une question qui intéresse chacun d’entre nous, mais qui ne relève pas, à mon sens, du législateur.
La question qui nous est posée est celle de savoir si nous pouvons accepter qu’une personne en fin de vie, qui souffre, soit laissée sans solution.
La loi Leonetti a essayé de répondre à cette question pour un très grand nombre de cas, à savoir ceux qui sont en fin de vie et qui dépendent d’un traitement. Elle ne l’a pas fait pour ceux qui n’entrent pas dans ce cadre. Il s’agit de personnes qui, sans dépendre d’un traitement, souffrent d’une manière atroce, insupportable. Il s’agit de malades auxquels ne peut être apportée aucune solution, ni juridique ni médicale.
Le professeur Sicard avait souligné, notamment en tant que président du Comité consultatif national d’éthique, la nécessité dans ce contexte, pour éviter tout débat idéologique, de réfléchir à une exception d’euthanasie. Autrement dit, il s’agissait d’offrir au malade, auquel l’équipe médicale la famille et les proches ne pouvaient apporter aucune solution, une alternative, une opportunité face à la souffrance.
Pour les auteurs de cet amendement, sans rien trancher du débat sur le droit à mourir ou sur le refus de ce droit, la souffrance est la seule solution qui soit insupportable. C'est la raison pour laquelle ils préconisent qu’une commission nationale ou régionale puisse constater la volonté du malade, ainsi que l’absence d’issue médicale favorable et de solution juridique.
Cela me rappelle le cas de Chantal Sébire, femme atteinte d’une maladie d’une extrême gravité qui n’a pas souhaité affronter les souffrances qui l’attendaient, tout du moins cette déchéance, cette perte de dignité, et qui n’a eu d’autre solution que le suicide. On imagine ce qu’ont pu être la solitude et la souffrance de cette personne.
Cet amendement tend donc à créer une situation exceptionnelle pour faire face à des demandes exceptionnelles.