Intervention de Ségolène Neuville

Réunion du 18 juin 2015 à 9h30
Discrimination à raison de la précarité sociale — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Ségolène Neuville, secrétaire d'État :

Malgré l’arsenal juridique dont nous disposons déjà, nos lois ne suffisent plus à couvrir toutes les situations dont nous parlons aujourd’hui. Quelles sont précisément ces situations ? C’est la difficulté principale que vous deviez résoudre afin de respecter le principe de légalité des peines, sans lequel la justice ne peut rien.

Il s’agissait d’abord d’être concret et de partir de situations objectives bien définies. C’est ce travail que vous avez fait, mesdames, messieurs les sénateurs, qui a permis d’aboutir à ce texte.

Mais la difficulté était également de trouver une formulation de ce critère qui ne soit pas elle-même stigmatisante, comme l’aurait été, par exemple, le fait de bénéficier de prestations sociales, auxquelles certaines personnes renoncent, précisément pour ne pas être stigmatisées : il s’agissait en effet d’éviter que le dispositif ne se retourne contre les personnes visées.

Je salue en ce sens le travail de la commission des lois du Sénat, qui a su proposer une formulation équilibrée. Le chemin était étroit, entre un critère parfaitement objectif mais par trop restrictif, et un critère extensif qui risquait la censure constitutionnelle.

Nous sommes, selon moi, à un moment capital pour notre pays. Cette proposition de loi souligne l’importance, sinon la nécessité absolue, de protéger et de renforcer nos valeurs de solidarité, de fraternité, et d’unité face aux divisions qui nous menacent, face au risque du repli sur soi et de haine de l’autre.

Cette loi ne doit donc pas seulement constituer un simple étendard que l’on brandirait pour se donner bonne conscience. Il s’agit bel et bien de nous doter d’un nouvel arsenal juridique qui devra donner lieu à des peines, afin qu’il puisse pleinement jouer son rôle de sanction, mais aussi de dissuasion des comportements qui s’écarteraient de la norme.

Car c’est bien de cela qu’il s’agit en définitive : ériger un point de repère, une norme permettant à chacun de prendre conscience que notre société ne peut plus se permettre de considérer la pauvreté et l’exclusion sociale comme une fatalité contre laquelle il est inutile de se battre. Il s’agit de prendre conscience collectivement que nous participons à créer et à renforcer l’exclusion sociale et que nous en sommes donc en quelque sorte tous responsables.

C’est bien de cela qu’il s’agit : faire évoluer et élever notre conscience collective afin d’éviter que l’individualisme ne prenne le pas sur le sens du collectif. Car la solidarité, le Président de la République lui-même l’a rappelé à plusieurs reprises, ce n’est pas un supplément d’âme, mais ce lien invisible qui nous protège collectivement. C’est en réalité ce que nous avons de plus précieux, ce qui nous fait nous sentir plus forts, ce qui nous donne confiance dans l’avenir et ce qui fait notre capacité collective à rester unis.

C’est pourquoi, vous l’aurez compris, le Gouvernement est favorable à cette proposition de loi.

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