Intervention de Bariza Khiari

Réunion du 18 juin 2015 à 9h30
Discrimination à raison de la précarité sociale — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Bariza KhiariBariza Khiari :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la présente proposition de loi s’inscrit dans le long – trop long – combat mené pour lutter contre les discriminations. Trop longtemps, notre pays a négligé les conséquences que celles-ci entraînent, refusant de considérer qu’elles sont souvent des morts sociales. Aussi, les pratiques discriminatoires, parce qu’elles n’ont longtemps suscité que de l’indifférence, ont profondément entamé l’adhésion aux valeurs égalitaires, méritocratiques et solidaires de notre République.

Le texte présenté par notre collègue Yannick Vaugrenard, dont je salue l’engagement pour cette belle cause marquée par la fraternité, propose l’ajout d’un vingt et unième critère constituant une discrimination, celui de la précarité sociale.

Le chômage ou le RSA sont des épreuves économiques, des moments difficiles de la vie auxquels nous devons faire en sorte de ne pas ajouter l’indignité, les vexations et les humiliations. Il nous revient, à tout le moins, de faire en sorte que cette double peine ne soit pas considérée avec indifférence ou, pis, avec de la condescendance. La pauvreté est une situation subie, et non pas choisie !

La proposition de loi offre donc une protection bienvenue. Néanmoins, il faut signaler que peu de plaintes pour discrimination connaissent une issue satisfaisante, tant le chemin est semé d’embûches et de difficultés. Si les tribunaux sont mal équipés pour traiter des questions de discrimination, il nous incombe de leur donner des instruments plus adaptés, et non de renoncer à l’action. Préciser les critères de discrimination et mieux armer les juges doivent constituer un impératif. L’évolution des consciences et la réduction des discriminations n’interviendront d’ailleurs qu’à la condition de maintenir une attention constante.

Dans son avis du 9 juin 2015, le Défenseur des droits a souligné que le critère de précarité sociale était discutable, parce qu’il constituait « une situation, temporaire ou chronique » et non « une caractéristique pérenne de la personnalité ». Cet argument me semble avoir ses propres limites, car il suffit de passer en revue la liste des critères pour identifier d’autres situations temporaires, comme la grossesse, la situation de famille, l’état de santé ou le lieu de résidence. Adopté sur l’initiative de la commission des lois, le changement sémantique de « précarité » en « vulnérabilité » sociale, terme dont la définition légale existe, est donc tout à fait judicieux.

L’état de pauvreté ne relève pas de la responsabilité individuelle mais résulte d’un contexte économique et social, sur lequel nous avons la mission d’agir. Toutefois, je fais le pari que l’ajout d’un tel critère intensifiera le combat pour la justice et le progrès social.

Mes chers collègues, pour faire vivre le troisième pilier de notre devise, celui d’une « fraternité » qui symbolise le lien de solidarité qui devrait unir tous les membres de la famille humaine, le groupe socialiste et républicain votera cette proposition de loi, qui contribue à franchir un degré supplémentaire dans le combat contre les discriminations.

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