Par ailleurs, la cause efficiente, le moteur de cette proposition de loi organique, après la décision particulièrement désinvolte – et je pèse mes mots – du Conseil constitutionnel, c'est le constat fait par M. le rapporteur de l'échec définitif de la réforme constitutionnelle du 23 juillet 2008 à imposer au Gouvernement des études d'impact dignes de ce nom. On peut lire dans son rapport : « On peut conclure de ce bilan d’étape après sept ans d’application de ce dispositif d’évaluation que ses effets sont loin d’être concluants. D’une part, il n’a nullement remédié à la crise de la production législative, tant sur le plan de la qualité des textes qui continue à se dégrader, que sur celui de leur inflation […] D’autre part, la désinvolture fréquente avec laquelle les études d’impact de nombreux projets de loi sont élaborées et leur contrôle par le Conseil constitutionnel effectué rend perplexe sur la nécessité de maintenir en l’état ce dispositif. »
On peut difficilement faire plus « bidon » que l’étude d’impact annexée au projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral. Une étude d'impact ne saurait être un recueil de généralités et de banalités rassemblées à la hâte, disais-je précédemment. Pourtant, le Conseil constitutionnel a validé toutes les arguties du Gouvernement permettant de passer outre cette analyse : ainsi, l’utilisation des données de l’INSEE, de la CNAF, la Caisse nationale des allocations familiales, ou de la DGCL, la Direction générale des collectivités locales, vaut exposé des méthodes de calcul ; l’addition de la population, du PIB, des budgets des anciennes régions composant une nouvelle région, puis la division du résultat ainsi obtenu par la population pour parvenir à des ratios par habitant sont des « éléments de nature à éclairer le Parlement » – il ne sait faire ni addition ni division ! – sur les effets démographiques de la réforme, en termes de richesse ou de gestion administrative.
Le Conseil constitutionnel va même jusqu'à considérer comme non significative l'inobservation de l'alinéa 9 de l’article 8 de la loi organique précitée, en l'espèce l’exposition avec précision de « l'évaluation des conséquences des dispositions envisagées sur l’emploi public », au motif que « le Gouvernement ne mentionne pas la modification [du] nombre [des emplois publics] dans les objectifs poursuivis par [le] projet de loi ». L'avenir est donc aux projets de loi dont l'exposé des motifs se résumerait à cette phrase : l’objectif de la loi est de réformer ! Circulez, il n’y a pas d’étude d’impact à faire ! C'est à de tels détails que l'on mesure le mieux le mépris dans lequel la haute bureaucratie tient députés et sénateurs.