La plupart des propos qui ont été tenus sont entièrement fondés ; j’y souscris totalement.
Je voudrais opérer un petit retour en arrière, monsieur le ministre. Lors de l’examen du projet de loi relatif à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale, notre groupe – j’étais l’un de ses chefs de file sur le texte – avait procédé à de nombreuses auditions et entendu toutes les organisations patronales représentatives. Le sujet n’était pas facile puisqu’il s’agissait de modifier les critères de représentativité en tenant compte notamment des doubles appartenances, qui constituent l’un des aspects du problème. Certaines entreprises adhèrent en effet à plusieurs organisations. Nous étions parvenus, sinon à un bon accord, du moins à un équilibre à peu près stable qui, sans satisfaire tout le monde, n’avait pas déclenché de déclaration de guerre. À telle enseigne que, face à la grogne de certaines organisations, notre groupe avait présenté un amendement, que j’avais défendu, visant à instaurer un délai supplémentaire de réflexion pour que les partenaires sociaux se mettent autour de la table et essaient d’avancer sur ces critères de représentativité.
Là, tout à coup, vous sortez du chapeau une disposition absente du texte d’origine qui va, je le crains, déclencher la foudre dans le milieu des organisations patronales représentatives et raviver la guerre que nous avions, avec un peu de doigté, réussi à éteindre. Pourquoi décidez-vous de déposer cet amendement au Sénat ? Pourquoi n’aviez-vous pas inclus cette disposition dans le projet de loi initial ? Quel est le motif de cette précipitation ? Pourquoi n’existe-t-il pas d’étude d’impact ? Pourquoi aucune concertation n’a-t-elle été conduite avec l’ensemble des organisations patronales ? Pourquoi n’avez-vous pas fait réaliser d’analyse des conséquences financières de cette mesure sur les entreprises ?
J’ai écouté attentivement les propos que vous avez tenus pour défendre votre amendement. Vous avez dit qu’il est tout à fait logique qu’une entreprise de plusieurs milliers de salariés soit plus représentative qu’une entreprise comptant un ou deux salariés. Pour aller dans le sens de l’intervention de notre collègue Kern, je vous invite à faire le total du nombre d’emplois que représentent toutes ces petites entreprises. Une TPE ne compte certes que quelques salariés, mais multipliez ce chiffre par le nombre d’entreprises qui constituent ce tissu économique qui draine toute la France et vous obtiendrez des représentations autrement plus significatives que celles des grandes entreprises.
Je ne veux pas entrer dans le jeu de nos collègues du groupe CRC, mais comparez également la situation d’une grande entreprise qui n’hésite pas à « dégraisser », comme on dit vulgairement, en licenciant 100 à 150 salariés, à celle d’une TPE qui doit se séparer d’un ou de deux salariés parce que les carnets de commandes sont vides et pour qui c’est un drame !
La vitalité de ces TPE et l’apport économique qu’elles représentent pour notre pays font que, s’agissant de leur représentativité, elles mériteraient davantage de considération qu’un simple amendement sorti au débotté à l’occasion d’une discussion sur le dialogue social.