S’il est maintenu, je voterai contre l’amendement n° 173 rectifié, qui vise à supprimer toutes règles spécifiques d’indemnisation des intermittents du spectacle. Il tend également à remplacer le dispositif de concertation approfondie, sur lequel nous avons travaillé avec Mme Procaccia, par une consultation simple à l’échelon professionnel. Enfin, il a pour objet de supprimer la possibilité, pour les négociateurs, de faire évaluer leurs propositions par le comité d’expertise. Si l’on voulait tailler en pièces le processus de concertation engagé il y a un an sous l’égide de Jean-Patrick Gille, d’Hortense Archambault et de Jean-Denis Combrexelle, on ne s’y prendrait pas autrement.
Mardi 9 juin dernier, la commission de la culture a accepté le principe même de l’article 20, sous la seule réserve, rappelée à l’instant par Mme la rapporteur de la commission des affaires sociales, qu’il n’y ait pas de délégation dans le mécanisme de l’accord, mais une concertation approfondie.
Une fois encore, la réforme est nécessaire. Elle ne se fera pas sans que les intermittents y soient associés, ni sans que chacun prenne ses responsabilités.
Contrairement à ce qui a pu être dit par certains, la reconnaissance de règles spécifiques pour l’indemnisation des intermittents du spectacle ne « sanctuarise » pas les règles actuelles – il me semble très important de le dire –, mais valide le fait que les conditions d’exercice des professions du spectacle sont particulières et que, en conséquence, l’existence de règles spécifiques est légitime, dans le cadre de la solidarité interprofessionnelle, comme c’est le cas pour l’emploi intérimaire.
Cette reconnaissance ne conduit pas à dessaisir les partenaires interprofessionnels ; elle vient confirmer un principe appliqué depuis cinquante ans, depuis le Front populaire, afin de consolider la négociation et de garantir qu’elle se tiendra dans les meilleures conditions, plutôt qu’entre deux portes ou à la fin de la nuit, comme cela a souvent été le cas… Si l’on revenait sur ce principe, l’équilibre de l’ensemble du dispositif de l’article 20 serait rompu ; autant alors proposer de le supprimer entièrement.
Pourquoi préférer une simple consultation à une concertation approfondie ? Le rapporteur l’a expliqué : les questions liées à l’intermittence sont complexes, le sujet dépasse celui de l’assurance chômage, et toutes les positions doivent être prises en compte.
Enfin, pourquoi priver ceux qui se concertent de la possibilité de faire expertiser leurs propositions ? La question des chiffres, des différents paramétrages de l’assurance chômage empoisonne les relations depuis des décennies. À chaque crise, chacun campe sur ses positions, en jetant à la figure de l’autre des chiffres parfois fantaisistes, mais qui, ne faisant jamais l’objet d’une évaluation, produisent des effets.
Mes chers collègues, nous sommes tous convaincus qu’un déséquilibre de 1 milliard d’euros, c’est bien trop. La réforme est donc nécessaire, mais ce n’est pas en coupant les voies de la négociation qu’on la fera avancer, surtout sur un sujet aussi sensible, sur lequel les responsabilités sont tellement partagées.
La concertation engagée l’an passé a conduit à des progrès, tout le monde en convient. Il faut aujourd’hui aller plus loin. La position à laquelle nous sommes parvenus, avec la commission des affaires sociales, est équilibrée : nous nous engageons enfin dans la voie d’une vraie réforme.
Je voterai donc contre cet amendement, et j’espère que mes collègues de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication feront de même.