Intervention de Philippe Bas

Réunion du 29 mai 2015 à 14h30
Nouvelle organisation territoriale de la république — Article 24 bis

Photo de Philippe BasPhilippe Bas, pré :

Je voudrais apporter mon soutien à la position prise par notre corapporteur à l’occasion de ce débat.

Bien entendu, nous avons le devoir, qui est aussi une obligation légale, de prendre en charge la protection de tous les mineurs isolés dans les départements. Personne ne peut le contester. Pour autant, nous sommes soumis à un phénomène qui nous dépasse largement et qui, lui, relève des attributions régaliennes de l’État, à savoir le contrôle de l’entrée de ces mineurs étrangers, qui sont des immigrés clandestins pour la plupart.

Comme ce devoir de protection existe, on sait, dans les pays d’origine de ces mineurs isolés, que les personnes tentées par l’émigration ont tout intérêt à partir avant d’avoir dix-huit ans. Par conséquent, nous nous trouvons véritablement pris en tenaille entre des obligations d’ordre humanitaire et légal et un phénomène contre lequel il appartient à l’État de lutter, avec ses moyens, qui sont forcément limités.

En tout état de cause, si nos obligations en matière de protection des mineurs doivent effectivement être remplies, on doit aussi considérer que la responsabilité du contrôle de l’entrée et du maintien sur le territoire de ces mineurs incombe à l’État. Il est donc tout à fait légitime que la charge de l’entretien de ces mineurs ne soit pas imputée aux seules collectivités territoriales.

L’amendement de notre collègue Christian Favier, qui puise son inspiration dans une expérience des réalités concrètes que beaucoup d’entre nous partagent, est donc particulièrement justifié. C’est la raison pour laquelle la commission, même si elle ne l’avait pas retenu lors du premier examen des amendements, qui lui ont été soumis par centaines, a estimé, sur le fond, que cet amendement pouvait recueillir un avis favorable.

Sachez que, dans nombre de départements, les dispositifs de protection de l’enfance, en particulier les dispositifs d’accueil d’urgence, subissent une véritable embolie, en raison d’arrivées de mineurs isolés qui semblent organisées par des réseaux.

On ne peut pas rester les bras ballants face à cette situation. Il est temps de prendre des mesures énergiques qui ne consistent pas seulement à répartir la charge entre les départements. Il faut que l’État assume la responsabilité qui lui incombe : s’il ne parvient pas à endiguer ces flux, il faut qu’il participe au financement de l’accueil, parce que l’embolie de nos dispositifs d’accueil d’urgence de l’enfance malheureuse porte préjudice à de nombreux autres enfants sur le territoire national.

Il ne suffit pas de dire que les départements devraient augmenter les moyens qu’ils consacrent à la protection de l’enfance pour régler le problème. Matériellement, on ne peut pas créer, du jour au lendemain, de nouvelles places d’accueil pour les mineurs isolés. Nous devons faire en sorte de trouver, sinon un remède définitif à cette situation, au moins un traitement, ce qui ne serait déjà pas si mal !

J’ajoute que ces mineurs ne ressemblent pas à ceux que nous devons habituellement protéger. Il s’agit généralement des jeunes gens extrêmement dynamiques, qui ne connaissent pas de difficultés psychiques ou affectives lourdes et qui ont su assumer les risques d’un voyage les ayant conduits d’un continent à l’autre.

Nos services sociaux ne sont absolument pas préparés à les accueillir : ce n’est pas du tout le même métier que de s’occuper d’un enfant en grande difficulté, du fait, par exemple, d’un climat familial très conflictuel ou d’une négligence de sa famille, ou de prendre en charge un grand jeune homme – ou, plus exceptionnellement, une grande jeune fille – qui s’est rendu en France dans le dessein d’y construire sa vie, parce qu’il considère qu’il n’a pas d’avenir dans son propre pays.

Pour l’ensemble de ces raisons, je soutiens l’amendement de notre collègue Christian Favier.

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