Questions couvrant un champ très vaste, à n'en pas douter.
Concernant la lisibilité du dispositif, la réforme de 2007 a créé un crédit d'impôt très simple. La difficulté du dispositif réside essentiellement dans la définition du périmètre des dépenses retenues comme base de calcul du crédit d'impôt recherche, c'est-à-dire de ce qui est défini comme étant des dépenses de recherche et développement. La définition per se ne relève pas de l'administration mais du manuel de Frascati élaboré dans le cadre de l'OCDE. Sa mise en oeuvre effective demande cependant d'être en mesure d'assurer a priori les entreprises sur la nature des dépenses qu'elles engagent, afin d'éviter d'aller ensuite au contentieux. Pour cette raison, les dispositifs de rescrit ont été développés depuis 2007 ; au-delà du ministère de la recherche, les entreprises ont aussi la possibilité de saisir la Banque publique d'investissement (BPI) et l'Agence nationale de recherche (ANR). Par ailleurs, est en cours un projet relatif à la création de commissions, au niveau départemental, pour mieux impliquer les différents services auprès des entreprises, afin les rassurer sur la nature des dépenses qu'elles engagent.
Il est difficile d'en faire plus pour les entreprises, car la légitimité de cette dépense fiscale au coût important repose sur le fait qu'elle finance des dépenses de recherche et développement. Dès lors, nous avons l'obligation de vérifier que les dépenses engagées par les entreprises correspondent bien à des activités de recherche. D'où la rigueur de la définition et la nécessité d'opérer des contrôles.
Au regard de la législation européenne, le CIR est considéré comme une mesure générale, qui ne s'adresse pas à un secteur en particulier ou à une taille d'entreprise bien définie. Dans la mesure où le dispositif ne présente aucun caractère de sélectivité, il ne s'agit pas d'une aide d'État. Cependant, si l'on voulait introduire des modulations en fonction des secteurs, on rentrerait dans le domaine des aides d'État et il faudrait alors notifier le dispositif à la Commission européenne. L'hypothèse d'un taux majoré pour les PME, un temps envisagée, n'a pas été retenue pour ces raisons - et au regard des effets de seuil qu'engendrerait un tel taux.
Concernant les réformes, une modification importante a été introduite il y a deux ans : un crédit d'impôt nouveau a été adjoint au CIR, le crédit d'impôt innovation (CII), qui comme son nom l'indique ne porte plus sur des dépenses de recherche mais d'innovation. Les critères de définition ne relèvent pas du manuel de Frascati mais du manuel d'Oslo. L'innovation recouvre un stade plus proche du marché, moins en amont, ce qui justifie - c'est en tous cas ce qu'a plaidé la direction de la législation fiscale quand le dispositif a été élaboré - un taux nettement moindre. Par ailleurs, le CII est réservé aux PME, avec des montants plafonnés à 400 000 euros par entreprise. Quant au CIR lui-même, l'objectif est plutôt de le stabiliser pour l'inscrire dans la durée.
Sur la question des groupes et de leur organisation, il faut tout d'abord noter que vingt-trois groupes de sociétés bénéficient aujourd'hui du CIR, soit la plupart des grands groupes industriels français. On a constaté que ces groupes sont organisés essentiellement en « filiales métiers ». On n'a pas constaté, depuis 2007, de modification dans la structure de ces groupes dont on aurait pu déduire qu'elle était liée à la volonté de maximiser le taux du crédit d'impôt recherche, en évitant de dépasser le plafond de 100 millions d'euros. Au contraire, certaines de ces filiales dépassent très largement le plafond de 100 millions d'euros et se voient donc appliquer, au-delà de ce seuil, le taux de 5 % au lieu de 30 %. On pourrait tout à fait imaginer, d'un point de vue purement technique, que le plafond de 100 millions d'euros soit apprécié au niveau des groupes. Cela emporterait deux conséquences. La première, c'est que seraient sorties de la base du CIR plusieurs centaines de millions d'euros de dépenses de recherche. Ce serait, pour les groupes industriels concernés, une déstabilisation assez considérable. La deuxième conséquence serait de placer nos groupes dans une situation défavorable par rapport aux grands groupes étrangers, qui par définition ne sont pas intégrés fiscalement en France et continueraient donc de bénéficier du même taux que celui dont ils jouissent aujourd'hui. Sur cette question du groupe, tels sont les éléments que je suis en mesure d'apporter.
Concernant les intermédiaires, il me semble que, pour l'essentiel, cette question a été traitée en 2011 : les dépenses de conseil ne sont plus du tout prises en compte dans l'assiette du CIR.