Intervention de Guillaume Pepy

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 9 juillet 2015 à 14h30
Audition de M. Guillaume Pepy candidat proposé aux fonctions de président du directoire de la sncf

Guillaume Pepy, candidat proposé aux fonctions de président du directoire de la SNCF :

Je suis intérimaire et pressenti pour être président-directeur-général de SNCF Mobilités et président du directoire. Un mot d'abord sur les trois responsabilités qui incombent au premier, sous réserve des décisions du conseil de surveillance.

La première priorité est de remettre à niveau les transports de la vie quotidienne. Nous avons déjà démarré : il y a beaucoup de travaux sur le réseau, la situation du RER s'améliore et la stabilisation de la facture TER pour les régions est entamée. Mais il faut aller plus loin. Je proposerai au conseil de surveillance de prendre la lutte anti-fraude à bras-le-corps, d'accélérer le développement des nouvelles technologies et de faire un nouvel effort de productivité pour baisser la facture des régions, qui ne peuvent plus payer autant. C'est sur les transports de la vie quotidienne que la SNCF est au coeur de la vie des gens, et qu'elle est attendue par les élus et les territoires.

Deuxième priorité, le train pour tous et le porte à porte. Le train est vécu comme trop cher, alors même que la collectivité prend en charge 70 % des coûts du TER et du Transilien. Il faut donc baisser les coûts pour baisser les prix, comme nous l'avons fait pour les Intercités et les TGV avec Ouigo, sans perdre d'argent. Le porte à porte existe déjà dans le fret et la logistique, d'usine à centre de stockage ou à point de vente. Pour les voyageurs, c'est une nouveauté ; ils veulent désormais être transportés non plus de gare en gare mais d'adresse à adresse. Notre métier s'étend, même si son coeur reste le ferroviaire. La SNCF n'est plus seulement le train, mais aussi les vélos en libre-service, le covoiturage, la location de voiture entre particuliers, les voitures électriques en gare, etc. Les mobilités partagées représentent 15 % des kilomètres parcourus, mais passeront à 30 % d'ici 2025. Le voyage connecté sera la capacité à combiner les différentes offres, avec un pass unique sur smartphone, pour tous les modes de transport, dont le bus.

La troisième priorité, c'est l'international. La SNCF est déjà un groupe d'envergure internationale, qui réalise y 30 % de son activité : cela nous rapporte de la croissance, de l'emploi et du bénéfice. Nous pouvons faire mieux, notamment en matière d'ingénierie, en faisant de notre filiale commune avec Systra le leader mondial ; accélérer au Moyen-Orient, où nous travaillons avec Alstom, Faiveley et des ETI françaises, mais aussi aux États-Unis, où il faut être présent pour être à la hauteur de nos concurrents allemands. L'objectif est de réaliser d'ici une dizaine d'années 50 % de notre chiffre d'affaires à l'international. Pour les activités fret, nous en sommes déjà à 40 % ; notre premier client, Arcelor Mittal, nous voit comme un opérateur européen.

J'en viens aux principaux problèmes à résoudre. D'abord, améliorer la qualité de service avec un tel niveau de travaux sur le réseau. Nous avons assaini le fret ferroviaire, au prix de cinq années d'efforts et de 6 000 suppressions de postes ; nous devons maintenant repartir en conquête, car c'est un secteur d'avenir. Sur l'ouverture à la concurrence, nous n'avons pas changé de position. Le pire service à nous rendre serait de nous faire basculer dans la concurrence du jour au lendemain, sans qu'aient été tranchées au préalable les questions de la régulation, du régime social des salariés, de l'expérimentation, de l'introduction progressive de la concurrence... Bref, ne réitérons pas l'expérience du fret !

Passons aux responsabilités du président du directoire. Depuis la loi du 4 août, nous avons beaucoup travaillé sur la mise en oeuvre de la réforme, en veillant à respecter les règles européennes sur la non-discrimination et les facilités essentielles du gestionnaire d'infrastructure. Rappelons que l'Allemagne est le pays où le chemin de fer est le plus intégré - avec non pas trois mais un seul patron, Rüdiger Grube - mais aussi le plus ouvert à la concurrence : 30 % du trafic TER ne revient pas à la Deutsche Bahn.

Nous devons rénover le pacte social d'ici le 1er juillet 2016 : cela suppose un décret, une convention collective, un projet d'entreprise. L'objectif est de rendre le rail plus compétitif et d'éviter que la SNCF ne décroche vis-à-vis du secteur privé. C'est un enjeu vital, l'avenir de la SNCF s'y joue. Nous avons trois sujets de négociation avec les syndicats : les métiers, aujourd'hui trop cloisonnés, et qu'il faut conserver tout en introduisant de la polyvalence ; l'accord sur les 35 heures, ce qui n'est pas facile ; la réorganisation du travail sur le terrain, pour gagner en compétitivité. Et tout cela, d'ici juillet 2016 !

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