Je vous remercie pour votre intérêt et cette moisson de questions !
Je souhaite préciser d'emblée que je ne déroge jamais à une règle : on ne commente pas une étude à venir. Il ne peut en ressortir que de l'inquiétude, même si celle-ci n'est pas nécessairement fondée. Par ailleurs, j'ai un rôle de conseil scientifique auprès de l'Administrateur général du CEA et du Gouvernement : j'ai donc un devoir de réserve. Ce n'est pas à moi, mais au récipiendaire de l'avis, de décider de la publicité des informations qui y sont contenues. C'est d'ailleurs ce qui me permet d'être tout à fait franc, et parfois même vif, dans mes propos !
Cela étant dit, il y a un travail scientifique de fond à fournir sur l'EPR de Flamanville. Les calculs de dos d'enveloppe menés laissent à penser que la zone affectée par la ségrégation n'est pas une zone irradiée : la situation actuelle ne pose a priori pas de problème de sûreté. En revanche, la question de nos compétences en métallurgie se pose. Le phénomène de ségrégation est connu mais on a fait comme s'il n'existait pas : ce n'est pas bien ! Encore une fois, si les calculs effectués jusqu'à présent me rendent optimiste, seuls une étude fouillée et des essais pourront nous assurer que les cuves ne présentent aucun danger.
Un autre problème me semble en l'occurrence plus important. Il est indispensable que les opérateurs de sûreté soient absolument convaincus du bien-fondé et de la rationalité des règlements qui sont établis. Si ce n'est pas le cas, les effets à court terme des dispositifs de sûreté seront dommageables. Si l'indépendance de l'ASN est indispensable, elle n'empêche pas un lien étroit avec les opérateurs. Ces échanges sont impératifs pour assurer la crédibilité de la filière nucléaire.