… au moment où la France compte, toutes catégories confondues, plus de 5, 7 millions de chômeurs. Nous croyons au contraire à la reprise et nous parions sur la croissance.
De la même façon – j’aborde ainsi le volet de la rénovation des bâtiments –, nous avons rétabli l’échéance de 2030 pour la rénovation des bâtiments les plus énergivores, car la date de 2025 reviendrait à rénover un million de logements par an, ce qui, vous en conviendrez, n’est pas réaliste ! Quant à l’obligation de rénover tous les bâtiments privés résidentiels en cas de mutation à compter de 2030, nous l’avons supprimée au vu des très nombreuses difficultés qu’elle poserait du fait, notamment, de son caractère imprécis et potentiellement source de contentieux, de la non-prise en compte des « ventes contraintes » ou encore de ses effets économiques. L’immobilier ne va pas bien, et ce n’est pas le moment de l’enfoncer encore plus. Enfin, la commission des affaires économiques a souhaité, pour des raisons pratiques, que le carnet numérique de suivi et d’entretien ne s’applique qu’aux logements neufs.
En matière de soutien aux énergies renouvelables, nous avons apporté deux modifications principales, l’une pour soutenir la filière hydroélectrique, en autorisant les installations à bénéficier plusieurs fois, sous condition d’investissement, d’un complément de rémunération adapté, l’autre pour conforter le financement participatif des projets de production en l’ouvrant aux groupements de collectivités, en protégeant mieux les investisseurs et en assurant la parfaite solidité juridique du dispositif.
S’agissant de la régulation des marchés, nous avons notamment limité l’obligation de résultats de performance énergétique, imposée par les députés en contrepartie des conditions particulières d’approvisionnement, à certaines catégories seulement d’électro-intensifs. Une telle obligation n’existe en effet nulle part ailleurs : alors que nous cherchons à rétablir leur compétitivité, n’imposons pas à tous nos industriels des obligations que n’ont pas leurs concurrents !
La commission des affaires économiques a approuvé le principe d’un soutien aux installations de cogénération industrielle introduit par les députés, mais a souligné les difficultés posées par le dispositif – j’y reviendrai dans la discussion des articles.
En matière de gouvernance et de pilotage, le Gouvernement a été à l’initiative de deux modifications importantes : la première remplace l’exclusion du méthane entérique de la stratégie bas-carbone par une prise en compte explicite de son faible potentiel d’atténuation. J’ai bien compris que l’exclusion posait problème au regard du respect de nos engagements internationaux. Mais, madame la ministre, était-ce bien le moment d’alourdir les charges de nos éleveurs qui traversent une crise sans précédent ?
La seconde modification a consisté à renforcer les obligations de reporting et de gestion des risques environnementaux des entreprises. Sans entrer dans le détail, je rappellerai simplement que le Sénat avait déjà adopté, en séance publique, un dispositif insuffisamment cadré qui méritait d’être modifié. Aussi, bien qu’étant toujours vigilants sur l’ajout de nouvelles contraintes pesant sur nos entreprises, nous n’avons pas remis en cause ces mesures, qui sont justifiées par l’urgence climatique et auxquelles, madame la ministre, vous avez fait allusion : elles s’appliqueront à des entreprises – sociétés anonymes, établissements financiers et investisseurs institutionnels – d’une taille suffisante pour les assumer sans surcoût excessif.
La commission des affaires économiques a en revanche rétabli la réforme de la contribution au service public de l’électricité, la CSPE, initiée par la commission des finances du Sénat – mon collègue Jean-François Husson reviendra sur ce point, je n’en doute pas – et sur laquelle nous étions, me semblait-il, parvenus à un accord avec vous en séance publique, madame la ministre. Or, si cette réforme n’épuise pas le sujet, elle a le mérite de poser des bases saines : un fonctionnement plus transparent et démocratique au travers d’un vote annuel du Parlement, une lisibilité accrue et une compatibilité avec le droit communautaire assurée par un recentrage sur le soutien aux énergies renouvelables. J’ajoute que, contrairement à ce que l’on a pu entendre ici ou là, le financement de la péréquation tarifaire et des dispositions sociales est préservé puisque cette nouvelle CSPE n’entrera en vigueur qu’en 2016, à charge pour le Gouvernement, qui y travaille, de présenter de nouvelles modalités de financement dans le projet de loi de finances.
En matière de lutte contre la précarité énergétique, enfin, nous avons pris acte du report de l’entrée en vigueur généralisée du chèque énergie au plus tard à la fin de l’année 2018, et avons supprimé la possibilité de réduire le débit d’eau servi aux ménages non précaires qui ne règlent pas leurs factures, dispositif dont nous doutons du caractère opérationnel.
Pour cette nouvelle lecture, la position de la commission des affaires économiques n’a donc pas varié : nous nous engageons résolument en faveur d’un modèle énergétique décarboné, comme en témoigne encore l’introduction dans le texte d’une cible de valeur de la tonne carbone en 2020 et en 2030 ; mais nous plaidons pour une transition réaliste qui préserve la croissance de nos entreprises et nos emplois.