Le Gouvernement devrait à tout le moins nous expliquer comment il compte parvenir à une telle réduction et nous en indiquer le coût. Une baisse dans cette proportion de la production d’électricité d’origine nucléaire sera en effet nécessairement coûteuse, en raison des fermetures et du démantèlement de réacteurs et de l’indemnisation que l’État devra verser à EDF. Nous devons cette transparence et cette honnêteté à nos concitoyens. Nous leur devons la vérité.
Le manque de transparence du Gouvernement est également patent s’agissant du financement de la transition énergétique, qui aura, elle aussi, un coût certain. Comme je l’avais souligné lors de la première lecture, nous attendons toujours de la part du Gouvernement des informations relatives aux modalités de financement des mesures présentées dans ce texte. Or, à ce stade, nous sommes toujours dans le flou. À cet égard, le texte adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture a accentué les incertitudes au lieu de les lever.
J’en veux pour preuve l’introduction, sur l’initiative du Gouvernement, d’une nouvelle disposition à l’article 5 quater visant à créer un fonds dénommé « Enveloppe spéciale transition énergétique » au sein du Fonds de financement de la transition énergétique, dont on peut s’étonner de l’apparition aussi tardive…
Nous ne connaissons pas exactement les ressources de l’enveloppe, qui doivent être définies en loi de finances. Nous n’en savons pas tellement plus sur son champ concret d’intervention ou ses modalités de gestion et de fonctionnement. Quels projets pourront être soutenus ? Pour quels montants ? Selon quels critères ?
En l’absence de telles précisions, il est demandé au Parlement de voter sur un dispositif obscur, dont on peut espérer qu’il ne constituera pas une nouvelle « coquille vide ». Nous aurons l’occasion d’en débattre lors de l’examen de l’article ; j’espère que le Gouvernement pourra nous apporter les éléments d’information nécessaires.
Surtout, la commission des finances a souhaité se saisir sur ce texte en nouvelle lecture, parce qu’elle a jugé nécessaire de proposer le rétablissement de la refonte de la CSPE, que l’Assemblée nationale a malheureusement supprimée.
Nos collègues députés, tout en saluant le travail que nous avons accompli au Sénat, ont décidé de revenir à leur texte initial, estimant qu’il n’était pas « opportun d’engager à moitié ce chantier, alors que le Gouvernement a confié à plusieurs administrations une mission visant à identifier des pistes de réforme en vue du prochain projet de loi de finances ».
Je tiens à le rappeler, cette mission a été confiée aux inspections après notre proposition de réforme, et le rapport, qui était attendu pour la fin avril, n’a toujours pas été remis au Parlement. Je m’interroge donc : la demande de rapport constitue-t-elle réellement un progrès ou s’agit-il d’une manœuvre destinée à nous faire attendre six mois supplémentaires avant de procéder à la refonte de la CSPE ?
Il serait d’autant plus regrettable de ne pas agir tout de suite que la réforme de la CSPE intégrée au texte du Sénat en première lecture a fait l’objet d’un accord avec le Gouvernement – avec vous, madame la ministre – sur le taux de la contribution et le plafond des charges qu’elle compense !
D’ailleurs, madame la ministre, à l’issue du débat, vous-même vous étiez félicitée du travail accompli, en déclarant ceci : « Ainsi, me semble-t-il, nous sommes parvenus à un juste équilibre entre le pouvoir qui est celui du Parlement en matière de fixation des règles, en l’occurrence du plafond, et la nécessaire souplesse qui conduira ce même Parlement à redéfinir annuellement un seuil et, éventuellement, à le faire pour chacune des filières, sans que rien soit figé dans le présent projet de loi. »
De mon point de vue, une telle réforme est essentielle et urgente, au regard notamment de l’impératif démocratique et des enjeux juridiques et financiers qui s’attachent à la CSPE.
Je tiens à le souligner, la réforme a pour objet de permettre au Parlement de voter le taux d’un impôt qui rapporte 6 milliards d’euros par an, et bientôt le double, et qui représente déjà 15 % de la facture d’électricité des consommateurs. Actuellement, le taux de la CSPE est fixé par arrêté ministériel, sur proposition de la Commission de régulation de l’énergie. Cette situation n’est pas acceptable. Il est donc urgent d’agir sans attendre.
La commission des affaires économiques a ainsi fait œuvre utile en intégrant l’amendement de la commission des finances à son texte. Je tiens à l’en remercier vivement.
Mes chers collègues, j’espère vous avoir convaincus que nous ferions acte de courage et de responsabilité en adoptant cette réforme d’initiative parlementaire.