Intervention de Jean-Marie Bockel

Réunion du 15 juillet 2015 à 14h30
Programmation militaire pour les années 2015 à 2019 — Explications de vote sur l'ensemble

Photo de Jean-Marie BockelJean-Marie Bockel :

Nous en attestons tous, la révision de la trajectoire financière et budgétaire prévue par ce texte est nécessaire.

Monsieur le ministre, les propos que vous avez tenus ici même mercredi dernier sont rassurants, notamment en ce qui concerne l’augmentation des effectifs et l’efficacité du recrutement. L’attractivité de nos forces armées témoigne de leur rayonnement et de l’image positive qu’en ont les Français, celle d’une armée efficace et respectée.

Les réservistes, opérationnels et citoyens, occupent une place de plus en plus importante dans notre défense ; c’est, bien sûr, nécessaire compte tenu des contraintes budgétaires que nous connaissons. Mais leur intégration parmi les militaires d’active dépasse cette nécessité financière : les réservistes doivent sentir qu’ils font partie intégrante de nos armées. Je suis convaincu que celles-ci sortiront renforcées de cette bonne intégration, garante d’une relation harmonieuse entre les militaires d’active et les réservistes. D’ailleurs, c’est la réalité sur le terrain, en métropole comme dans les opérations extérieures, mais des progrès peuvent encore être accomplis à cet égard.

De ce point de vue, la mise en place du service militaire volontaire ne pourra être que positive, en contribuant au renforcement du lien entre les armées et la Nation, mais aussi, à terme, en favorisant le recrutement.

Néanmoins, j’appelle à rester vigilant sur le financement de cette réforme, qui ne doit pas reposer en totalité sur le ministère de la défense. Nous prenons acte, monsieur le ministre, de l’engagement que vous avez pris la semaine dernière d’une mutualisation de cette dépense après les deux années d’expérimentation. Il s’agit en effet de protéger le budget de la défense, dont l’augmentation est loin d’être un luxe, et c’est une opinion que nous sommes ici nombreux à partager.

À cet égard, le groupe de l’UDI-UC soutient entièrement les clauses de sauvegarde introduites par la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.

La France est une puissance militaire qui assume largement ses responsabilités. Elle est engagée simultanément sur plusieurs théâtres d’opérations. Si nous voulons être à la hauteur de notre stratégie d’influence, particulièrement dans le cadre de Conseil de sécurité de l’ONU et dans d’autres instances – nous l’avons encore vu ces derniers jours –, nous devons préserver cette crédibilité, donc nos capacités d’engagement.

Dans cette optique, il est nécessaire que notre budget de défense soit protégé de surcoûts – lorsqu’ils sont légitimes, bien sûr, parce que résultant d’une décision politique – en cours d’exercice. Pour cette raison, nous soutenons la soustraction de la défense au financement interministériel du surcoût des OPEX.

De la même manière, il paraît juste de mutualiser le coût des opérations intérieures entre les ministères. La nature des menaces est diverse et ne permet plus une distinction tranchée entre crises extérieures et sécurité intérieure.

En conséquence, si notre réponse doit intégrer différents acteurs, il en va de même de son financement, qui ne peut pas reposer en totalité sur les épaules de la défense. Nous avons déjà rencontré une telle difficulté dans le cadre de l’examen du projet de loi sur le renseignement, où les frontières entre menaces intérieures et extérieures se brouillent. Face à ces phénomènes nouveaux, nous ne pouvons pas faire preuve de rigidité ; nous devons nous adapter.

Pour cette raison, nous soutenons l’organisation d’un débat au Parlement sur les conditions d’emploi des forces armées sur le territoire national au début de l’année 2016. Cela a fait l’objet d’un échange entre le Sénat et vous-même la semaine dernière, monsieur le ministre.

La doctrine d’emploi de notre armée sur le territoire français doit évoluer avec la menace. Il s’agit de définir clairement le rôle spécifique de nos forces armées, en parallèle avec les forces relevant du ministère de l’intérieur.

Cependant, cette complexité ne s’arrête pas à nos frontières ; elle concerne aussi, et surtout, nos opérations extérieures. À l’heure où nous menons des guerres essentiellement asymétriques, l’actualisation de la loi de programmation militaire a également pour objectif d’adapter nos armées à la nature de nos nouveaux ennemis.

Les adversaires d’aujourd’hui ne sont pas ceux d’hier. Ils refusent le combat frontal, auquel les armées occidentales sont habituées, sauf lorsqu’ils se considèrent en situation de force. Ils se mêlent à la population civile, rendant toute action militaire plus risquée et controversée. Ils font fi du droit international.

Au travers de cette actualisation, nous ne devons pas uniquement fournir à nos militaires des moyens supplémentaires. Certes, ces derniers sont nécessaires, mais nous devons également leur donner les moyens d’appliquer une doctrine adaptée à la nature des conflits auxquels nous serons confrontés.

Ce dont nous avons besoin aujourd’hui, c’est d’innovation et d’adaptabilité, sur le plan tant intellectuel que stratégique, tactique et industriel. Je ne doute pas que le ministère de la défense et nos industries sauront se montrer à la hauteur du défi à relever.

Cette adaptation, nous devons la réaliser en lien avec nos partenaires et alliés, au travers de l’OTAN, bien sûr, mais aussi de l’Union européenne. Si cela paraît évident, cela ne sera pour autant pas simple à l’heure où la majorité de nos alliés occidentaux paraissent réticents à s’engager militairement.

Forts de notre engagement et de nos capacités, que l’actualisation de la loi de programmation militaire conforte, nous avons un rôle moteur à jouer et une responsabilité particulière à assumer dans la réponse à ces nouveaux défis transnationaux.

Ainsi, je réitère mon soutien, et celui de la majorité de mes collègues du groupe UDI-UC, au projet de loi du Gouvernement tel qu’il a été modifié par la commission.

Au vu des menaces diverses et nouvelles, il est clair que le budget de la défense ne peut pas et ne doit pas faire figure de variable d’ajustement – mais je sais que nous partageons tous ce point de vue. Je suis convaincu, par ailleurs, que le dialogue entre le Sénat et l’Assemblée nationale sur le texte sera constructif, et cela dès ce soir, en commission mixte paritaire. Nous souhaitons ardemment trouver un accord sur ce texte.

Sur un projet aussi important, le débat est sain et nécessaire, mais nous avons tous à l’esprit qu’il est également important dans le contexte actuel, d’aboutir à un consensus : c’est notre responsabilité !

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