Intervention de Daniel Reiner

Réunion du 15 juillet 2015 à 14h30
Programmation militaire pour les années 2015 à 2019 — Explications de vote sur l'ensemble

Photo de Daniel ReinerDaniel Reiner :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous abordons l’une des dernières étapes de l’actualisation de la loi de programmation militaire de 2013, actualisation prévue par la loi initiale et anticipée de quelques mois pour répondre au contexte sécuritaire du moment.

Le travail en commission a été fructueux. Nous présentons aujourd’hui au vote un texte qui maintient notre vigilance sur l’exécution budgétaire de la loi. Ce texte est un point d’équilibre entre la poursuite de la modernisation de nos armées, la nécessaire adaptation de ces dernières aux opérations que nous menons aujourd’hui, le défi de la contrainte budgétaire et les ambitions de notre pays. Il décline les décisions prises par le Président de la République en conseil de défense, le 29 avril dernier. Ce sera un beau symbole que de l’adopter au lendemain du 14 juillet.

Je le redis, ce n’était pas si simple dans le contexte budgétaire du moment, comme en a témoigné le débat de jeudi dernier relatif à la loi de règlement. La commission des finances le sait bien.

Cette actualisation permet non seulement de compléter les systèmes d’armes qui équipent nos forces et d’accompagner la montée en puissance du renseignement et de la cyberdéfense, mais également de « densifier notre modèle de défense ».

À la suite des attentats des 7 et 9 janvier derniers, nos armées ont montré qu’elles étaient des leviers puissants de résilience face à la déstabilisation que voulaient imposer les terroristes ! Nous le savions, nous l’avons vérifié : nous disposons d’une armée performante servie par des femmes et des hommes d’un professionnalisme remarquable et remarqué par tous nos concitoyens. Il tient à nous de conserver précieusement cette force contre des menaces devenues de plus en plus multiformes et diffuses.

Ce projet de loi prévoit des moyens nouveaux.

En premier lieu, il fournit des moyens supplémentaires grâce à un effort budgétaire exceptionnel de 3, 8 milliards d’euros en crédits budgétaires : ceux-ci permettront d’ici à 2019 de préserver 18 750 postes de la déflation prévue. À ce titre, 2, 8 milliards d’euros y seront consacrés.

Cette mesure essentielle relative aux effectifs permettra d’honorer les contrats opérationnels demandés aux armées ; en particulier, l’armée de terre pourra porter sa capacité opérationnelle de 66 000 à 77 000 hommes, ce qui lui donnera la possibilité d’assurer sa mission de protection sur le territoire national, mission dont il conviendra de définir plus précisément les contours.

Cette revue permet également de poursuivre la montée en puissance des forces spéciales et de la cyberdéfense, qui sont les réponses aux menaces du moment.

En deuxième lieu, le projet de loi prévoit la suppression des recettes exceptionnelles et leur remplacement par des crédits budgétaires. Nous le souhaitions. Le caractère aléatoire de ces recettes exceptionnelles contrastait trop avec la volonté présidentielle, plusieurs fois affirmée, de sanctuariser le budget de la défense.

Je crois aussi, mais je ne suis pas le seul, que le pari en matière d’export, en particulier sur le Rafale, est en passe d’être gagné. Ces marchés permettent autant de sauvegarder nos emplois que de consolider notre industrie de défense et de réaliser pleinement – ce n’est pas rien – la loi de programmation militaire en matière d’équipements nouveaux.

Enfin, nous accomplissons un effort accru pour combler des carences capacitaires, ainsi qu’en matière d’entretien programmé de nos matériels, deux priorités affichées d’emblée par vous-même, monsieur le ministre, et qui se trouvent ici renforcées.

Outre quelque 500 millions d’euros supplémentaires dans le domaine de l’entretien programmé du matériel, je noterai pour ma part l’acquisition de sept hélicoptères Tigre supplémentaires, une augmentation des cadences de livraison des NH90, ainsi que la commande de quatre avions de transport C-130, dont deux seront équipés pour le ravitaillement en vol des hélicoptères. Cet effort est justifié, car l’aéromobilité est une donnée incontournable de la réussite de l’action de nos forces engagées dans des opérations extérieures, notamment dans la bande sahélo-saharienne. Nous avons pu le mesurer de nos propres yeux.

Ce texte présente enfin deux nouveautés intéressantes : l’évolution de la représentation professionnelle des militaires, avec la création des associations professionnelles nationales de militaires, ou APNM, mais aussi la création en forme d’expérimentation du service militaire volontaire sur le modèle du service militaire adapté, dont nous avons pu également mesurer l’efficacité outre-mer.

Le projet de loi ainsi modifié sera soumis ce soir à une commission mixte paritaire, dont je ne doute pas de l’issue favorable. Il restera quelques points à discuter. Le premier concerne la clause qui exclut le ministère de la défense du financement des surcoûts en matière d’opérations extérieures, que vient d’évoquer Jacques Gautier.

Comme cela a été rappelé par M. le ministre lors de la discussion sur les articles, les dépassements de la dotation annuelle au titre des opérations extérieures font l’objet d’un financement interministériel. Et pour des raisons évidentes de solidarité avec les autres ministères, le ministère de la défense ne saurait s’en exonérer. Il s’agit d’une tradition fort ancienne que rien ne justifie de modifier aujourd’hui.

En matière de cessions immobilières, s’il n’est pas possible d’exonérer totalement le ministère de la défense de sa participation au dispositif d’aide au logement social, comme le préconisent les auteurs d’un amendement adopté au Sénat, je pense, avec mes collègues du groupe socialiste et républicain, qu’il est possible de trouver un compromis en fixant un plafond à la décote. Nous présenterons d’ailleurs un amendement en ce sens en commission mixte paritaire.

S’agissant des opérations intérieures, nous ne pensons pas utile d’ouvrir cette année Sentinelle à un financement interministériel. Nous estimons en revanche qu’il convient de l’évaluer ; il sera toujours possible de revenir sur son financement ultérieurement. Enfin, nous reparlerons du secret défense opposable aux commissions.

En conclusion, mes chers collègues, au regard de l’effort consenti à l’occasion de cette actualisation – des moyens financiers en hausse qui permettent la revue des effectifs, des équipements supplémentaires et mieux entretenus, le renforcement du lien entre armée et nation – le groupe socialiste et républicain votera résolument cette actualisation de la loi de programmation militaire, dont j’ai déjà dit lors de la discussion générale du 8 juillet dernier combien elle était inédite. N’oublions pas que cette loi de programmation militaire est la première à être revalorisée en cours d’exécution.

Cette actualisation redonne du souffle politique et renforce la légitimité que requiert un effort engageant la nation entière. Ce texte est le meilleur hommage que nous, parlementaires, pouvons rendre à nos militaires, qui se mobilisent en tout lieu et à tout instant sur le territoire national et hors de nos frontières.

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