Monsieur le rapporteur, c'est un problème difficile et sensible, et je comprends parfaitement que vous l'abordiez de front. Vous êtes en droit d'attendre que je fasse de même.
Je dirai que l'histoire du CSA et des organismes qui l'ont précédé a été ponctuée de fuites. Certaines ont même touché au secret des affaires. À partir du moment où vous confiez une responsabilité à un organisme collégial et qu'il ne s'agit pas de personnes formées comme de futurs magistrats administratifs, comptables ou judiciaires, sur un certain nombre de principes, ou d'individus - je ne vise personne - dont le métier a consisté pendant des dizaines d'années à se faire la recherche et l'écho d'informations, le risque existe plus au CSA qu'au Conseil constitutionnel ou à l'Assemblée générale ordinaire du Conseil d'État.
Depuis le 24 janvier 2013, date à laquelle j'ai commencé à exercer mes responsabilités, il y a eu deux exemples de fuites - et non des moindres.
Le premier a concerné un rapport que je n'avais même pas encore vu, qui a été élaboré au sein d'un groupe de travail sur la situation de France Télévisions. L'affaire a été reprise selon la procédure habituelle, examinée par le groupe de travail, puis par le collège ; elle a donné lieu à un rapport, qui a pu être critiqué, mais dont je remarque qu'il a été la référence de beaucoup, en particulier en réponse à certaines attaques du président Rémy Pflimlin lui-même.
Le second exemple découle d'un certain nombre d'articles de presse, qui ne peuvent guère laisser de doute sur la provenance des informations qui y sont dévoilées, et a trait au vote qui a eu lieu lors de la désignation de la présidente de France Télévisions.
Je n'ai jamais menacé qui que ce soit de poursuites judiciaires, mais je dois relever que l'article 5 de la loi garantit strictement le secret des délibérations, qui est même protégé par la loi du 16 novembre 2013, qui rappelle que sa transgression est strictement prohibée et punie par le code pénal.
En outre, je rappelle que l'article 40 du code de procédure pénale peut conduire le président, sur demande d'un membre ou de plusieurs d'entre eux, à saisir le juge si la fuite provient d'un de leurs collègues.
Si je peux répondre intégralement de tous mes actes et de toutes les procédures auxquelles je participe, dans le secret des délibérations, je ne suis qu'un membre d'un collège dont j'exerce la présidence, et je n'ai ni autorité, ni vocation à surveiller les conversations, quel qu'en soit le canal, de tel ou tel de mes collègues.
Je n'ai jamais eu d'informations me permettant d'identifier la source de ces indications, vraies ou fausses. Noter une indication n'est assurément pas en confirmer la véracité : c'est simplement en caractériser la nature. Au regard du respect du secret des sources prévu par le législateur, je n'ai personnellement aucun moyen d'user d'une quelconque procédure qui permette d'empêcher ce type de phénomène, au-delà de l'autorité purement morale que l'on voudrait bien me reconnaître.
Faut-il renoncer à une obligation parce qu'en de très rares circonstances, mêmes si elles sont significatives, elle ne paraît pas avoir été observée ? Je ne le pense pas. Je crois qu'elle doit être réitérée, et je fais confiance, par principe et par raison, à la conscience de mes collègues, comme à celle des collaborateurs du CSA, pour respecter la loi.
Il faut se garder d'attacher une importance exagérée à des faits isolés. Cela me rappelle un raisonnement d'une tout autre nature, souvent opposé à l'action du CSA, qui consiste à lui demander pourquoi il contrôle avec une minutie la protection de l'enfance ou de l'adolescence, ou le pluralisme politique, puisque tout est possible et permis sur les réseaux sociaux. Je caricature, mais c'est le même type de problématique : nous devons veiller aux principes et nous assurer de leur respect chaque fois que c'est possible. C'est essentiel, et il y va de la nature et de la portée de la délibération collégiale. Je crois que cette délibération collégiale, au sein du CSA, a beaucoup apporté et continue à beaucoup apporter. Qu'il y ait eu des incidents, c'est incontestable. Ils ne sont pas limités à la période dont j'ai eu la responsabilité. Cela ne doit pas conduire à des conclusions générales négatives.