Le problème, c’est que ce choix n’est pas neutre et pourrait coûter cher aux Français.
En effet, si les fréquences sont vendues trop tôt, le montant des enchères risque d’être très inférieur à ce qu’il pourrait être au moment où les opérateurs de téléphonie mobile auront vraiment besoin d’une telle réaffectation. Or ce n’est pas une paille, puisque plusieurs centaines de millions d’euros seraient en jeu ! Alors que l’état des finances publiques est plus que jamais critique, le contribuable appréciera…
Dans ces conditions, il n’est nullement étonnant que le présent texte donne à la fois une impression d’impréparation et un sentiment de précipitation, comme le confirme l’historique de sa genèse.
L’impréparation est avérée. L’exécutif a annoncé la mesure depuis trois ans. Le basculement au mois d’avril 2016 est connu de longue date. Or, jusqu’à la fin de l’année dernière, rien n’avait été prévu pour l’organiser.
À cette époque, Mme la rapporteur, que je félicite pour son excellent travail, constatant la parution d’un décret, s’était émue que la commission de modernisation de la diffusion audiovisuelle n’ait même pas été saisie de cette question. Ne voyant toujours rien venir, elle a ensuite déposé, en avril dernier, un amendement d’appel sur le projet de loi Macron visant à accompagner la vente des fréquences, à la suite de quoi, du jour au lendemain, nous avons basculé dans la précipitation. Il faut maintenant tout faire, tout de suite et très vite !
Pour réaliser le deuxième dividende numérique, il faudra mettre les fréquences aux enchères cette année. S’ensuit un agenda technique extrêmement tendu. L’extinction du MPEG-2 doit intervenir au plus tard le 5 avril 2016, ce qui n’est pas dénué de conséquences pour les téléspectateurs : Mme la rapporteur l’a rappelé, le risque d’écran noir pour des millions d’entre-deux ne peut être écarté.
Face à cette situation ubuesque, la commission de la culture à laquelle j’appartiens a adopté le seul parti raisonnable et constructif : respecter les règles du jeu politique tout en essayant de limiter la casse.
Respecter les règles du jeu politique, c’est ne pas remettre en cause le choix politique du Gouvernement de vendre les fréquences maintenant. Nous le regrettons, mais c’est de son ressort souverain.
En revanche, madame la ministre, il est encore possible de limiter la casse technique en obtenant de véritables engagements de la part du Gouvernement sur les trois points sur lesquels la commission précitée est intervenue. Je n’y insisterai pas, Mme la rapporteur les ayant parfaitement développés. Il s’agit d’assouplir le calendrier, d’indemniser les sociétés de diffusion du raccourcissement de leurs contrats et d’étendre l’aide sociale aux foyers recevant la TNT par satellite.
Ce dernier point, en particulier, nous tient à cœur. L’aide prévue par le texte ne concerne que les téléspectateurs recevant la télévision par l’antenne râteau. Il faut l’étendre à ceux qui la reçoivent par satellite ; c’est aussi une question d’équité : alors que ceux-ci avaient été aidés lors du passage au MPEG-2, aujourd’hui que l’on passe au MPEG-4, pourquoi n’en serait-il pas de même ?
Madame la ministre, nous attendons, lors de l’examen des articles qui commencera dans quelques minutes, une attitude d’écoute constructive, avec un engagement clair du Gouvernement sur ces trois points devant la Haute Assemblée.