Intervention de Angel Gurría

Délégation sénatoriale à la prospective — Réunion du 25 juin 2015 : 1ère réunion
Audition de M. Angel Gurría secrétaire général de l'ocde

Angel Gurría, secrétaire général de l'OCDE :

Monsieur le sénateur, le niveau de rémunération d'un travailleur dépend de sa productivité. Un problème apparaît, qui peut devenir insoutenable à terme, quand cette dernière se met à stagner ou même baisser et que, dans le même temps, le salaire continue à augmenter. C'est exactement ce qui s'est passé en Grèce, en Italie, en Espagne et en France. Ce phénomène est bien antérieur à la crise.

Il arrive un moment où les pays concernés doivent reconnaître la réalité et s'ajuster. Auparavant, ils le faisaient au travers de leur monnaie. Maintenant que l'euro est la monnaie commune, toute dévaluation est impossible. L'ajustement ne peut se faire que par les salaires ou une hausse de la productivité. Le coût salarial unitaire rapporte le coût horaire de la main-d'oeuvre à la productivité horaire du travail.

Le problème de la France, c'est qu'elle a déjà perdu en productivité totale et qu'elle commence à perdre en compétitivité à l'exportation. Et ce alors même que, je le répète, la productivité par salarié est élevée : le paradoxe est là, car c'est plus difficile d'obtenir une productivité plus élevée que de travailler une heure de plus chaque jour.

La haute productivité, en France, c'est culturel, ce sont des compétences. Mais le budget de 32 milliards d'euros que vous consacrez aux différents systèmes d'aide au travail dans le cadre de la formation professionnelle sont-ils bien utilisés et répondent-ils aux souhaits des employeurs et des marchés ? La réponse est non. La bonne nouvelle, c'est que vous avez l'argent, vous n'avez pas besoin d'en chercher : il faut simplement mieux l'utiliser.

J'en viens au numérique. Son développement menace, selon les pays, entre 20 % et 40 % des emplois, surtout ceux des niveaux inférieurs. La menace sur les emplois les moins qualifiés est réelle et grandit de jour en jour. Cette proportion s'accroît avec le temps. La réponse tient en trois mots : compétences, compétences, compétences. Il faut agir non seulement sur le niveau mais aussi sur la portabilité des compétences d'un poste à l'autre, donc raisonner en termes d'employabilité et non plus d'emploi.

Le numérique, c'est aussi une promesse, une source de développement, un moyen de promouvoir l'éducation, de faciliter, dans les zones plus éloignées, l'accès à l'information, voire aux soins. De toute façon, il s'agit d'une évolution inévitable : soit vous prenez le train en marche, soit vous restez sur le quai.

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