Ce n’est pas parce qu’il y a des fraudeurs qu’il faut renoncer à toute volonté d’adopter des lois pour fixer un cadre général ! On ne peut pas utiliser de tels arguments pour refuser de mettre en application un certain nombre de dispositions !
L’article 3 offre aux maires la possibilité de procéder à des préemptions de logements existants, au motif explicite de reloger des personnes évincées dans le cadre d’opérations de lutte contre l’insalubrité ou de dispositifs de démolition qui ont été subventionnés par l’ANRU. D’ailleurs, j’avais interrogé le Gouvernement sur ce sujet fort intéressant. Il m’avait été répondu que l’Agence ne distribuait aucune subvention sans que les collectivités locales et les bailleurs se soient assurés, comme c’est bien normal, du relogement de tous les ménages évincés.
Mais l’Agence admet aussi que seuls 68 % des ménages sont aujourd'hui concernés, et elle n’est pas en mesure de produire ce que le comité d’évaluation et de suivi de l’ANRU appelle « le taux d’évaporation », à savoir les ménages qui auraient dû être relogés et qui ne l’ont pas été.
L’article 3 de cette proposition de loi offre donc un outil supplémentaire très volontariste.
L’article 4, quant à lui, est presque un article de bon sens. Il vise à maintenir dans leur logement, pour une période indéterminée, les ménages reconnus éligibles au DALO, et permet par ailleurs de ne pas œuvrer contre la mixité sociale.
Il paraît en effet illogique d’expulser les personnes totalement éligibles au DALO, qui, compte tenu de cette éligibilité, doivent être relogées par l’État.
Par ailleurs, les sommes déboursées par l’État pour le non-respect de décisions de justice lorsqu’il ne reloge pas les ménages éligibles sont un vrai gâchis.
L’action n°4 du programme 135 du projet de loi de finances pour 2010 indique que la mise en œuvre du droit au logement opposable peut être source de frais de contentieux et qu’elle est prévue dans ce même programme, dédié au développement et à l’amélioration de l’offre de logement. C’est un gâchis supplémentaire.
Je rappelle, car je sens déjà poindre de vives réactions, que le sursis à l’expulsion sera temporaire puisque l’État a une obligation de relogement. En refusant ces expulsions, on évitera, le temps que l’État assume la responsabilité de reloger qui lui incombe, les ruptures dans le parcours résidentiel de nombreux ménages, ruptures que les maires savent être très difficiles pour les familles, ainsi qu’une précarisation rapide et dramatique de ces dernières.
Vous le savez, toute une série d’événements en chaîne découle d’une décision d’expulsion : parcours scolaire et insertion interrompus, etc.
Je rappelle, enfin, que le droit au logement opposable, le DALO, est une obligation que l’État s’est lui-même imposée, mais qu’il a du mal à honorer. C’est ce qui justifie la proposition faite au travers de l’article 5, mes chers collègues.
L’article 5 consacre la mobilisation du parc privé pour loger les attributaires du DALO. Sur ce point, je tiens à remercier M. le rapporteur, car une longue discussion nous a quelque peu éclairés.
Nous constatons aujourd'hui que l’on prend la décision de reloger les personnes éligibles au DALO dans les quartiers dits « de la politique de la ville ». Or nous souhaitons exactement le contraire puisque nous sommes favorables dans nos communes à la mixité sociale.
Quand le préfet, à Dijon, décide de reloger dans les quartiers de la politique de la ville 100 cas éligibles au DALO, sur les 200 cas enregistrés, comment voulez-vous que les choses évoluent dans le bon sens ?