Intervention de Alain Vasselle

Réunion du 15 septembre 2015 à 21h30
Modernisation de notre système de santé — Article 5 quinquies D, amendement 230

Photo de Alain VasselleAlain Vasselle :

Monsieur le président, mon intervention sur l’article vaudra également présentation de l’amendement n° 230 que j’ai déposé et soumis à l’attention de la commission et de la Haute Assemblée.

L’article 5 quinquies D introduit par l’Assemblée nationale visait à interdire l’exercice de l’activité de mannequin à toute personne dont l’indice de masse corporelle, ou IMC, serait inférieur à une valeur définie.

La difficulté tient au fait que l’Assemblée nationale a fait référence à cet indice. Il faut le rappeler, si l’anorexie mentale est un fléau qui touche près de 40 000 personnes en France et qui doit être fermement combattu, elle ne relève pas du domaine législatif et ne peut encore moins être réduite à un simple calcul mathématique. La pertinence de ce critère d’évaluation suscite des réserves et soulève des problèmes médicaux, juridiques et économiques.

L’anorexie est une maladie psychique complexe qui doit être appréhendée de manière globale par la médecine et non par un simple chiffre qui n’est qu’un indicateur. De plus, les limites des seuils IMC recommandés par l’OMS ne varient pas selon la morphologie d’une personne, son sexe, son âge. Il faut donc les interpréter avec la plus grande prudence.

Ce critère ne s’applique qu’à l’embauche du mannequin, et il est susceptible de varier au fil du temps sans aucune vérification ultérieure, ce qui ne peut en rien garantir l’état de santé du mannequin sur le long terme.

Dès lors qu’il s’appliquera au secteur spécifique du mannequinat, ce critère pourrait aussi être étendu à d’autres secteurs d’activité et d’autres métiers. Définira-t-on un seuil IMC par métier qui interdira certaines embauches ? Un IMC d’obésité sera-t-il défini pour empêcher l’accès à certaines professions ? Définira-t-on un IMC pour autoriser la pratique de certains sports, comme pour l’haltérophilie, le marathon… ?

Il introduit une discrimination forte à l’embauche, puisque « l’apparence physique » ou « l’état de santé » font partie des discriminations mentionnées à l’article L. 1132-1 du code du travail.

Il faut aussi s’interroger sur les conséquences économiques de cet unique critère d’embauche qui défavoriserait les agences de mannequins françaises au profit des agences étrangères ou les inciterait fortement à délocaliser leurs activités, Paris étant la capitale de la mode.

L’amendement n° 230 qui viendra en discussion dans un instant vise à supprimer le critère d'IMC dans l'exercice de l'activité de mannequin et à rappeler spécifiquement aux agences de mannequin leurs obligations, qui relèvent des articles L. 4121-1 et suivants du code du travail, de prendre « les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs ».

Il permet au médecin du travail de jouer pleinement son rôle tant dans la prévention, dans le constat d’un risque pour la santé du mannequin que dans ses recommandations médicales auprès de l’agence de mannequins conformément aux articles L. 4624-1 et L. 4624-3 du code du travail.

Tels sont les éléments de l’exposé des motifs qui justifient cet amendement.

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