Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, M. Claude Jeannerot ayant malheureusement dû retourner en urgence dans son département pour des raisons personnelles, je vais vous faire part de ses observations sur cette proposition de loi.
L’existence de logements vacants est un scandale aux yeux de tous. L’indignation de nos concitoyens est bien compréhensible au moment où tant de gens ont du mal à se loger.
Le taux de vacance est actuellement très bas, et c’est justement ce qui révèle la tension du marché et ce qui explique le nombre de demandes non satisfaites.
C’est au moment de l’appel de l’abbé Pierre que ce taux a été le plus bas. Il était alors pratiquement impossible de trouver un logement.
Aujourd’hui, le rapport public du Conseil d’État pour l’année 2009, intitulé Droit au logement, droit du logement, dresse un constat inquiétant : 3, 5 millions de personnes seraient mal logées ou non logées et le nombre de personnes hébergées est en forte augmentation.
On assiste par ailleurs à une « déconnexion » entre le montant du loyer et les caractéristiques du logement. Les ménages doivent consentir un effort financier accru pour se loger, sans que cet effort s’accompagne d’une amélioration des conditions de logement. La perte du pouvoir d’achat ressentie par la population semble découler d’abord des dysfonctionnements récents constatés sur le marché du logement.
Monsieur le secrétaire d’État, c’est à cette demande de logements qu’il nous faut répondre. L’État a tendance à se défausser sur les collectivités locales qui sont de plus en plus sollicitées. Encore faudrait-il leur donner les moyens d’agir.
À ce titre, l’article 3 du présent texte vise à doter les communes d’un véritable pouvoir d’intervention. Il reprend une proposition formulée dans un rapport du Conseil d’état de décembre 2007 sur le droit de préemption urbain. Il s’agit de confirmer que les communes peuvent préempter à fin de relogement et d’élargir cette prérogative au motif de relogement de personnes évincées dans le cadre d’opérations de lutte contre l’insalubrité, d’aménagement, voire de démolition.
Il existe plusieurs procédures en matière de lutte contre l’insalubrité, mais le relogement final échoit toujours à l’autorité qui a engagé la procédure, c’est-à-dire au maire ou au préfet. Compte tenu des problèmes que rencontrent ces personnes publiques pour procéder à des relogements dans leur propre parc social, on peut craindre une diminution du nombre des procédures engagées du seul fait des difficultés à reloger les ménages concernés.
Ainsi, offrir aux maires la possibilité de procéder à des préemptions de logements existants afin de reloger des personnes évincées dans le cadre de ces procédures constitue un outil supplémentaire, dont le financement serait de surcroît assuré par les sommes dues par les propriétaires de logements insalubres.
L’évolution du droit dans ce domaine est d’autant plus indispensable que le Conseil d’État a rappelé, dans sa décision du 6 avril 2001, que des préemptions peuvent être effectuées pour remplir une obligation de relogement à condition de constater que le parc social ne permet pas d’y pourvoir. Or, pour qu’une offre de relogement soit valable, la collectivité est contrainte de respecter certains critères, notamment en matière de géographie et de solvabilité des ménages.
Une commune peut donc disposer de logements vacants sans toutefois être en mesure de les proposer pour le relogement d’une famille. Offrir aux maires la possibilité de préempter est une manière de faciliter l’aboutissement des procédures engagées.