Quoi que vous disiez, leur opinion ne changera pas pour autant. L’Europe, ce sont des États, et les États peuvent dire non. Une réunion de concertation entre gouvernements européens vient d’ailleurs d’échouer. Une autre va avoir lieu, mais je crois avoir compris, d’après les déclarations des Polonais et des Slovaques, que leur détermination à parvenir à un consensus n’est pas plus forte que la fois précédente.
Alors, que va-t-on faire ? Quand on parle d’un « Schengen II », cela vous fait sourire, monsieur le ministre, mais la vérité, c’est que Schengen finira par exploser complètement. On argue que Schengen autorise le contrôle partiel, temporaire, des frontières. C’est vrai, mais enfin, lorsque chaque État en viendra, chacun de son côté, à contrôler telles portions de ses frontières, pour telle période, il faudra bien reconnaître que le système ne fonctionne plus, de tels contrôles devant rester exceptionnels. La situation présente est fort différente !
Si le système explose, monsieur le ministre, il faudra bien trouver une autre solution et refonder Schengen sur des éléments permettant à tous de se mettre d’accord. Cela vous déplaît qu’on le dise, mais c’est la vérité !
Bien des ministres allemands regrettent aujourd’hui d’avoir créé un appel d’air et avouent ne plus très bien savoir comment faire à présent. Ils ont certes eu raison de s’interroger et de finalement changer leur ligne, mais l’appel d’air a eu lieu. On a beaucoup pleuré, et à raison, et on a beaucoup critiqué la situation en Méditerranée : or maintenant, on a la voie balkanique… La Croatie vient d’annoncer qu’elle était devenue une nouvelle voie terrestre, puisque les autres fermaient. Chacun se demande ce qui se passe, les Français les premiers. On a le sentiment que l’Europe est en train d’exploser sous nos yeux…
Dans ces circonstances, le Gouvernement français évolue avec la situation, ce qui est normal, mais il ne rassure pas vraiment les Français sur ses intentions exactes. 24 000 réfugiés ? Personne n’y croit ! Alors donnez-nous d’autres éléments ! Donnez votre accord pour l’installation de centres à la périphérie de l’Europe ou des zones de guerre. On pourrait y regrouper les demandeurs d’asile, y envoyer des officiers de l’OFPRA pour étudier leurs demandes et ne faire venir qu’après ceux qui seraient admis.
Certes, on peut refuser d’accorder le droit d’asile à des migrants alors qu’ils sont déjà présents sur le territoire national, mais il est ensuite difficile de les raccompagner aux frontières. En la matière, nous sommes très loin du compte, même si je ne conteste pas, monsieur le ministre, que vous faites un effort. Alors qu’il faudrait reconduire entre 40 000 et 50 000 personnes aux frontières, seules 15 000 sont effectivement raccompagnées. Votre effort n’est évidemment pas suffisant, et il le sera d’autant moins si l’on doit recevoir massivement des demandeurs d’asile et des réfugiés.
En somme, monsieur le ministre, oui, il faut refonder Schengen, oui, il faut une autre attitude européenne, oui, il faut l’autorité de l’État, oui, il faut que le Gouvernement français rassure les Français, …