Intervention de Jean-Pierre Grand

Réunion du 17 septembre 2015 à 10h45
Modernisation de notre système de santé — Article 9

Photo de Jean-Pierre GrandJean-Pierre Grand :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, cet article crée et définit le mode de fonctionnement de salles de shoot, appelées pudiquement « salles de consommation à moindre risque ».

Je tiens à rappeler que ces salles seront créées dans des locaux distincts des centres d’accueil et d’accompagnement. Déjà, il existe une véritable imprécision autour du lieu d’implantation de ces locaux et de leur financement, à un moment où les établissements de santé publics manquent cruellement de moyens, en particulier humains.

Le texte prévoit que ces salles accueilleront uniquement des usagers de stupéfiants majeurs. Dès lors, on peut s’interroger sur le sort réservé aux mineurs. J’aurais préféré la mise en œuvre de mesures novatrices pour lutter contre la drogue dans les établissements scolaires, la création de dispositifs imaginatifs d’information et de prévention !

Dans ces salles, les toxicomanes apporteront leur drogue et la consommeront sur place, tout cela sous la supervision, donc sous la responsabilité, d’une équipe pluridisciplinaire.

On crée là une zone d’immunité qui s’étendra mécaniquement au trajet nécessaire à la personne pour se rendre dans cette salle. Mes chers collègues, j’appelle votre attention sur le fait que ces gens auront dans leur poche de la drogue, la transporteront, par exemple, dans le tramway. Interpellés par la police, ils pourront invoquer leur immunité en expliquant qu’ils se rendent à la salle de shoot. Je vous laisse imaginer la situation… C’est insupportable !

Cela pose de multiples problèmes juridiques, liés notamment au transport de la drogue. Dans ma commune, des contrôles sont régulièrement effectués dans les tramways. Dans une situation similaire, nous-mêmes, parlementaires, ne serions pas protégés par notre immunité, s’agissant d’un flagrant délit !

Ce serait faire preuve d’angélisme que de ne pas imaginer que le périmètre de la salle de shoot, où la police n’interviendra pas, servira aux toxicomanes et aux dealers de lieu de contact.

Étendue aux professionnels travaillant au sein de la salle et facilitant ainsi l’usage illicite de stupéfiants – la loi de 1970 n’est pas abrogée –, l’immunité prévue dans le texte sera-t-elle toujours opposable en cas d’incidents graves pouvant conduire à la mort ? Je ne le pense pas, au contraire.

Si vous pensez que les familles ne porteront pas plainte contre le personnel d’encadrement, c’est que vraiment vous ne percevez pas l’évolution de la société ! Aucun membre du corps médical, lors des opérations les plus périlleuses, ne bénéficie d’une telle protection.

Vous comprendrez, mes chers collègues, que je suis tout à fait opposé à cet article. J’y reviendrai lors de l’examen de mon amendement de suppression de l’article. Il ne s’agit pas d’agiter les peurs face à un véritable problème de santé publique, mais de débattre, en conscience, sur les conséquences de notre vote d’aujourd’hui.

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