Intervention de Marisol Touraine

Réunion du 18 septembre 2015 à 14h30
Modernisation de notre système de santé — Article 17 bis

Marisol Touraine, ministre :

Je veux revenir sur la procédure et sur la manière dont ma propre réflexion a évolué, car vous auriez pu également citer les propos que j’ai tenus en séance publique à l’Assemblée nationale, monsieur le corapporteur.

Lorsque j’ai présenté le plan pour faciliter l’accès à l’IVG, à la mi-janvier 2015 – je ne me souviens plus de la date exacte, peu importe –, le 11 janvier n’était pas loin.

Aussi, je me suis interrogée et je m’en suis ouverte au Premier ministre : au moment où la France est divisée, déchirée par des événements extérieurs, mais où elle essaie de se rassembler, est-il opportun de donner le sentiment – j’insiste sur cette expression – que nous utiliserions ce mouvement de consensus existant dans le pays pour faire passer des mesures sur des sujets qui appellent des débats ?

La question était de savoir non pas si l’on pouvait parler d’IVG au moment où la France était confrontée au terrorisme, car la réponse était évidemment positive, mais si nous ne risquions pas un procès d’intention. En effet, je craignais que l’on ne nous reproche de nous servir de l’unanimité régnant dans le pays pour avancer sur un sujet sensible, tel que l’était aussi le mariage pour tous – d’ailleurs, on a revu les mêmes acteurs à l’Assemblée nationale –, et faire passer des mesures dont les Français ne voudraient pas.

Je ne dis pas que les choses se seraient forcément passées ainsi, mais, en tout cas, nous n’avons pas voulu prendre ce risque. Aussi, j’ai expressément indiqué, lors de la présentation du plan en janvier 2015, que la mesure de réduction du délai de réflexion que j’avais envisagée n’y figurait plus.

Lorsque je suis arrivée devant l’Assemblée nationale, j’avais dans l’idée, après en avoir débattu en amont avec les parlementaires, que nous allions proposer une mesure relative à la réduction ou la suppression du délai dans le cadre du débat, avec la volonté de discuter de ces deux options.

J’étais moi-même, je l’avoue, hésitante, mais nous avons le droit d’évoluer. Voyez-vous, monsieur Milon, j’estime que c’est toute la grandeur du débat parlementaire. Contrairement à ce que vous dites, c’est non pas à la sauvette, à deux heures du matin, mais à la suite de longs débats à l’Assemblée nationale, tant en commission qu’en séance, que ma position a évolué.

En ce qui me concerne, au départ, j’étais presque favorable au maintien d’un délai symbolique, de 24 heures ou 36 heures, pour qu’il soit dit qu’il y avait un moment de réflexion, si court soit-il. Il m’a été rétorqué qu’un tel moment symbolique ne changerait rien dans la pratique. C’était simplement une façon de dire qu’un temps de réflexion était prévu, mais les femmes sont responsables et capables de prendre leur décision.

J’ai été convaincue et je me suis retrouvée sans argument pour justifier un délai d’un jour ou de deux, plutôt que la suppression du délai de réflexion. Moi qui avais toujours pensé, évidemment, que les femmes pouvaient prendre leurs décisions en pleine responsabilité, je me suis dit qu’il n’y avait aucune raison de maintenir un délai de réflexion, dès lors que cela introduit un doute sur la capacité de décision des femmes.

Voilà ce que je voulais vous dire, monsieur le président de la commission. Vous avez repris mes propos lors de la réunion de commission, qui ne constitue qu’un temps du débat parlementaire ; vous auriez pu en reprendre d’autres, prononcés lors d’étapes ultérieures de la procédure.

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