Intervention de Alain Milon

Réunion du 18 septembre 2015 à 14h30
Modernisation de notre système de santé — Article 18

Photo de Alain MilonAlain Milon, corapporteur :

L’ensemble des orateurs l’a rappelé : cet article 18 a fait couler beaucoup d’encre et il a cristallisé l’opposition des médecins au présent projet de loi, et cela en pleine période de campagne pour les élections aux unions régionales des professionnels de santé, les URPS.

Madame la ministre, nous ne sommes pas opposés au tiers payant en tant que tel. J’ai même envisagé un temps, avec les autres corapporteurs, de conserver dans le présent texte le dispositif élaboré par le Gouvernement, en le rendant facultatif.

Toutefois, nous n’avons pas opté pour cette solution, dans la mesure où elle équivaudrait, dans les faits, au droit existant. En effet, le tiers payant est déjà possible. Dans certains cas, il est même obligatoire, en vertu de la dernière loi de financement de la sécurité sociale. Aujourd’hui, l’ensemble des Français dont les revenus sont inférieurs au seuil de pauvreté bénéficie du tiers payant.

Par ailleurs, même dans le cas où cette procédure n’est pas obligatoire, les médecins l’appliquent majoritairement pour leurs patients souffrant d’affections de longue durée, qui sont pris en charge à 100 % par la sécurité sociale.

Globalement, entre 20 % et 40 % des actes des médecins se voient appliquer le tiers payant. En conséquence, on ne peut pas dire que les médecins s’opposent à ce système : ils y ont recours pour les populations fragiles. Le tiers payant permet ainsi de répondre à la question du non-accès aux soins pour motif financier.

Or la première justification du tiers payant n’est pas de cette nature : elle repose sur le taux de prise en charge par la sécurité sociale, en matière d’optique ou de soins dentaires. Dans ces domaines, on le sait, les taux de remboursement proposés par l’assurance maladie restent faibles. En outre, du fait, notamment, de l’absence de réévaluation des tarifs, certains médecins pratiquent des dépassements d’honoraires autorisés.

Qu’il s’agisse du taux de prise en charge ou des dépassements d’honoraires, le mécanisme du tiers payant généralisé n’apporte rien d’autre que des contraintes, et cela sans résoudre le problème de fond.

Les dépassements d’honoraires seront-ils traités dans le cadre du tiers payant généralisé, et si oui, comment ? Le présent texte ne répond pas à cette question. Le tiers payant risque, partant, de soulever des difficultés pratiques particulièrement difficiles à surmonter, si le médecin doit, au cas par cas, en fonction de la complémentaire souscrite, demander au patient le paiement direct des dépassements d’honoraires qu’il est autorisé à pratiquer.

De plus, le mécanisme destiné à appliquer le tiers payant se révèle particulièrement complexe, à tel point que sa mise en œuvre complète est prévue, non plus au 1er janvier 2017, mais en novembre 2017, soit après les prochaines élections présidentielles !

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