Les autorités administratives indépendantes ont trois fonctions : réguler certains marchés ou secteurs économiques ; autoriser ou agréer des activités ; contrôler les actes d'agents publics dans des domaines jugés sensibles. La CNCIS, créée par la loi du 10 juillet 1991, répond clairement à la troisième vocation. Elle n'a ni à réguler, ni à décider, mais à donner des avis au Gouvernement. Elle veille au respect des dispositions de la loi qui l'a fait naître, c'est-à-dire à la légalité des interceptions de sécurité pratiquées et en contrôle l'opportunité. La loi de 1991 a marqué le caractère exceptionnel de cette procédure et défini un quota qui ne peut être dépassé à un moment déterminé : il était de 2 190 interceptions en simultané lors de mon entrée en fonction ; il est de 2 700 depuis ce printemps. La commission rend un avis que le Premier ministre est libre de suivre ou non. J'ai toujours écarté l'idée d'un avis conforme, que certains ont pu envisager. Le Gouvernement est le seul responsable dans des domaines aussi particuliers que ceux relatifs à l'ordre public.
Les interceptions répondent à cinq finalités : la prévention de la criminalité de la délinquance organisées ; la prévention du terrorisme ; les atteintes à la sécurité, espionnage et contre-espionnage ; les atteintes aux activités économiques essentielles de la Nation ; les actions de reconstitution de groupements de fait ou de droit dissous par le Gouvernement. Jusqu'à récemment, la finalité la plus importante en volume a toujours été la première, mais on observe un renversement : sur les quatre derniers mois, la prévention du terrorisme a représenté 39% des interceptions, contre 38% pour la délinquance et la criminalité organisées.
Lorsqu'elle est saisie selon la procédure de droit commun, la commission n'a pas de délai pour statuer. En réalité, nous répondons toujours dans les 24 heures, et le plus souvent dans les 7 à 8 heures. Lorsque la demande est présentée en urgence, comme la semaine dernière à 3 heures du matin, nous statuons dans les 45 minutes : les services ne peuvent affirmer que leur activité est bridée par notre contrôle.
La composition du collège est originale puisque les parlementaires, désignés par le président de chaque assemblée, sont majoritaires. L'actuel représentant du Sénat est M. François-Noël Buffet. Le président de la CNCIS est nommé par décret, sur une liste de trois noms arrêté conjointement par le premier président de la Cour de cassation et le vice-président du Conseil d'État. Traditionnellement, le premier nom a toujours été choisi. C'est toujours un magistrat. Un seul était magistrat de l'ordre judiciaire : mon prédécesseur, Hervé Pelletier.