Nous recevons M. Jean-Marie Delarue, président de la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité (CNCIS). Créée par la loi du 10 juillet 1991 à la suite de l'affaire des écoutes de l'Élysée, la CNCIS est qualifiée expressément depuis l'origine d'autorité administrative indépendante française. Elle sera remplacée par la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR), dotée de compétences élargies, par la loi du 24 juillet 2015 relative au renseignement. Vous reviendrez sur le rôle et les compétences de cette nouvelle autorité, dont la nomination du président entraînera l'entrée en vigueur de l'essentiel de la loi relative au renseignement. Deux des trois membres du collège de la CNCIS sont des parlementaires. Vous nous direz comment son président est désigné, afin que nous puissions apprécier son indépendance - question d'actualité ! La CNCIS emploie cinq personnes ; son budget, en 2015, s'élève à 569 000 euros. Vous exposerez le mode de fonctionnement et la composition de cette commission.
Conformément à la procédure applicable aux commissions d'enquête, M. Jean-Marie Delarue prête serment.
Les autorités administratives indépendantes ont trois fonctions : réguler certains marchés ou secteurs économiques ; autoriser ou agréer des activités ; contrôler les actes d'agents publics dans des domaines jugés sensibles. La CNCIS, créée par la loi du 10 juillet 1991, répond clairement à la troisième vocation. Elle n'a ni à réguler, ni à décider, mais à donner des avis au Gouvernement. Elle veille au respect des dispositions de la loi qui l'a fait naître, c'est-à-dire à la légalité des interceptions de sécurité pratiquées et en contrôle l'opportunité. La loi de 1991 a marqué le caractère exceptionnel de cette procédure et défini un quota qui ne peut être dépassé à un moment déterminé : il était de 2 190 interceptions en simultané lors de mon entrée en fonction ; il est de 2 700 depuis ce printemps. La commission rend un avis que le Premier ministre est libre de suivre ou non. J'ai toujours écarté l'idée d'un avis conforme, que certains ont pu envisager. Le Gouvernement est le seul responsable dans des domaines aussi particuliers que ceux relatifs à l'ordre public.
Les interceptions répondent à cinq finalités : la prévention de la criminalité de la délinquance organisées ; la prévention du terrorisme ; les atteintes à la sécurité, espionnage et contre-espionnage ; les atteintes aux activités économiques essentielles de la Nation ; les actions de reconstitution de groupements de fait ou de droit dissous par le Gouvernement. Jusqu'à récemment, la finalité la plus importante en volume a toujours été la première, mais on observe un renversement : sur les quatre derniers mois, la prévention du terrorisme a représenté 39% des interceptions, contre 38% pour la délinquance et la criminalité organisées.
Lorsqu'elle est saisie selon la procédure de droit commun, la commission n'a pas de délai pour statuer. En réalité, nous répondons toujours dans les 24 heures, et le plus souvent dans les 7 à 8 heures. Lorsque la demande est présentée en urgence, comme la semaine dernière à 3 heures du matin, nous statuons dans les 45 minutes : les services ne peuvent affirmer que leur activité est bridée par notre contrôle.
La composition du collège est originale puisque les parlementaires, désignés par le président de chaque assemblée, sont majoritaires. L'actuel représentant du Sénat est M. François-Noël Buffet. Le président de la CNCIS est nommé par décret, sur une liste de trois noms arrêté conjointement par le premier président de la Cour de cassation et le vice-président du Conseil d'État. Traditionnellement, le premier nom a toujours été choisi. C'est toujours un magistrat. Un seul était magistrat de l'ordre judiciaire : mon prédécesseur, Hervé Pelletier.
La commission emploie cinq agents dont trois de catégorie C - deux secrétaires et un chauffeur-officier de sécurité, celle-ci étant draconienne dans nos locaux - et deux de catégorie A, magistrats de l'ordre judiciaire. Un quatrième poste de catégorie C créé en 2008 n'a jamais été occupé. Les effectifs sont les mêmes qu'en 1991, alors que le champ d'activités de la commission s'est accrue. Depuis 2006, elle contrôle a priori l'ensemble des données de connexion relatives à la prévention du terrorisme, telles que les codes IMSI (International Mobile Subscriber Identity) et IMEI (International Mobile Equipment Identity) pour la géolocalisation notamment. Depuis le 1er janvier, l'ensemble des données de connexion fait l'objet d'un contrôle, cette fois a posteriori. Quant aux demandes de géolocalisation grâce au téléphone, toujours urgentes, nous les contrôlons en temps réel, depuis la loi de programmation militaire du 18 décembre 2013. Notre champ d'activités s'est accru à effectif constant et nous sommes un peu à la peine.
Notre budget est de 569 000 euros annuels, dont 80 % pour les rémunérations. Depuis cinq ans, nous n'avons rien dépensé en investissement. Les frais de fonctionnement s'élèvent à 100 000 euros par an environ. Nous ne devrions pas finir l'année 2015 en rémunérations et en frais de fonctionnement en raison de la création de la CNCTR par la loi du 24 juillet 2015.
Il faut absolument éviter toute interruption du contrôle au moment du passage de témoin avec la CNCTR, faute de quoi je crains que les services ne prennent de mauvaises habitudes. Cela suppose de mettre en oeuvre un minimum de services techniques. Nous avons agrandi la salle d'accès aux données d'enregistrement et de transcription, car il faudra demain pouvoir recevoir les données d'autres techniques ; le nombre de postes pourra être porté à huit, afin de tenir le délai légal de 24 heures. J'ai décidé, par anticipation, de créer un embryon d'équipe technique. Nous avons ainsi été rejoints le 1er septembre dernier par un ingénieur mathématico-informaticien, plus à même qu'un magistrat d'apprécier les dispositifs techniques proposés par les services. J'espère que le président de la CNCTR pourvoira au moins un autre emploi de même nature. J'ai également recruté un troisième magistrat judiciaire, arrivé le 10 septembre. J'ai demandé au Premier ministre, et semble-t-il obtenu, dix-huit emplois pour la future CNCTR, sur l'année budgétaire 2016.
Ma seule préoccupation est que l'efficacité du contrôle ne diminue pas. La loi a instauré des dispositifs dont certains sont infiniment heureux, d'autres que je juge insuffisants - je l'ai dit publiquement à l'époque - , ainsi qu'un grand nombre d'éléments techniques à mettre en oeuvre. Ainsi en va-t-il des balises, déjà fort utilisées quoiqu'irrégulièrement. Le contrôle, a priori et a posteriori, des données recueillies permet de vérifier la véracité de l'autorisation demandé et la conformité de l'exécution par les services. En l'état, nous manquons de garanties techniques pour assurer sur les balises, insonorisations, IMSI catchers et autres instruments nouveaux un contrôle aussi efficace que sur les interceptions de sécurité.
Dans nos locaux, nous conservons tous les enregistrements, dès qu'ils ne sont pas supprimés - la nouvelle loi a porté le délai de conservation de dix à trente jours - , ainsi que la copie des transcriptions qu'en font les services. Demain, j'ignore quel volume de données sera recueilli par les services, combien parviendront à la CNCTR, ni comment. La période de transition technique imposera un certain bricolage. Je ne veux pas que celui-ci affadisse le contrôle nécessaire sur une surveillance qui porte forcément atteinte à la vie privée.
Je veux d'abord vous rendre hommage et vous dire combien vous représentez pour nombre d'entre nous l'exemple de l'indépendance et de ce que doit être le service de la République au plus haut niveau. Vous présidez cette commission depuis plus d'un an : estimez-vous avoir eu les moyens d'assurer la protection de la liberté de nos concitoyens ? Le document que vous nous avez fait parvenir fait apparaitre une réduction de votre budget et un accroissement de vos missions.
Merci de votre hommage, auquel je suis très sensible. Longtemps, les effectifs ont été suffisants. Nous n'étions nullement une caricature de contrôle des services, contrairement à ce qu'on a pu entendre. Mais depuis trois ou quatre ans, disent mes collaborateurs, nous sommes à la peine et manquons de temps ou d'effectifs pour mener notre mission. Notre champ de compétence inclut la visite de la vingtaine de centres d'écoute déconcentrés du Groupement interministériel de contrôle (GIC). Nous voudrions nous rendre dans sept à dix centres par an. En 2014, faute de budget suffisant, ce chiffre a été nettement inférieur, ce qui peut donner aux services l'impression que leur activité est moins suivie. Ces visites sont l'occasion pour moi d'échanger librement avec les fonctionnaires de police. J'ai ainsi appris qu'il s'écoulait six à huit semaines entre la demande du policier de base et son arrivée devant la commission ! Diminuer nos déplacements, c'est diminuer notre capacité d'écoute des services, et notre capacité de contrôle. L'équilibre entre la liberté et la surveillance est un peu atteint.
Quel est votre avis sur la présence de parlementaires dans votre collège ?
Cela a été discuté lors du débat sur la loi sur le renseignement. Dans le rapport annuel rendu en juillet au Premier ministre, l'un de nos membres, par ailleurs président de la commission des lois de l'Assemblée nationale, se prononce fermement contre la présence de parlementaires. Lorsque j'étais Contrôleur général des lieux de privation de liberté, je plaidais déjà pour que le contrôleur soit contrôlé. Le Parlement est un instrument formidable pour ce faire, par un contact fréquent avec les AAI ou, mieux encore, la présence de parlementaires en leur sein. J'y trouve beaucoup d'avantages, a fortiori pour une activité régalienne. Certains brandissent le risque de fuites : en trente ans, pas une seule ! Les parlementaires de la CNCIS ont été exemplaires.
Votre avis nous intéressait car la présence de parlementaires a fait débat, tout comme l'avis conforme. Pourquoi certains de vos avis ne sont-ils pas suivis, et quelles seront les conséquences, avec la nouvelle commission ? Cette année, le Premier ministre n'a pas suivi votre avis à plusieurs reprises.
On note depuis un an un infléchissement de la politique du Premier ministre à cet égard - je vise la fonction et non la personne. Nos avis défavorables représentent à peine plus d'1 % du total. Plus du quart des demandes sont assorties de commentaires voire de réserves, par exemple le passage d'un délai de quatre à deux mois s'agissant d'un mineur. Les services n'émettent pas de demandes pour de fausses raisons. Il nous arrive de leur demander des précisions, des motivations supplémentaires. Nous les obtenons toujours, ce qui explique en partie le faible nombre d'avis défavorables. Ceux-ci sont émis lorsque les conditions légales ne sont pas remplies ou quand il existe des interrogations sur le bien-fondé de la demande, par exemple lorsque quelqu'un est présenté comme extrêmement dangereux alors que les faits sont anciens.
Jusqu'en 2014, les avis ont presque toujours été suivis. Depuis la fin 2014, un plus grand nombre d'avis défavorables n'a pas été suivi, pour des raisons de conjoncture. Le Premier ministre a par exemple jugé le dossier crédible ou, en opportunité, qu'il fallait répondre à un besoin des services. La situation est particulièrement délicate lorsque la personne suivie par la police administrative fait l'objet d'une saisine de l'autorité judiciaire : soit la demande de surveillance porte sur une affaire complètement distincte, et l'avis peut être favorable, sous réserve des compétences l'autorité judiciaire pour l'affaire dont elle est saisie, soit il s'agit de la même affaire, et l'avis est défavorable. Il arrive que cet avis ne soit pas suivi alors qu'il n'y a aucune hésitation juridique. Lorsque nous estimons que l'autorisation a été donnée contra legem, la loi de 1991 nous autorise à adresser une recommandation au Premier ministre pour lui demander d'interrompre l'interception illégale. Cette année, deux recommandations n'ont pas été suivies, ce qui n'avait jamais été le cas depuis 1991. Le Premier ministre prend des risques juridiques et politiques à passer outre ; à lui de les apprécier. Je suis un peu préoccupé par cette évolution.
Compte tenu des évolutions législatives, il paraît indispensable d'avoir un collège dont l'indépendance est en béton armé. Comme Contrôleur général des lieux de privation de liberté, vous étiez tellement indépendant que notre assemblée a considéré que cette autorité devait rester distincte du Défenseur des droits. Votre personnalité a pesé pour beaucoup dans cette décision. La CNCIS va subir une mutation avec les ouvertures rendues possibles par la loi sur le renseignement - je le dis d'autant plus librement que je ne l'ai pas votée. Cette indépendance est encore plus indispensable. Selon la presse, vous n'avez pas souhaité présider cette nouvelle autorité indépendante. Est-ce exact ?
Le communiqué du Conseil d'État dit la vérité sur ce point. Le mois dernier, j'ai demandé à ne pas figurer parmi les membres proposés par le vice-président du Conseil d'État. Disons que s'il avait voulu penser à moi, je l'en ai dissuadé, parce que je pense que la loi sur le renseignement d'une part, et les techniques de saisine des données d'autre part, ne me donnent pas les garanties d'un contrôle suffisant. Par conséquent, je ne souhaite pas m'y associer. Je respecte cet élan - 80 % des parlementaires ont voté cette loi - mais ne m'y associe pas.
Rien ne sert de créer des autorités administratives indépendantes si leurs membres ne sont pas indépendants. C'est la première vertu de ces fonctions. Il faut pouvoir dire des choses qui déplaisent, sinon on n'apporte rien au pouvoir exécutif et au Parlement. Le Sénat a ajouté, dans la loi d'octobre 2007 sur le Contrôle général des lieux de privation de liberté, des dispositions très précises sur l'indépendance du Contrôleur général : un mandat non révocable et non renouvelable, cela me plait. Ces conditions sont bienvenues. J'avais souhaité, dans un rapport au Premier ministre sur un avant-projet de la loi sur le renseignement, que de telles dispositions y figurassent. Certaines y sont. L'indépendance est aussi un état d'esprit. La personne pressentie pour présider la CNCTR présente toutes les garanties à cet égard, j'en ai la conviction. Un autre que moi fera très bien l'affaire.
J'espère que des considérations autres que ma personnalité ont pesé pour décider du sort du Contrôle général des lieux de privation de liberté. La situation des établissements pénitentiaires et des commissariats de police français n'est pas si enviable qu'on se prive d'une autorité indépendante dévolue à cet effet. Je crois avoir dit à votre commission des lois, lors de ma nomination en juin 2008, que quinze ans plus tard, cette autorité pourrait fusionner. Au bout de six ou sept ans, ce temps n'est pas encore venu.
Vous avez l'expérience des AAI, pensez-vous qu'il soit possible de conserver une autre activité en même temps ?
Le président de la CNCTR ne peut pas, raisonnablement, exercer d'autres activités. Les parlementaires membres du collège ont bien entendu leur activité. Je suis partagé au sujet des magistrats. Ceux qui sont chargés du contrôle des techniques de renseignements doivent s'y consacrer à plein temps, mais le flux est trop important pour réunir quotidiennement la totalité du collège. J'imagine qu'une formation restreinte examinera les dossiers au quotidien, en appliquant la jurisprudence établie par le collège dans son entier. Difficile de réunir quotidiennement neuf personnes pour donner une réponse sous 24 heures. On ne va pas non plus réunir tous les jours des segments de commission dans des formations différentes, ce serait meurtrier pour la jurisprudence. Les autres activités des membres doivent être restreintes et ne surtout pas faire peser de soupçons de rapprochement avec des fournisseurs d'accès, des opérateurs téléphoniques ou des services de renseignement ou de police. Au président d'être intraitable, pour lui et pour ses collègues.
On retrouve dans les AAI, très souvent en application de la loi que nous votons, des personnalités issues de la haute fonction publique, du Conseil d'État ou de la Cour des comptes, tous issus de l'ENA, au point que certains parlent de nomenklatura. Certaines personnalités siègent dans plusieurs instances en même temps, par exemple au Conseil supérieur de la magistrature. Est-ce raisonnable ?
Selon vos critères, je fais partie de la nomenklatura.
J'espère être aussi indépendant vis-à-vis de la nomenklatura que d'autres instances. La vertu d'indépendance se trouve plus facilement parmi les personnes ayant l'habitude d'activités juridictionnelles. À la Cour des Comptes comme au Conseil d'État, on a l'habitude de se prononcer tous les jours en pleine indépendance dans de multiples affaires. Mais je ne vois nul inconvénient à aller chercher d'autres profils, comme à l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep) par exemple. L'indépendance est un apprentissage. En repassant mes jeunes années, je peux être critique envers moi-même.
Il est dommage de participer à plusieurs activités simultanément, surtout si elles pèsent sur les choix et réduisent l'indépendance. Les visées politiques de certaines d'AAI compromettent leur indépendance, par exemple quand elles se montrent plus accommodantes avec ceux qu'il faut convaincre pour élargir leur périmètre. Faisons en sorte qu'il n'y ait pas de conflit d'intérêts. Le législateur doit y veiller, si tel était le sens de votre question.
C'était le sens de ma question, qui n'était pas neutre, étant donné certaines nominations annoncées.
Qui contrôlera le contrôleur ? Beaucoup d'AAI ont été créées en réaction au mieux à un problème, au pire à un scandale. Ce ne sont pas forcément de bonnes conditions de création. Comment réguler et renforcer l'indépendance, alors qu'on n'échappe pas totalement à son milieu ni à sa carrière, même en étant intègre ?
Il n'est pas rédhibitoire pour une loi d'avoir été votée après un scandale ou un problème. La CNCIS est née à la suite d'un scandale, celui des écoutes téléphoniques, et d'un problème, l'absence de dispositif français après deux arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme, le 24 avril 1990. Or la loi qui l'a créée est bonne.
Les AAI produisent traditionnellement un rapport annuel, soumis en principe au Parlement. J'ai toujours pu remettre ces rapports au président de chaque chambre et les présenter devant votre commission des lois. C'est un moment d'explication.
On compte aujourd'hui une quarantaine d'AAI sont une. À ce rythme, il faudra créer un Parlement spécial.
Les AAI doivent éclairer les autorités publiques et le Parlement encore plus que l'opinion. Chaque année, le président du Conseil national des droits de l'homme du Maroc présente son rapport devant le Parlement, qui en débat en séance. Avec quarante AAI, il faut bien sûr différencier les modes de contrôle suivant les intérêts des parlementaires. Certaines AAI, récentes ou portant sur des domaines régaliens ou des marchés importants, peuvent être plus suivies que d'autres. On pourrait créer un office parlementaire dédié pour favoriser un dialogue continu. Les parlementaires membres du collège peuvent également informer leurs collègues. Des parlementaires pourraient, à l'occasion d'un budget, éplucher de près les comptes d'une AAI. Je souhaite depuis longtemps que le contrôle du Parlement sur l'exécution des lois soit renforcé. Certains parlementaires peuvent aussi se spécialiser, devenir des « censeurs » pour emprunter ce terme au droit commercial. Il faudrait exiger des AAI qu'elles amendent la rédaction de leurs rapports afin que vous puissiez les utiliser en toute intelligibilité. On peut encore améliorer l'organisation du travail parlementaire et favoriser le rapprochement des membres du Parlement avec certaines AAI.
Les progrès techniques n'incitent-ils pas à changer les méthodes, comme aux États-Unis, où l'on recueille tout un ensemble de renseignements, pas forcément relatifs à la délinquance, sur un ensemble d'individus, pour y trouver ensuite matière à un contrôle social qui n'était pas prévu initialement ? J'ai cru comprendre que vous étiez attentif à la maîtrise de ces nouvelles techniques. Présentent-elles un risque ?
Elles présentent un risque considérable. La loi de 1991 sur les interceptions de sécurité interdit aux services de transcrire des éléments sans rapport avec l'affaire pour laquelle la surveillance a été demandée. Tout ce qui est relatif à la vie privée doit disparaître, ou tout ce qui concerne les relations professionnelles d'un avocat. C'est pourquoi notre commission tient autant à effectuer un contrôle a posteriori. Demain, nous accumulerons les données sur encore plus de personnes. Traditionnellement, les écoutes de correspondance représentaient le summum de l'intrusion, le recueil de données téléphoniques n'apportait rien. Aujourd'hui, la géolocalisation en temps réel se fait uniquement sur des données de connexion. La séparation des données que nous accumulons sera de plus en plus difficile.
Ma crainte est que nous ne soyons pas en mesure de vérifier assez tôt que les données qui n'ont pas trait à l'affaire sont soustraites, comme le prévoit la loi. Que se passera-t-il s'il faut attendre de pouvoir retirer une balise d'un véhicule pour que son contenu soit assimilé ? Et si le service ne me transmet que les données concernant l'affaire, alors que la balise contient des données sur une autre affaire pénale ? Tout cela suppose la bonne foi des services. J'y crois, bien évidemment, mais il vaut mieux vérifier, car nous sommes en démocratie. Un bon policier est un policier qui a de la mémoire, dit-on - ce qui suppose des fichiers, dont certains ne sont pas contrôlés par la CNIL. Ils le seront demain. La CNIL devra faire son travail, et la CNCTR disposer des conditions techniques pour faire le sien.
Est-il crédible que certaines activités de renseignement aient échappé au contrôle de la Commission ?
Oui, c'est crédible. Certaines activités qualifiées de « zones grises » étaient illégales et pratiquées à une échelle que je ne peux pas définir, car nous ne les contrôlions pas. Sans doute d'autres écoutes ont-elles pu échapper à notre contrôle. Il est désormais est autorisé de suivre non des numéros de téléphone mais des personnes - l' « objectif », dans notre jargon. Un délinquant bien organisé possède dix numéros de téléphone ! Les services nous demandent d'abord une autorisation pour en écouter trois ou quatre, puis, au fil des écoutes, en ajoutent d'autres, en retranchent certains : ce sont les « listes modifiées », qui ne sont pas soumises au Premier Ministre. Les services du GIC mettent quinze jours avant de savoir si la personne écoutée correspond bien au numéro surveillé. Il est possible que des policiers introduisent dans ces listes modifiées un numéro de téléphone qu'ils souhaitent surveiller, puis le retirent au bout de quinze jours sans que le GIC ni la Commission ne s'en aperçoivent. Les cas doivent être rares ; cela reste crédible.
La loi sur le renseignement devait légaliser ces pratiques que vous appelez « grises ». La modernisation de nouvelles pratiques grises n'est-elle pas envisageable ?
Dès l'automne 2014, j'avais indiqué au Gouvernement que la loi devait porter non sur les techniques de renseignement mais sur le degré d'intrusion dans la vie privé. Je n'ai pas été suivi. Nous nous trouvons désormais en porte-à-faux, car les techniques qui ne sont pas mentionnées dans la loi sont réputées illégales. Or l'évolution technologique dans ce domaine est galopante. La loi ne mentionne pas les drones. La préfecture de police en a déjà un. Le survol de propriétés privées risque de poser problème, car il me paraît difficile d'assimiler le drone à une technique existante. L'approche choisie par le Gouvernement entraînera le développement de techniques qui nourriront les zones grises, car les services diront toujours en avoir besoin, sans doute avec raison. Le directeur de la sécurité de Google International m'a indiqué qu'il répondrait certainement à la demande de cryptologie de la part des usagers. Cette technique pouvant gêner la prévention de la délinquance, il faudra donc inventer des contre-mesures... J'aurais voulu que le législateur évite de reprendre en permanence ce chantier des évolutions technologiques.
Merci pour vos réponses. Votre audition a mis en avant la nécessité d'un contrôle par le Parlement. On ne peut se contenter d'un rapport annuel d'activité. Je ne suis pas certaine non plus qu'il suffise que des parlementaires siègent dans les AAI. L'expérience montre que les parlementaires qui sont membres de telle ou telle institution la défendent ! La question du contrôle doit se poser lors de l'élaboration de la loi.
La réunion, suspendue à 18h15, reprend à 18h30.
Le Bureau central des tarifications (BCT) a été créé par la loi du 27 février 1958, qui instituait une obligation d'assurance pour la circulation des véhicules terrestres : « Toute personne assujettie à l'obligation d'assurance et qui, ayant sollicité la souscription d'un contrat auprès d'une société d'assurance, se voit opposer un refus peut saisir le Bureau central de tarification ». Ce dispositif a progressivement été étendu aux domaines faisant l'objet d'une obligation d'assurance. Vous nous les exposerez et nous parlerez de la réorganisation du Bureau en 1992. Cette structure se compose désormais de quatre collèges établis chacun à parité entre assureurs et assujettis, avec un seul président, issu du Conseil d'État, de la Cour de cassation, de la Cour des comptes ou Professeur des universités pour les disciplines juridiques. Le BCT a pour rôle exclusif de fixer le montant de la prime moyennant laquelle l'assureur est tenu de garantir le risque qui lui a été proposé. Il a été qualifié d'AAI par le commissaire du Gouvernement dans une décision du Conseil d'État du 19 janvier 1998 « SNC-Grand littoral », qualification reprise par le rapport du Conseil d'État de 2001.
Conformément à la procédure applicable aux commissions d'enquête, M. Laurent Leveneur prête serment.
C'est un mécanisme assez intelligent qui a été mis en place par la loi de février 1958. L'obligation d'assurance en matière de responsabilité civile automobile repose sur les assujettis, automobilistes ou motocyclistes. Or en France, la liberté contractuelle a valeur constitutionnelle. Il fallait combiner l'obligation d'assurance avec ce qui restait de liberté contractuelle. L'assujetti garde le libre choix de l'assureur, parmi les 300 entreprises agréées dans notre pays, sans compter celles de l'Union européenne. Quant à l'assureur, il a la liberté de contracter ou non avec tel assujetti, le refus d'assurance pouvant être légitimement opposé par des compagnies d'assurance à des personnes qui souhaitent souscrire des contrats. Le législateur a donc prévu le cas des personnes qui ne trouveraient pas d'assureur. C'est ainsi qu'est né le BCT, avec pour seul rôle de fixer la prime moyennant laquelle un assureur à qui la souscription du contrat a été demandée sera tenu de le souscrire. Le Bureau fixe donc dans un dossier individuel une prime individuelle pour un contrat individuel.
Le système a fonctionné pendant des années de manière satisfaisante, si bien qu'il a été reproduit en 1978 en matière d'assurance sur les constructions, lorsque la fameuse responsabilité civile décennale a été rendue obligatoire, puis en 1982, lorsque le législateur a généralisé l'obligation d'assurance en matière de catastrophe naturelle, en 2002, lorsqu'il a imposé aux médecins l'obligation de s'assurer, et l'an dernier, quand ont été créées de nouvelles obligations d'assurance en matière d'habitation : responsabilité des copropriétaires, responsabilité civile des syndicats de copropriétaires, responsabilité civile des locataires.
L'organisation du Bureau a été remodelée en 1992. Jusque-là, l'administration du ministère des Finances assurait le secrétariat et l'instruction des dossiers ; depuis, le monde de l'assurance (Fédération française des sociétés d'assurance et le Groupement des entreprises mutuelles d'assurance) fournit les moyens, locaux ou secrétariat. Les membres du Bureau sont nommés par arrêté ministériel et ne sont pas rémunérés. Il n'y aucun argent public dans cet organisme, pas de sanctions, ni de primes. Le Bureau se contente de rendre des décisions individuelles pour des assujettis qui n'arrivent pas à trouver d'assureur à cause d'un profil de risque élevé. Pourquoi avoir créé cet organisme ? Sans doute parce qu'il évite à l'administration de s'impliquer dans des décisions parfois difficiles, préservant ainsi la hiérarchie qui remonte jusqu'au Premier Ministre.
Le Bureau a très bien fonctionné jusqu'en septembre 2014, moment où a été mise en application la loi du 11 octobre 2013 sur la transparence de la vie publique, et notamment son article 11 qui fait obligation aux membres des AAI de présenter une double déclaration de patrimoine et d'intérêts, à l'instar de ce que font les élus. Le BCT n'est qualifié d'AAI par aucun texte législatif, mais par le rapport du Conseil d'État de 2001. Face à l'obligation de rendre leur double déclaration au 1er octobre 2014, nos membres, tous bénévoles, ont estimé que la mesure était disproportionnée. Ils ont surtout considéré qu'ils n'entraient pas dans la catégorie des représentants de la vie publique, car ils traitaient de dossiers individuels de manière confidentielle, et 77 des 82 membres du Bureau ont préféré démissionner. Depuis...
Il est délicat de recruter de nouveaux membres, au point que la nouvelle formation qui devait statuer en matière d'habitation n'a pu être mise en place, faute de volontaires pour y siéger. Travailler bénévolement, sans même le remboursement des frais de déplacement, avec obligation de déclarer ses revenus sur les cinq dernières années, car la prescription fiscale doit bien être de trois ans...
Une personne du Bureau m'a indiqué qu'elle peinait à faire sa déclaration patrimoniale car elle a acheté son appartement il y a 25 ans et n'avait pas conservé toutes les factures des travaux accomplis depuis. Les organismes professionnels estiment qu'ils n'ont pas à faire peser de telles obligations sur leurs membres, et les associations de consommateurs souhaitent aussi revenir à une situation plus normale.
Une proposition de loi a été déposée l'an dernier par le doyen Gélard et par Jean-Pierre Sueur, qui constatent qu'il n'y a aucune liste des AAI, si bien que lorsqu'on prend une mesure concernant le régime juridique de ces AAI, le champ d'application du texte est incertain. C'est tout à fait le cas pour la loi du 11 octobre 2013 : certaines AAI ont dû y échapper alors qu'elles étaient concernées et inversement.
Il n'est pas simple de dresser une liste des AAI. Cependant, quand le législateur édicte une mesure les concernant, il faudrait prendre le soin de renvoyer à un décret énumérant les organismes concernés. Cela a été fait, à juste titre, dans l'article 8 de la loi du 11 octobre 2013 qui impose des obligations en matière de gestion de valeurs mobilières aux membres et présidents des AAI opérant dans la vie économique. On ne peut pas mettre toutes les AAI dans le même sac : d'une part celle qui est dotée d'un pouvoir de recommandation et d'édiction de normes, d'un pouvoir de sanction, parfois important, et d'autre part le Bureau central, chargé de fixer une prime dans un dossier individuel, décision qui ne s'impose même pas à celui qui l'a sollicitée, car l'assujetti reste libre de préférer aller chercher un assureur en Irlande ou en Pologne, s'il le souhaite ! Il faut cibler la législation. Elle ne peut s'appliquer à toutes les AAI.
Nous aurions pu vous auditionner comme expert juridique. Vous considérez-vous comme une AAI ?
Pas au sens de la loi du 11 octobre 2013. Cette qualification qui nous a été donnée peut se justifier par le fait que les membres du Bureau sont nommés par arrêté ministériel. Notre organisme est indépendant, car il ne dépend pas d'un pouvoir hiérarchique, comme c'est le cas dans l'administration.
L'administration se décharge en quelque sorte sur le Bureau d'un certain nombre de problèmes, dites-vous. Considérez-vous que ce soit la meilleure solution ?
Si l'État ne peut pas faire fonctionner un organisme comme le nôtre sans le charger de contraintes excessives, il faudra peut-être trouver une autre solution. Ce n'est pas si simple. Depuis 1958, les décisions ne s'imposent pas aux assujettis qui les ont sollicitées, mais aux assureurs qui risquent de perdre leur agrément s'ils ne s'y plient pas. On pourrait envisager un autre système de médiation ou de conciliation. Ce serait sans doute moins efficace.
Chaque formation est constituée de douze titulaires et de douze suppléants.
Tout ce monde pour trouver un assureur à des personnes privés, parfois simplement pour leur véhicule ?
En 2002, quand l'assurance a été rendue obligatoire en matière de responsabilité civile médicale, le Bureau a eu un rôle essentiel, alors que les choses se passaient très mal. Il a aidé à régler le problème. Nous avons traité des centaines de dossiers individuels, dont plus de mille la première année.
De l'administration du ministère des Finances. Un commissaire du Gouvernement assiste aux séances. Il n'impose aucune décision.
Nos membres sont bénévoles. Comme président, je touche une indemnité de 9120 euros par an, versée par le Trésor. Les fédérations de sociétés d'assurance assument les frais de fonctionnement du secrétariat.
Les sociétés d'assurance sont les seules à devoir exécuter les décisions que vous prenez. Or ce sont elles qui vous financent. Les recours sont rares : deux sur les cinq dernières années.
En pratique, les recours émanent des assujettis qui jugent les primes trop élevées.
Il n'en reste pas moins que votre financement est assuré par les sociétés d'assurance qui doivent se plier à vos décisions.
Les membres de votre collège ont démissionné, considérant qu'il était excessif d'imposer une déclaration de patrimoine à des bénévoles. J'imagine que vous avez exposé la situation à qui de droit.
Le ministre de l'Économie et des Finances a été tenu au courant.
J'ai lu dans la presse professionnelle que votre AAI pourrait être dispensée de l'obligation de déclaration, grâce à la loi Sapin II, attendue pour la fin de l'année. Avec ce projet de loi, le Parlement déciderait que vous n'êtes plus une AAI ? S'il suffit de démissionner pour échapper à l'obligation de déclaration ! Ce n'est pas une motivation juridique d'une qualité exceptionnelle.
Je ne connais pas la teneur exacte du projet de loi. Il faudrait surtout s'inspirer de l'article 8 de la loi du 11 octobre 2013, en déclarant que sont soumises à déclaration les AAI énumérées par décret. D'autres organismes ont sans doute eu le même genre de difficultés. Je ne crois pas qu'il suffise de dire qu'on n'est pas une AAI.
Il n'empêche qu'une modification est en préparation pour répondre à vos voeux dans un texte de loi.
Êtes-vous certain d'être une AAI ? Ne devriez-vous pas être indépendant des assureurs plutôt que de l'État ?
Dans la qualification d'AAI, l'adjectif « indépendante » doit être rapproché d'« administrative » : normalement, ce qui est administratif n'est pas indépendant, puisque le Premier ministre dispose de l'administration. Ce n'est pas le cas des AAI, qui échappent au pouvoir hiérarchique. C'est pour cela que l'Autorité de la concurrence peut infliger une sanction sans recevoir aucune instruction du Premier ministre.
Avez-vous besoin des instructions du Premier ministre dans le champ dans lequel vous exercez ?
Certainement pas.
Vous pourriez fonctionner sans être une AAI. Vous rendez des services évidents à la profession.
Il assiste aux séances, il en rend compte, et il peut demander une deuxième délibération.
Le problème vient de ce qu'il y a obligation d'être assuré. L'indépendance devrait être vis-à-vis des compagnies d'assurance, pour veiller à ce qu'elles ne fixent pas des primes exorbitantes, etc. Quant à savoir si tout cela mérite de faire des déclarations de patrimoine, c'est une autre affaire.
Les décisions sont prises par des collèges paritaires ; un conseiller d'État, à la Cour de cassation, à la Cour des comptes ou encore un professeur d'université est garant de leur l'indépendance. En ce qui me concerne, je suis totalement indépendant face aux sociétés d'assurance.
Vos propos sont extrêmement intéressants. Vous avez dit qu'une autorité administrative n'est pas indépendante par nature. L'appellation autorité administrative indépendante contient donc en elle-même une contradiction dans les termes ! Nous nous sommes souvent interrogés sur l'indépendance réelle des AAI. En l'espèce, nous ne sommes pas sûrs que le BCT soit une AAI ; en revanche, nous sommes certains qu'il est indépendant. Il est donc indispensable qu'un commissaire du gouvernement y siège, pour savoir ce qui s'y passe !
La prime pour s'assurer contre les catastrophes naturelles est souvent si élevée que les assurés ne peuvent la payer. Or, ces personnes n'ont commis aucune faute, autre que de se trouver au mauvais endroit, dans une commune dont le maire n'a pas mis en place de PPRI, et d'avoir été frappés par des inondations à répétition. Comment gérer la différence entre le risque réel pour l'assureur et la capacité pour l'assuré de payer de la prime ?
Le bureau de la section catastrophe naturelle a été très peu saisi, une fois tous les deux ans tout au plus, d'où la démission collective, que je comprends. Vous évoquez la tarification catastrophe naturelle. La législation est peu claire en ce domaine. La prime catastrophe naturelle est fixée règlementairement : il s'agit d'un pourcentage de la prime de base de l'assurance incendie des habitations.
Non, il s'agit toujours d'un pourcentage de la prime de base. Mais certains assureurs refusent de souscrire le contrat d'assurance incendie de la maison, de l'entreprise, de l'hôtel... Dans le Sud-Ouest, des hôtels se sont vu opposer des refus d'assurance, sur le risque catastrophe naturelle. Néanmoins, jusqu'à présent, tout le monde a réussi à se faire assurer, même si la prime de base est plus élevée que dans des zones où il n'y a pas de risque de catastrophes naturelles.
Les tarifs deviennent vite prohibitifs alors que ces personnes n'y sont pour rien. Pourquoi ne pas lier le montant de la prime aux efforts que font les gens pour se protéger ? Le rapport entre prime, risque et responsabilité n'est pas clair et je n'ai pas le sentiment qu'on ait envie d'y remédier.
Jusqu'en 1982, le risque catastrophe naturelle était jugé inassurable. Une fois la garantie catastrophe naturelle sur les contrats rendue obligatoire, les choses ont évolué dans le bon sens. Nous avons d'ailleurs très peu de saisines pour les catastrophes naturelles, même si elles se sont multipliées depuis les récentes inondations dans le sud de la France. Il n'y a cependant pas de refus massifs des assureurs, comme c'est le cas pour la responsabilité médicale. Les gynécologues-obstétriciens notamment ont du mal à s'assurer et les primes sont parfois prohibitives.
Vous avez dit que certaines structures n'étaient pas considérées comme des AAI et mériteraient de l'être. À qui pensiez-vous ?
À l'université, on qualifie d'AAI des structures qui ne figurent pas dans le rapport du Conseil d'État en 2001, sans doute parce qu'elles n'existaient pas encore. Plus précisément, j'ai longtemps fait partie de la Commission des clauses abusives : cet organe publie des recommandations qui sont suivies à la lettre par les professionnels. Ses membres sont nommés par arrêté ministériel et un commissaire du gouvernement y siège. Pourtant, cette commission n'est pas considérée comme une AAI.