Intervention de Francis Delon

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 29 septembre 2015 à 9h00
Audition de M. Francis delOn candidat proposé par le président de la république aux fonctions de président de la commission nationale de contrôle des techniques du renseignement

Francis Delon, candidat proposé par le président de la République comme président de la CNTR :

Ne voyez aucune naïveté dans mes propos : nous verrons à l'usage ; mais je n'ai aucune inquiétude quant à notre capacité à obtenir les moyens nécessaires.

Quant aux avis défavorables que le Premier ministre n'a pas suivis, ils sont rares dans l'histoire de la CNCIS, même si le dernier rapport a pointé une augmentation. Toutefois, il peut y avoir des circonstances où chacun prend ses responsabilités, d'autant que la CNCTR peut aller jusqu'à la saisine du Conseil d'État si elle n'est pas satisfaite des explications du Premier ministre. C'est une novation, et la CNCTR ne devra pas utiliser cette possibilité d'une main tremblante. Pour autant, il n'est pas souhaitable que l'épicentre du contrôle bascule dans le champ juridictionnel. Les temporalités du contrôle juridictionnel et du contrôle administratif sont différentes ; elles doivent se conjuguer et se renforcer. Loin d'être réservée à ces cas-là, la saisine du Conseil d'État pourra également s'exercer si la CNCTR s'aperçoit qu'une technique de renseignement dont elle a autorisé la mise en oeuvre n'est pas utilisée à bon escient.

L'accès de la CNCTR au PNCD est un engagement très précis pris par le ministre, M. Le Drian, au cours du débat parlementaire. C'est d'ores et déjà une réalité pour la CNCIS. Naturellement, la CNCTR fera usage de cette possibilité, dans le plein exercice des compétences qui lui sont attribuées par la loi.

Les deux propositions de loi sur la surveillance internationale sont plus développées que les dispositions censurées par le Conseil constitutionnel pour répondre justement à la censure. Désormais, les opérations internationales seront autorisées par le Premier ministre et contrôlées par la CNCTR. Celle-ci aura un accès complet aux techniques et aux renseignements collectés, sans toutefois exercer un contrôle a priori. La CNCTR sera naturellement amenée à débattre de ces textes en interne ; si le Parlement la consulte, elle donnera son avis. Ces textes me semblent aller dans le bon sens, mais je serai prudent sur les modalités : un futur président ne saurait préempter l'opinion de la collégialité.

J'ai exercé de manière ponctuelle des fonctions au sein du ministère de la culture, madame Tasca, sans jamais y avoir été détaché ; j'ai siégé au conseil d'administration de la Bibliothèque nationale sous la présidence de Jean-Noël Jeanneney ; j'ai présidé la Commission de contrôle des oeuvres cinématographiques qui n'est pas une commission de censure : les professionnels, les associations de défense de la jeunesse et les représentants de l'administration qui y siègent vérifient que les films s'adressent à un public adapté. Les débats étaient riches, parfois conflictuels. Le président anime une maïeutique - j'y ai fait l'apprentissage de cette manière de procéder. Enfin, j'ai élaboré à la demande de Mme Trautmann un rapport sur les multiplexes, afin que leur extension ne mette pas en cause les salles d'art et d'essai et la production cinématographique de qualité.

Le contrôle parlementaire s'exerce d'abord à travers mon audition, ce matin au Sénat et cet après-midi à l'Assemblée nationale ; la loi prévoit nos relations avec la délégation parlementaire au renseignement, qui passent en particulier par des auditions auxquelles nous nous prêterons naturellement. Le registre du contrôle politique, assuré par la délégation parlementaire ainsi que par un accès élargi des assemblées au renseignement, et celui du contrôle de conformité de la CNCTR sont à mes yeux complémentaires et doivent favoriser un dialogue que je souhaite nourri.

La présence de parlementaires au sein même de la CNCTR, qui a été longuement débattue, constitue une richesse dans la mesure où ils apporteront leur vision d'élus du peuple et un recul sur notre action. Voilà une garantie supplémentaire du fonctionnement démocratique de notre commission.

Comme M. Delarue l'a rappelé, le contrôle ne se conçoit que s'il est à la fois a priori et a posteriori. Nous allons établir un programme au sein duquel l'indispensable contrôle a posteriori aura toute sa place.

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