Intervention de Laurence Cohen

Réunion du 29 septembre 2015 à 14h30
Modernisation de notre système de santé — Article 35 bis

Photo de Laurence CohenLaurence Cohen :

Lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015, une mesure avait été insérée dans le code de la santé publique sur votre initiative, madame la ministre, pour tenter de réguler les tarifs des traitements de l’hépatite C. Une contribution spécifique avait été créée pour les entreprises titulaires des droits d’exploitation des médicaments destinés au traitement de l’infection chronique par le virus de l’hépatite C.

Nous pensons que cette mesure d’urgence, certes bienvenue, n’a pas résolu le problème de fond, à savoir celui des brevets.

En effet, si des laboratoires pharmaceutiques peuvent fixer des prix exorbitants, c’est grâce au monopole des brevets pharmaceutiques.

Madame la ministre, vous êtes intervenue personnellement pour le Sovaldi, mais nous pensons qu’il faut maintenant recourir à la licence d’office. Utilisée dans d’autres pays, elle permet, pour des raisons de santé publique, de contourner un brevet existant et de distribuer un médicament de même intérêt thérapeutique à un tarif acceptable.

Cette demande émane directement des associations de patients atteints de l’hépatite C, qui exigent une licence d’office, en France, pour le sofosbuvir, la première de ces molécules prometteuses qui révolutionnent le traitement de l’hépatite C, commercialisée par le laboratoire Gilead sous le nom de Sovaldi.

Le cas du sofosbuvir est emblématique. Le prix initialement exigé était de 56 000 euros pour douze semaines de traitement, le coût maximal de production du médicament étant estimé à 80 euros… Il faudrait, pour pouvoir traiter les 128 000 personnes qui en ont un besoin urgent en France, débourser l’équivalent de l’intégralité du budget pour 2014 de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, l’AP-HP, soit 7 milliards d’euros.

Ajoutons que cette molécule doit, dans de nombreux cas, être prise pendant six mois et associée à un autre médicament. Le coût total du traitement s’élève alors à 147 000 euros par patient, aux termes des exigences actuelles des laboratoires.

Cet exemple illustre les dérives du mécanisme de fixation des prix des médicaments, tant sur le plan de la transparence que sur celui des arguments avancés pour justifier des prix aussi exorbitants.

Certains pays européens ont déjà eu recours aux licences d’office pour de nombreux médicaments, ce qui a permis une baisse considérable des prix, contribuant à la lutte contre les inégalités en matière de santé.

Il est de la responsabilité de l’État de garantir, par la loi, l’accès à la santé pour tous. L’octroi d’une licence d’office pour le sofosbuvir s’inscrit précisément dans ce cadre. Les droits des patients doivent primer sur le droit des brevets.

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