Le sujet que la commission des finances nous a demandé de traiter pose la question de l'élargissement continu des bénéficiaires du système et du non-recours à ces droits.
Le risque que nous voyons réside bien dans la légitimité même de ces dispositifs. Au fond, fixer une priorité entre les objectifs est nécessaire, toutes choses égales par ailleurs.
Nous sentons bien la mobilisation croissante des administrations pour rendre effectif l'accès au droit mais, d'une certaine manière, la conjoncture économique fait que plus l'on se rapproche de l'horizon, plus il s'éloigne. C'est un point sur lequel les pouvoirs publics doivent être particulièrement attentifs.
Par ailleurs, la CMU-C, tout comme l'ACS, ne sont plus des dispositifs interstitiels ; ils sont majeurs et massifs, ancrés durablement dans notre paysage social. Cela signifie qu'un certain nombre de dispositions, qui résultent des conditions mêmes dans lesquelles ces dispositifs sont entrés en vigueur, méritent aujourd'hui d'être revues, révisées et sécurisées.
Vous avez insisté, comme nous l'avons fait nous-mêmes, sur les dispositifs de gestion informatique. Ces dispositifs ont été mis en place de façon accélérée entre le vote de la loi du 27 juillet 1999, portant création d'une couverture maladie universelle, et le 1er janvier 2000, date à laquelle la CMU-C est entrée en vigueur.
Il en va de même de la question de la sécurisation des bases de ressources. La Cour des comptes, en 2006, avait insisté sur le fait que la relation avec les services fiscaux devait être bien plus étroite, et qu'il convenait d'adopter un parti-pris entre le souci d'un ajustement au plus près de la réalité des ressources et la simplicité de la prestation.
Enfin, nous n'avons pas voulu nous prononcer de manière catégorique s'agissant des risques que nous entrevoyons, mais appeler l'attention sur un certain nombre de facteurs qui nous semblent devoir plus précisément être analysés et documentés.
Nous constatons certains progrès par rapport aux constats que nous avions réalisés dans le passé. De notre point de vue, ils ne sont pas suffisants. Vous avez été plusieurs à estimer que ces dispositifs interrogent l'architecture même de notre système de protection sociale. J'ai parlé « d'une certaine forme d'échec ». Ce qui est certain, c'est qu'il existe des exemples de pays dont l'assurance de base rembourse mieux les prestations prises en charge. C'est en particulier le cas de l'Allemagne, qui a fait des choix différents des nôtres, où la protection sociale complémentaire est beaucoup plus réduite.
L'Allemagne a recours à un panier de biens et de ressources plus restreint. L'optique n'est pas prise en charge par l'assurance maladie de base et les transports sanitaires ne sont pris en charge que dans des conditions extrêmement strictes.
Un choix tout à fait clair a été fait dans notre pays au profit d'une protection de base, qui est à certains égards plus large que dans d'autres pays, mais qui garantit des taux de prise en charge plus faibles qu'ailleurs. Il s'agit de choix majeurs, qu'il n'appartient pas à la Cour des comptes de commenter, mais qu'elle peut éclairer.
L'intérêt du sujet que vous nous avez proposé de traiter, au-delà des dispositifs eux-mêmes, est de mettre en perspective les évolutions de notre système sur la longue durée. Ce dernier est le résultat d'une longue évolution.