La parole est à présent à M. Jean-Noël Cardoux, président de la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (Mecss).
D'après vos chiffres, la Cades, à la fin de 2015, cumulera 127 milliards d'euros de dettes. Actuellement, l'Acoss, organisme collecteur, cumule également environ 31 milliards de dettes.
L'Acoss a été autorisée à transférer, par an, 10 milliards d'euros de dettes sur la période 2011-2018 ; à ce rythme, avec la réduction du déficit qui est beaucoup moins rapide que prévu, nous allons vers une impasse par rapport aux objectifs qui ont été fixés.
Le président Ract Madoux nous l'a confirmé lors de son audition : la suppression de la Cades devait intervenir en 2024. A ce rythme, ce ne sera pas possible.
En outre, vous l'avez parfaitement souligné, les 31 milliards d'euros à court terme exposent l'Acoss à une augmentation des taux d'intérêt. On va y parvenir, ceux-ci ne pouvant rester négatifs. Un point d'augmentation peut représenter, en charges annuelles, un milliard d'euros supplémentaire, qui viendra s'ajouter au reste.
Pour pouvoir tenir l'engagement de suppression de la Cades en 2024, il faudra donc que l'Acoss, jusqu'en 2019, transfère 30 milliards d'euros supplémentaires, ce qui nécessitera un besoin de recettes annuelles d'environ 3 milliards d'euros.
Vous préconisez à juste titre des mesures structurelles, mais si l'on veut tenir ces délais, il va bien falloir trouver des recettes supplémentaires ! Vous conseillez d'augmenter la CRDS, ce qui est tout à fait naturel. A combien estimez-vous cette augmentation ?
Votre rôle, comme vous l'avez dit opportunément au début de votre propos, n'est pas de prendre des décisions politiques. C'est au Gouvernement et au Parlement de le faire, mais je crains que vous ne nous annonciez un chiffre trop élevé par rapport à l'état actuel des finances des Français.
Je suis donc favorable à deux types de piste, dont nous avions parlé lors du dernier PLFSS.
Tout d'abord, la contribution des bénéficiaires de l'aide médicale de l'État (AME) à 30 euros par an a été supprimée en 2012 ; on estimait alors que celle-ci pouvait rapporter 300 millions d'euros par an. Nous avions préconisé de la porter à 50 euros, sans tenir compte de la progression des bénéficiaires, que l'on ne connaît pas. Une telle contribution pourrait donc rapporter, par an, entre 500 millions d'euros et 700 millions d'euros au budget de l'État, qui rembourse l'AME à la sécurité sociale. On pourrait fort bien l'envisager.
Par ailleurs, pourquoi ne pas instaurer une seconde journée de solidarité pour financer les dépenses sociales et rétablir l'équilibre des comptes de la sécurité sociale, ainsi que nous l'avions évoqué l'an passé ? Abandonner un jour de RTT supplémentaire, sans que cela ne soit toutefois à la charge des employeurs, comme ce fut malheureusement le cas de la première journée de solidarité, pourrait rapporter 2,5 milliards d'euros par an. Je sais que cela pose un problème en matière de code du travail, mais il faudra bien prendre ce problème à bras-le-corps.
Pouvez-vous nous donner votre sentiment sur ces différents points, monsieur le Premier Président ?