Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement.
Fallait-il attendre le blocage du rectorat de Guyane pendant un mois et le ralliement des enseignants à la grève des personnels administratifs avant de dépêcher un énième inspecteur constater le bien-fondé de revendications que vous aviez déclarées une semaine plus tôt « irréalistes », monsieur le ministre ? Ne se moque-t-on pas des citoyens guyanais ?
Depuis la création bruyante du rectorat de Guyane en 1996, ne connaît-on pas la réalité de ce territoire où la population scolaire double tous les dix ans, où les flux migratoires ne sont pas contrôlés et où, sur dix enfants d’une classe d’âge, trois se présentent un jour au baccalauréat, contre cinq qui se perdent dans la nature sans aucun suivi, sans aucun diplôme et sans perspective de formation professionnelle ?
D’année en année, les rapports se succèdent et les chiffres s’alarment : seize langues usuelles parlées dans les écoles ; jusqu’à 80 % d’échec aux évaluations en CM2 ; 73 % des élèves ne maîtrisant pas correctement le français à l’entrée en sixième ; dix points d’écart entre les taux de réussite au baccalauréat de Guyane et de métropole, sans compter la déscolarisation, et la non-scolarisation : 3 000 enfants officiellement, 6 000 ou plus peut-être, d’après les observations sur le terrain du Réseau Éducation Sans Frontières.
Et en face, monsieur le ministre, on fait subir à la Guyane le même rationnement qu’ailleurs ! On supprime, on regroupe, on transfère, on colmate ! Et à chaque grosse grève, un ministre vient, prend des « mesurettes » d’urgence, et promet un plan !
En 2004, Xavier Darcos disait qu’il fallait un plan de rattrapage. Les collectivités locales, pourtant exsangues, ont alors donné la priorité à la construction d’établissements, même en l’absence de fonds européens ; or, aujourd’hui, à l’heure où je vous parle, les enfants de Cayodé sur le Maroni attendent toujours leurs enseignants ! Et ils ne sont pas les seuls ! Il en va de même au lycée de Kourou.