Intervention de Jérôme Bignon

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 8 juillet 2015 à 9h05
Reconquête de la biodiversité de la nature et des paysages — Suite de l'examen du rapport et du texte de la commission, amendement 62

Photo de Jérôme BignonJérôme Bignon, rapporteur :

L'amendement n° COM-62 rectifié supprime le zonage prioritaire pour la biodiversité, au cas où l'évolution des habitats menacerait la population d'une espèce protégée. Potentiellement large, le dispositif vise particulièrement le grand hamster d'Alsace, dont la population a chuté depuis une vingtaine d'années avec le développement de la culture du maïs. Il est inscrit dans l'annexe des espèces d'intérêt communautaire qui nécessitent une protection stricte de la directive Habitats, faune et flore, et sur la liste rouge de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) dans la catégorie « espèces en danger ». La France a été condamnée en juin 2011 par la Cour de justice de l'Union européenne, sans pénalités financières ; une nouvelle procédure pourrait la voir condamnée à une amende estimée à 150 millions d'euros par le Secrétariat général aux affaires européennes (SGAE). Pour répondre à ce risque, un plan national d'actions (PNA) a été élaboré à partir de 2013, concentré sur un périmètre de 9000 hectares au sein duquel des mesures agricoles individuelles et collectives favorisent la réintroduction et le développement du hamster. Les agriculteurs prennent donc eux-mêmes en charge la sauvegarde du hamster sur leur territoire. Les résultats sont encourageants : la surface des cultures favorables à l'espèce est passée de 850 hectares en 2012 à 2800 hectares en 2015. Toutefois, le nombre de terriers fluctue fortement : après une augmentation de 37 % entre 2013 et 2014, il a diminué de 49 % au printemps 2015, notamment du fait de phénomènes météorologiques.

L'article 34 s'inspire des dispositifs relatifs à l'érosion des sols et aux bassins de captage. Il permet à l'autorité administrative d'imposer des pratiques agricoles, c'est-à-dire des obligations de faire, dans des zones spécifiques, après élaboration d'un programme d'actions et du constat du maintien d'une situation critique après un délai de un à trois ans.

Cet article est perçu par les agriculteurs comme une provocation, alors qu'ils sont engagés dans des démarches collectives. Nous devons construire ensemble des solutions avec toutes les parties prenantes, en privilégiant un dispositif conventionnel. Le dispositif actuel prévoit à la fois une obligation et un zonage, critères difficiles à admettre pour les agriculteurs mais qui sont aussi au coeur des attentes des autorités européennes. L'irritation des premiers comme l'impatience des secondes sont tout aussi légitimes... Je suis donc favorable à ces amendements de suppression, et je propose que nous travaillions d'ici la séance publique à l'élaboration d'une solution consensuelle. Je compte me rendre en Alsace afin de rencontrer les agriculteurs. On ne peut imposer un système coercitif sans en discuter auparavant avec les personnes concernées, c'est une question de respect.

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