Je suis très étonné de vos propos sur l'apparente ritournelle du « c'était mieux avant » Je constate que plus le présent se révèle invivable, plus on tente à ridiculiser, voire à criminaliser la nostalgie. Il y a deux ans, j'ai rencontré un professeur de lycée professionnel qui avait été passé à tabac par un élève et avait déclaré à la télévision que l'enseignement désormais s'apparentait à un sport de combat. Dans les années 1970, une fois l'agrégation obtenue, j'ai été nommé dans un lycée technique situé à Beauvais et n'ai jamais posé la question de la discipline ni que ce poste pouvait compromettre ma propre sécurité. Une sorte de ferveur pédagogique nous animait alors. Désormais, on veut professionnaliser le métier de professeur car la transmission des savoirs ne suffit pas à elle seule à faire un bon professeur. C'est une rupture avec plusieurs siècles d'éducation, car il faut désormais tenir sa classe ! Il faut ainsi des professeurs aguerris. Lorsque j'étais jeune enseignant, je n'ai jamais reçu de conseils pour des problèmes de sécurité ! Une rupture extrêmement violente s'est produite. D'ailleurs, aujourd'hui lorsqu'un brillant élève passe l'agrégation, c'est avec le souhait de ne pas enseigner dans le secondaire et de se trouver un poste dans le supérieur. Notre génération avait comme objectif d'obtenir un bon classement et d'enseigner près de Paris, mais jamais de quitter l'enseignement ! La crise des vocations vient de la nouvelle situation réservée aux professeurs et cette situation est en lien évident avec le nouveau public scolaire, donc avec l'immigration.
Si la nostalgie est criminalisée aujourd'hui, c'est parce qu'elle véhiculerait le regret d'une certaine forme d'homogénéité culturelle et ethnique. Ce faisant, on est suspect de racisme ! Souvenez-vous des attaques qui ont été lancées contre certains films comme « Les enfants du marais », ou « Amélie Poulain », voire « Les Choristes », au nom de la diversité ou de la France multi-ethnique. Critiquer le présent de la diversité, c'est se montrer coupable.
Les professeurs se trouvent dans une situation qu'ils n'ont jamais connue. Je ne veux absolument pas idéaliser la période où j'ai été élève et enseignant. J'y ai connu en effet de longues périodes d'ennui, des professeurs beaucoup trop autoritaires ou d'un niveau ne correspondant pas à leurs fonctions. Mais la situation d'aujourd'hui n'existait pas et la difficulté de le dire renvoie à une question qu'on a beaucoup de mal à regarder en face et qui est celle de l'immigration de peuplement.