Chacune de vos questions recèle en fait plusieurs interrogations.
Si je me permets de dire que le Haut Conseil des finances publiques n'est pas une autorité administrative indépendante, c'est parce que le législateur en a décidé ainsi. Je ne suis pas certain que la question du statut soit ici essentielle, mais la création du HCFP est la conséquence d'un traité européen qui dispose de la création d'un comité budgétaire totalement indépendant des pouvoirs législatifs et exécutifs tout en ayant la capacité de les éclairer. Mais la question relève du législateur organique : crée-t-on une structure ad hoc ou élargit-on les compétences et les missions de la Cour des comptes ? Certes, celle-ci exerçait déjà les missions de contrôle budgétaire de manière indépendante, à travers notamment le rapport annuel sur la situation et les perspectives des finances publiques, mais elle ne s'autorisait pas à exprimer un point de vue sur la question des hypothèses macroéconomiques. D'ailleurs, elle s'exprime toujours a posteriori, sauf dans le cadre des débats parlementaires d'orientation budgétaire où elle s'efforce de proposer une vision prospective.
Le législateur a, me semble-t-il, assuré un compromis en proposant la création d'une institution rattachée à la Cour des comptes, faisant en sorte qu'elle soit présidée par le Premier président et qu'elle comprenne un nombre important de magistrats, même s'ils ne sont pas majoritaires. Le législateur a également reconnu l'intérêt d'accueillir des personnalités nommées par le pouvoir politique, en raison de leurs compétences économiques et financières, afin qu'elles apportent leur contribution aux avis et analyses que nous pouvons rendre.
Ce qui doit définir une AAI est un autre sujet. Compte tenu de mon passé, je ne trouve pas du tout illégitime que le Parlement définisse ce qu'est une AAI. Il n'appartient pas à la Cour des comptes de porter une appréciation sur la qualité juridique. Nous nous contentons, s'agissant du contrôle des autorités administratives indépendantes, de rechercher si leur gestion est régulière, efficace et efficiente. Nos recommandations peuvent porter sur leur mode de fonctionnement et leurs capacités à mener à bien leurs missions.
Cela dit, sur ce travail, si vous souhaitez que la Cour des comptes apporte sa contribution sur les missions des AAI qui peuvent se recouper et si la commission des finances du Sénat, qui en a la capacité, venait à nous saisir, nous ferions ce travail très volontiers.
À titre personnel, je dirais qu'on peut en effet avoir le sentiment d'une profusion d'autorités administratives indépendantes, qui peuvent être considérées comme autant de démantèlements de l'État. Ces autorités sont néanmoins toujours placées sous le contrôle de la Cour des comptes mais aussi du Parlement, qui peut également exercer un suivi annuel de leurs activités. Vous pourriez obtenir des documents financiers et désigner un rapporteur spécial pour assurer davantage le contrôle du Parlement sur les missions de ces autorités.
C'est important de garantir leur indépendance, mais cette dernière ne doit pas en empêcher le contrôle !