Intervention de Yvon Collin

Réunion du 8 octobre 2009 à 15h00
Engagement national pour l'environnement — Vote sur l'ensemble, amendement 528

Photo de Yvon CollinYvon Collin :

Madame la présidente, monsieur le ministre d’État, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le 23 juillet dernier, le groupe RDSE s’était prononcé à l’unanimité en faveur du projet de loi dit « Grenelle I », validant ainsi les objectifs et orientations arrêtés par les différents groupes de travail dans une véritable loi de programmation, qui a permis au Parlement de contribuer à l’élaboration d’un nouveau droit de l’environnement.

Lors de la discussion générale sur le présent projet de loi portant engagement national pour l’environnement, mes collègues Raymond Vall et Robert Tropeano ont expliqué que les mesures débattues seraient un test pour le passage à une société plus « verte » et que notre groupe réserverait son vote en fonction de la discussion des amendements.

Nous voici donc aujourd’hui au terme du débat, qui a duré plus de trois semaines, qui a été riche et toujours de qualité, comme c’est souvent le cas dans cet hémicycle.

L’ensemble des secteurs ou presque ont été abordés. Je pense notamment au bâtiment, aux transports, à l’agriculture, aux déchets, à la biodiversité...

Notre assemblée s’est prononcée en faveur de mesures innovantes. Je mentionnerai à cet égard l’obligation de réaliser un bilan des émissions de gaz à effet de serre pour environ 2 500 entreprises et pour les collectivités les plus importantes, l’obligation de présenter des informations contenues dans le rapport social et environnemental devant être remis aux actionnaires, tel qu’il est prévu par la loi du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques ou encore l’interdiction des téléphones portables dans les écoles.

Comme les membres de mon groupe, je regrette toutefois que le Grenelle II demeure, à l’issue de son examen par la Haute Assemblée, une boîte à outils dont certains sont inutilisables. Le risque est bien réel d’aboutir à une sur-réglementation complexe et inapplicable, à tel point que plusieurs de nos collègues ont sollicité hier – et je me joins à eux – « une feuille de route des décrets ».

Les messages qui découlent des dispositions adoptées par notre assemblée ne sont pas suffisamment clairs. Par exemple, certaines des mesures que nous venons de voter introduisent la certification « haute valeur environnementale » pour les agriculteurs qui consacrent plus de 10 % de leur surface d’exploitation à la nature, ce dispositif venant s’ajouter à celui de la filière biologique. Pourquoi multiplier les dispositifs et ne pas améliorer ceux qui existent déjà ? Cette certification va être source de confusion pour le consommateur, attentif surtout aux prix des produits. Mes chers collègues, en pleine crise agricole, instaurer un nouveau label et une nouvelle certification n’est peut-être pas la meilleure des initiatives !

En matière d’assainissement non collectif, 70 % des installations ne sont pas conformes et la majorité d’entre elles s’écoulent dans les cours d’eau. Les travaux coûtent plusieurs dizaines de milliers d’euros à des particuliers qui ont parfois peu de moyens. Dans ce domaine, nous aurons les plus grandes difficultés à atteindre l’objectif de mise en conformité.

L’adoption de l’amendement n° 528 rectifié bis de notre collègue Jacques Mézard permet à l’acquéreur de disposer d’un délai d’un an, après la signature de l’acte de vente, pour effectuer les travaux d’assainissement. Toutefois, il faut faire plus : une politique incitative est nécessaire pour faciliter les travaux, sans exclure les pouvoirs de contrôle de l’administration. En outre, le diagnostic en matière de travaux d’assainissement sera à la charge du vendeur, en tenant compte de la « valeur écologique » du bien.

S’agissant des énergies renouvelables, il est illusoire de penser que l’on pourra favoriser l’essor de l’éolien en imposant toujours plus de contraintes à la création de parcs éoliens. Or, à l’issue de nos débats, et je le déplore, les éoliennes terrestres rejoindront en 2011 le régime des installations classées pour la protection de l’environnement, les ICPE, ce qui tend à complexifier les procédures d’autorisation. Était-il nécessaire de renforcer cette réglementation alors même que les projets patinent, s’engluent sous la pression des oppositions, sous la contrainte paysagère et patrimoniale ?

Dans le domaine des transports, nous nous félicitons que la Haute Assemblée ait reconnu l’efficacité technique et le bien-fondé des directives européennes en matière de péages autoroutiers, en dépit de leur transposition tardive en droit français. La modulation des péages en fonction des émissions de gaz à effet de serre est une mesure « verte » de bon sens. Initialement prévue pour les camions, cette disposition a été étendue aux véhicules particuliers.

On peut cependant regretter l’absence d’une véritable politique de report modal de la route vers d’autres modes de transport, au moment même où l’on décide par ailleurs la construction de nouveaux grands axes routiers.

J’évoquerai rapidement la question des péages urbains. Sous couvert d’expérimentation, le Gouvernement introduit une nouvelle taxation. Ici, la boîte à outils du Grenelle II se transforme en « boîte à taxes ». De plus, la charge de l’évaluation de cette mesure est imposée aux collectivités !

S’agissant de la contribution climat-énergie, cette taxe s’appliquera sur les charges de fonctionnement des collectivités et, avec la suppression de la taxe professionnelle, je crains que la note ne soit salée… Les collectivités ne doivent pas, une fois de plus, être les seules pénalisées, alors que les particuliers disposeront d’un crédit d’impôt et que les entreprises bénéficieront de la suppression de la taxe professionnelle.

Du toilettage du code de l’urbanisme aux transports, en passant par l’extension des plans Climat territoriaux, la préservation de la ressource en eau, la lutte contre les multiples pollutions ou la réforme des enquêtes publiques, ce projet de loi portant engagement national pour l’environnement prévoit des mesures certes ambitieuses, mais trop souvent complexes, et parfois éloignées du bon sens comme des réalités locales.

Pour toutes ces raisons, après avoir adopté à l’unanimité le Grenelle I, le groupe du RDSE, à une exception près, s’abstiendra sur le Grenelle II.

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