Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous sommes réunis pour examiner les conclusions de la commission mixte paritaire qui s’est réunie le 15 septembre dernier afin d’élaborer un texte commun sur la proposition de loi relative au deuxième dividende numérique et à la poursuite de la modernisation de la télévision numérique terrestre.
Si la commission mixte paritaire est parvenue à un accord, à l’unanimité, sur un texte aussi important pour l’avenir de l’audiovisuel et du numérique, c’est parce que tant les sénateurs que les députés et le Gouvernement ont fait preuve de responsabilité, afin de permettre la réussite d’une évolution technologique majeure qui nous engage tous pour les années à venir.
Lors de la première lecture, au mois de juillet dernier, le Sénat avait joué son rôle, en fournissant un travail approfondi pour améliorer le cadre législatif nécessaire aux grands chantiers qui vont impacter durablement le secteur de l’audiovisuel, mais aussi celui des télécommunications.
Il a exprimé des réserves, non sur l’objectif de ce texte – la modernisation de la télévision numérique terrestre, ou TNT, l’accompagnement du passage à la HD ainsi que le développement du très haut débit dans la téléphonie mobile –, mais sur les modalités de mise en œuvre du transfert aux opérateurs mobiles de la bande de fréquences comprises entre 694 et 790 mégahertz.
Alors que ce transfert doit intervenir dans six mois tout juste en Île-de-France, quand la nouvelle norme de compression du signal dite MPEG–4 sera généralisée, nous avions, en juillet, fait part de nos craintes concernant le calendrier retenu et la nécessaire prise en compte du préjudice subi par les opérateurs.
Le débat de juillet a toutefois permis de progresser sur deux questions essentielles pour le Sénat, car elles sont relatives aux territoires auxquels nous sommes attachés.
D’une part, les obligations de couverture minimale à 95 % de la population ont été pérennisées pour la TNT, ce qui nous semblait indispensable de réaffirmer.
D’autre part, la situation des foyers recevant la TNT par satellite a été prise en compte, puisque le Gouvernement remettra un rapport concernant leur éligibilité à l’aide à l’équipement des foyers dégrevés de contribution à l’audiovisuel public.
Une autre avancée a été obtenue avec l’article 6 bis, qui doit permettre de lutter contre la spéculation lors de la revente des chaînes de la TNT. La modification adoptée à l’article 42–3 de la loi du 30 septembre 1986 doit permettre au CSA de tenir compte du respect des obligations conventionnelles de programmation par l’éditeur de services durant les deux années précédentes lorsqu’il examine la demande d’agrément à la suite d’une modification du contrôle direct ou indirect de la société titulaire de l’autorisation.
Ces apports du Sénat en première lecture ont été conservés par la commission mixte paritaire et même renforcés par les dispositions ajoutées à l’article 6 bis qui reprennent l’article 264 de la loi Macron, introduit sur l’initiative de notre assemblée et qui prévoit le quadruplement de la taxe sur la vente des chaînes de la TNT.
Au-delà de ces avancées indispensables, le Sénat estimait que deux garanties étaient nécessaires pour permettre l’adoption de la proposition de loi.
La première devait répondre à notre souhait de voir les parlementaires associés au suivi du calendrier de la mise en œuvre du MPEG–4.
En acceptant de réunir la commission de modernisation de la diffusion audiovisuelle le 4 novembre prochain, Mme la ministre de la culture, et il faut l’en remercier, a répondu à notre exigence de transparence à l’égard de la représentation nationale. Réunie une nouvelle fois, la commission pourra ainsi mesurer l’état d’avancement des opérations, notamment la mise en œuvre du calendrier.
La seconde garantie touchait à la prise en compte du préjudice des opérateurs techniques de diffusion. Le Gouvernement a communiqué à votre rapporteur les conclusions du rapport de l’Inspection générale des finances, qui formule, comme nous le supposions, des recommandations incontournables.
L’intérêt général commande que l’État prenne en compte la situation de ces acteurs afin de préserver le caractère concurrentiel du marché de la diffusion. Cette exigence passe par la recherche d’une solution transactionnelle entre l’État et les entreprises concernées. Mme la ministre de la culture nous a assuré que telle était la volonté du Gouvernement et que les crédits nécessaires seraient engagés dans un texte financier d’ici à la fin de l’année.
Nous serions pleinement rassurés, madame la secrétaire d’État, si vous confirmiez aujourd’hui devant nous cet engagement et ce calendrier, car des craintes subsistent.
Quelle est en effet la situation ? Comme je l’ai dit, le temps est compté d’ici à la généralisation du MPEG–4, le 5 avril 2016, et de nombreuses étapes restent à franchir : une campagne d’information doit être lancée, les Français devront s’équiper d’adaptateurs, les multiplex devront être réorganisés.
Toutes ces actions devront être conduites en impliquant les différents acteurs. Or les opérateurs de diffusion conservent des inquiétudes quant à l’issue des échanges menés avec l’État au sujet du processus d’indemnisation.
Je souhaite donc vous alerter, madame la secrétaire d’État, sur les difficultés qui entourent les discussions entre les services du ministère des finances et les opérateurs de diffusion. Alors que le Gouvernement nous avait fait part de son souhait d’aller vite, les entreprises concernées n’ont vraisemblablement toujours pas reçu de propositions chiffrées de la part de l’État.
Ce n’est qu’aujourd’hui, alors que nous examinons ce texte, qu’ont lieu les premières réunions en vue de parvenir à un règlement. Nous aurions pourtant souhaité nous prononcer en pleine connaissance de cause quant à l’issue des négociations avec les opérateurs.
Je forme le vœu, madame la secrétaire d’État, que les membres de la commission de modernisation de la diffusion audiovisuelle, lorsqu’ils se réuniront le 4 novembre prochain, soient pleinement rassurés quant à l’aboutissement de ce processus, qui, vous le savez, est l’une des conditions du succès de l’opération.
En conclusion, mes chers collègues, le texte que votre commission vous propose d’adopter est le fruit d’un travail important, qui a permis des améliorations sensibles sur de nombreux points.
Grâce au Sénat, il permet de prévoir un dispositif complet répondant le mieux possible aux enjeux. Il conforte notre volonté de mener le débat jusqu’à son terme, en laissant vivre les étapes du bicamérisme, lequel permet à chaque assemblée de jouer son rôle dans le seul but de parfaire notre législation.
J’ai, à ce stade ultime, une pensée pour mon collègue et homologue de l’Assemblée nationale, Patrick Bloche, que je remercie. Nous avons beaucoup échangé, et nous partageons le souci permanent de parvenir à un cadre législatif permettant de mener à bien ce chantier très important du deuxième dividende numérique.