Voilà un débat d'actualité. Merci aux rapporteurs pour leur travail. Les propositions qu'ils formulent, toutefois, sont de nature politique et dépassent le cadre de la mission de contrôle financier qui leur était confiée. En préconisant une fusion, sur le modèle de la BBC, ils souhaitent transformer complètement le paysage audiovisuel français. Je laisserai de côté cet aspect de leur présentation, qui me semble insuffisamment étayé, pour me concentrer sur les résultats de leur contrôle financier.
Ils nous présentent la grande difficulté financière de l'audiovisuel public sans la dater. Or, notre dernier débat animé sur le sujet remonte à la loi qui a supprimé la publicité après vingt heures. Y avait-il alors un problème financier ? Au contraire ! Après des difficultés au début des années 2000, la situation s'était stabilisée autour de deux sources de financement, la publicité et la redevance, qui assuraient l'indépendance vis-à-vis du monde commercial comme de l'État. La situation était saine. La suppression de la publicité a ôté plusieurs centaines de millions d'euros à France Télévisions, suscitant une violente déstabilisation. Jean-François Copé avait alors déclaré que, « lui vivant », la redevance n'augmenterait pas d'un euro. L'État devait remplacer les ressources publicitaires par des taxes sur la publicité, qui allait fuir vers les chaînes privées. Celles-ci ont protesté, en partie à juste titre, car si elles ont bénéficié de cette manne, une partie des recettes a migré vers Internet. Bref, l'on n'a pas trouvé l'argent. Une taxe sur les télécoms fut créée, qui a été contestée à Bruxelles avant d'être pérennisée car déclarée conforme au droit communautaire. Mais l'État pouvait toujours décider de ne pas reverser cet argent à France Télévisions. Sans la publicité, le seul canal direct de financement demeure la CAP. Ne pas l'augmenter, tout en supprimant la publicité, a créé un chaos dont nous gérons encore les conséquences.
Je soutiens votre proposition d'augmenter la CAP de deux euros en plus de l'inflation. Il ne s'agit que de quelques centimes par mois, et cette hausse est indolore, comme l'a montré l'absence de protestation lors des dernières hausses. Les cinquante millions d'euros supplémentaires de produit règleront en partie les problèmes de déficit structurel.
Le service public devrait pouvoir diffuser du sport, notamment lorsque l'équipe de France joue. Or France Télévisions ne peut plus acheter un seul match après vingt heures. Pourtant, les publicités sont visibles sur les terrains : on accepte donc que les sponsors gagnent de l'argent, mais pas la chaîne qui diffuse le match ! Douze matches de l'Euro ont échappé à l'audiovisuel public, ce qui est un scandale ! L'Euro se joue en France, et le sport gratuit ne se trouve que sur France Télévisions. Nous pourrions autoriser la publicité pendant les mi-temps, ce qui règlerait ce problème.
Bref, l'origine des difficultés actuelles est la réforme de 2009. Or, en face du secteur privé contrôlé par les Bouygues et autres Bolloré, il faut un pôle public stable.