Intervention de Laurence Cohen

Réunion du 6 octobre 2015 à 15h15
Modernisation de notre système de santé — Explications de vote sur l'ensemble

Photo de Laurence CohenLaurence Cohen :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, durant deux semaines, nous avons examiné un projet de loi ayant pour ambition de moderniser notre système de santé.

Nous avions un défi considérable à relever compte tenu de la situation de la santé publique, notamment en termes d’offre de soins au regard des besoins de santé sur l’ensemble du territoire.

Or la logique qui nous a été imposée dès le départ a été le redéploiement et l’aménagement de l’offre de soins dans une enveloppe contrainte. En effet, le postulat qui fait consensus dans cet hémicycle, à l’exception de notre groupe, est qu’il faut restreindre les dépenses en matière de santé publique.

L’une des pistes privilégiées pour y parvenir est l’instauration des groupements hospitaliers de territoire ou GHT, de même que le développement de l’ambulatoire, qui serait moderne et efficace face à l’immobilisme de l’hospitalisation classique, sans compter l’encadrement de la médecine de ville par les agences régionales de santé, les ARS. Mais c’est un leurre de dire que les groupements hospitaliers de territoire sont destinés à éviter la disparition des établissements au profit de leurs regroupements.

C’est faire fi du lien de proximité indispensable à une médecine humaine. Je rappelle qu’il s’agit, après déjà de nombreuses fermetures, de passer de 1 300 hôpitaux sur l’ensemble de notre territoire à environ 150 GHT !

Pour la psychiatrie, qui a été la première discipline à s’ouvrir au travail en réseau et aux collaborations interdisciplinaires, c’est la mort annoncée de la politique de secteur et la poursuite d’une vision sécuritaire de cette discipline, autant de raisons qui nous ont conduits à voter contre l’article 13 du projet de loi.

Pourquoi vouloir en réalité rendre obligatoires ces GHT, qui plus est à marche forcée ? En effet, les directeurs des ARS les mettent déjà en place, sans même attendre le vote de la loi !

N’est-ce pas essentiellement par souci de restreindre les budgets, puisque cette réforme se traduirait par environ 400 millions d’euros de dépenses en moins sur trois ans ?

Comment imaginer, dans ces conditions, répondre aux besoins de la population et aux souffrances des personnels de santé ?

Par ailleurs, vouloir opposer l’ambulatoire à l’hospitalisation sous prétexte de réduire les inégalités d’accès aux soins est, là encore, bien illusoire. Cela revient à demander plus aux familles en termes d’assistance, de relais… Or, vous le savez pertinemment, tous les patients ne peuvent s’appuyer sur des parents vivants, disponibles, capables financièrement et moralement de s’occuper d’eux.

Cela revient également à privatiser une partie de l’activité hospitalière tout en multipliant des soins infirmiers et de kinésithérapie, ce que dénonce la Cour des comptes.

Quant aux déserts médicaux, pensez-vous régler le problème en permettant aux médecins hospitaliers d’exercer jusqu’à soixante-douze ans ?

Toutes ces mesures s’inscrivent, de surcroît, dans un déni de démocratie puisque vous refusez l’instauration de contre-pouvoirs à ceux des directeurs d’ARS qui deviennent hégémoniques !

Les quelques mesures positives – ouverture de salles de consommation à moindre risque, suppression du délai de réflexion pour l’IVG, reconnaissance des centres de santé dans le parcours de soins, effort de transparence quant aux liens d’intérêt… – sont loin de suffire pour changer la donne, à savoir transformer cette loi en une loi-cadre de santé publique. D’autant que la majorité de droite a refusé un certain nombre de propositions qui allaient dans le bon sens et que nous avons soutenues.

Je pense, bien évidemment, au tiers payant généralisé en 2017, qui est une aide utile à l’accès aux soins, même si, dans les conditions d’aujourd’hui, c’est aussi une incitation à la généralisation des complémentaires, donc des assurances.

Je pense, également, à l’inscription, dans chaque région, d’un plan d’action pour l’accès à l’interruption volontaire de grossesse, élaboré par les ARS.

À ce propos, je voudrais dénoncer la manœuvre de la majorité de droite, qui a consisté à refuser de voter les mesures en faveur de l’avortement sous le prétexte qu’elles relevaient de la bioéthique ! §Je laisse nos concitoyennes et concitoyens en juger.

(Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.) Nous ne mêlons donc pas nos voix aux leurs, eux qui défendent la loi « HPST » ou « Bachelot », et qui soutiennent toujours davantage de restrictions budgétaires.

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