Cependant, je tiens à vous le dire : je parviens à de tels accords en négociant !
Si le Gouvernement a négocié un tel accord, c’est parce que, à la demande de la Fédération nationale des producteurs de lait, la FNPL, il visait de manière spécifique tous les produits sous marque de distributeur, ou MDD, notamment les crèmes fraîches, les yaourts nature et le lait de consommation. Il s’agissait aussi de déterminer si les industriels possédant de grandes marques – je ne les citerai pas – devaient relever leurs prix, une mesure qui, par définition, n’allait vraiment pas de soi pour eux.
Monsieur Gremillet, j’ai étudié les chiffres depuis le début de l’année : certaines grandes entreprises et grandes laiteries ont réalisé des bénéfices ! En réalité, ceux qui n’en font pas, aujourd’hui, ce sont les producteurs.
Certes, notre discussion n’a porté que sur 30 % de la collecte. Néanmoins, contrairement à ce que vous affirmez, c’est parce que nous le souhaitions ! Je vous renvoie aux discussions qui ont eu lieu avec les professionnels du secteur. Pour ma part, je n’invente pas ces stratégies, je les construis et les négocie.
Lorsque nous avons abordé l’autre partie de la discussion, en particulier la question de ce qui est collecté et porte sur des marques, il y a bien eu négociation. C’est à cette occasion que, le 1er octobre dernier, j’ai indiqué aux industriels qu’ils devaient faire un effort en direction des producteurs, car on ne peut pas tout demander à la grande distribution.
Si l’on veut surmonter la crise actuelle, il faut que tout le monde s’y mette. C’est vrai, par exemple, pour l’application des allégements de charge, notamment pendant l’année blanche, puisque les banques doivent faire un effort à ce titre. En effet, c’est la capacité des banques à pérenniser les activités des éleveurs et à assurer le futur remboursement d’un certain nombre de prêts qu’elles ont pu consentir qui est en jeu. Chacun doit donc faire des efforts ! Sur la question laitière, les négociations ont donc bien eu lieu avec les professionnels.
Monsieur Gremillet, vous avez également évoqué les organisations de producteurs, les OP, et la logique contractuelle que la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche, la LMAP, a mis en place.
Il est vrai que, aux termes de la LMAP, la sortie des quotas devait aboutir à un système de contractualisation. Toutefois, lors des débats sur la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt – c’est ce texte qui a soutenu et conforté les organisations de producteurs –, il a bien été question de contrats, mais pas au niveau des OP.
Dans cette loi d’avenir, que certains d’entre vous – pas tous – ont voté, figurait la possibilité pour les organisations de producteurs de saisir un tribunal si les prix ou les modalités de la collecte n’étaient pas respectés. Mesdames, messieurs les sénateurs, soyez conscients que cette disposition a des incidences : auparavant, rien de tout cela n’existait ! Je salue donc tous ceux qui ont voté en faveur de cette loi.
Nous avons renforcé le rôle des OP, et ce n’est pas fini. Vous avez raison de dire qu’il va falloir franchir une étape en matière de contractualisation laitière, monsieur le sénateur. On le fera parce qu’on aura proposé de nouvelles formes de contractualisation pour les filières porcine et bovine.
Vous me dites également de faire attention à la grande distribution, que j’ai en effet souhaité faire entrer dans la négociation menée dans le cadre de contrats tripartites. J’en profite pour le dire au passage : c’est la loi de modernisation de l’économie, la LME, que vous avez votée, qui le permet ! C’est une loi sur laquelle on pourrait revenir, et j’attends d’ailleurs vos propositions, monsieur le président du Sénat, sur ce sujet.
Cette loi permet d’intégrer les critères de rémunération du producteur dans une négociation entre un grand distributeur et un industriel. Aussi, pourquoi s’en priver ? Serait-ce une bonne chose ? Non, trois fois non !
Par ailleurs, oui, j’ai bien demandé que l’on intègre la grande distribution dans l’interprofession laitière. Parce que les deux négociations distinctes, entre les industriels et les producteurs d’une part, entre les industriels et la grande distribution d’autre part, avec des producteurs qui ne sont jamais au courant du contenu réel de la seconde négociation, cela ne peut plus durer !
Si l’on veut stabiliser notre marché, si l’on veut, en particulier, se donner les moyens de favoriser l’origine française des productions, évoquée tout à l’heure par le sénateur non inscrit, cela passe par des accords de valorisation de cette production.
Le label « Viande de France », je n’ai pas attendu des propos de tribune pour le mettre en œuvre ! Pour la première fois, depuis février 2014, nous avons mis en place, de manière volontaire, une traçabilité sur l’origine de la viande et même dans les produits transformés.
Aujourd’hui, en Bretagne, certains me demandent de prendre un décret pour rendre ce label obligatoire, les mêmes d’ailleurs qui, coopératives ou industriels, ne l’appliquent toujours pas de manière volontaire. C’est toujours facile de venir voir le ministre ! Mais encore faut-il que chacun assume sa part de responsabilité !
Vous prétendez, monsieur, qu’il n’y a plus besoin d’Europe, plus besoin de PAC !