Intervention de Éliane Assassi

Réunion du 6 octobre 2015 à 21h45
Droit des étrangers en france — Question préalable

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe communiste républicain et citoyen a souhaité déposer cette motion tendant à opposer la question préalable afin que soit rejeté l’ensemble de ce projet de loi relatif au droit des étrangers, revu par la majorité de droite de la commission des lois et désormais intitulé : « projet de loi portant diverses dispositions relatives à la maîtrise de l’immigration ».

Il suffit d’écouter M. le rapporteur pour comprendre que cette nouvelle mouture aggrave la précarité de la situation des personnes en situation régulière et réoriente les dispositions sur la maîtrise de l’immigration irrégulière en renforçant les dispositifs de contrôle et en facilitant l’éloignement. Vous comprendrez bien que nous ne pouvons l’accepter.

Monsieur le ministre, dans la continuité des réformes passées sur le sujet, votre projet de loi maintien l’inversion de la logique de l’intégration, logique selon laquelle les personnes étrangères ont besoin de droits pour s’intégrer, et non de s’intégrer pour mériter des droits. L’immigration autorisée est ainsi maintenue dans une situation administrative précaire qui empêche celles et ceux qu’elle concerne de trouver leur place en France.

Après le projet de loi relatif au droit d’asile, débattu ici il y a quelques semaines, le texte qui nous occupe aujourd’hui permet un renforcement des contrôles et donc un affaiblissement des possibilités de recours, sous couvert de la multiplication supposée des demandes « abusives ».

Pourtant, le nombre de décisions de protection reste stable. En 2007, sur 35 500 demandeurs d’asile, 8 800 l’ont obtenu, 26 700 ont donc été déboutés. En 2013, sur 65 900 demandeurs, 11 400 seulement ont obtenu le titre de réfugié, contre 54 500 déboutés. Comment peut-on donc sérieusement penser que le nombre de demandes abusives a doublé d’une période à l’autre ?

Le droit d’asile, comme le droit des étrangers, ne se résume pas à des flux et des stocks d’étrangers à gérer. La crise des réfugiés actuelle en témoigne bien : il s’agit avant tout d’une question de géopolitique et de responsabilité internationale.

Les conflits internationaux et l’ordre économique établi font de notre monde un monde de réfugiés. On dénombrerait déjà 163 millions de personnes ayant dû quitter leur foyer à la suite de conflits, de catastrophes naturelles ou de grands projets de développement. Entre 2000 et 2050, ce sont au moins un milliard de personnes qui devraient migrer dans le monde, dont plus de la moitié pour s’adapter au réchauffement climatique ou en fuir les conséquences : inondations, sécheresses, pénuries d’eau et d’aliments, maladies émergentes.

Qu’allons-nous faire de ces personnes ? Les laisser à la dérive d’un monde dérégulé ? Les renvoyer chez eux, même en cas de guerre, comme le stipule agressivement Mme Le Pen ?

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