Intervention de Thierry Mandon

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 14 octobre 2015 à 16h30
Rentrée universitaire — Audition de M. Thierry Mandon secrétaire d'état chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche

Thierry Mandon, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche :

secrétaire d'État auprès de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche. - Je suis heureux d'échanger avec vous sur cette rentrée universitaire et plus généralement sur l'enseignement supérieur. L'avenir de notre pays se dessine dans les amphithéâtres, les laboratoires et leurs publications, mais aussi à travers les MOOC (massive open online course, cours en ligne ouverts et massifs) et les formations professionnelles dispensées aux salariés. Je ne crois pas que la rentrée 2015-2016 se distingue particulièrement des précédentes. En revanche, notre système traverse depuis quelques années une période charnière, avec des effectifs supérieurs à 2,5 millions d'étudiants, ce qui est considérable, d'autant que le nombre d'étudiants progresse surtout dans quatre filières : + 18 % en sciences et techniques des activités physiques et sportives (Staps), + 11 % en droit, + 10 % environ en psychologie ainsi qu'en première année de médecine. Cette rentrée est également la première depuis la loi Fioraso, en 2013, qui a réformé les structures de l'enseignement supérieur avec la mise en place des Communautés d'universités et établissements (Comue), regroupements stratégiques de compétences autour de 25 centres. Il faut replacer ces évolutions dans une tendance globale au développement de la connaissance dans la société, avec un bagage de formation initiale toujours plus important et un besoin de se former tout au long de la vie pour faire face aux incertitudes à moyen terme. Ces tensions pèseront immanquablement sur l'organisation de notre système d'enseignement supérieur.

Le premier défi sera celui de la qualité. Notre enseignement supérieur figure selon l'OCDE parmi les plus efficaces du monde : 80 % de ceux qui s'y engagent accèdent à un diplôme, soit dix points de mieux que la moyenne de l'OCDE. Pour améliorer encore notre système, nous devrons nous adapter à la diversité des publics et relever le défi d'une démocratisation exigeante. Cela suppose la mise en place d'un suivi mieux personnalisé grâce à des méthodes pédagogiques innovantes. Cela implique également un meilleur usage des potentialités considérables du numérique, une réflexion sur l'immobilier universitaire et son organisation dans les années à venir, et enfin la reconnaissance et la valorisation des enseignants-chercheurs dans leur fonction d'enseignement, car c'est sur eux que reposent l'accueil et la qualification des étudiants. Un autre défi consistera à donner à l'université la place centrale qui lui revient dans une société apprenante, destinée à s'organiser progressivement autour de l'acquisition des savoirs et des compétences. C'est tout le sens de l'objectif fixé par la StraNES de 60 % d'une classe d'âge accédant à l'enseignement supérieur, engagement repris par le Président de la République.

Pour préparer cette nouvelle phase de notre enseignement supérieur, le gouvernement en a fait une priorité budgétaire. Il a anticipé le besoin d'accompagnement social renforcé des futurs étudiants, en mobilisant plus d'un demi-milliard d'euros supplémentaires pour les bourses sur critères sociaux, dont 132 500 étudiants issus des classes moyennes ont pu bénéficier à cette rentrée. Il confortera cette politique par des mesures destinées à préserver le pouvoir d'achat des étudiants, notamment la non-augmentation des droits d'inscription. Conformément à la loi du 10 août 2014, la gratification des stages est passé de 3,30 à 3,60 euros l'heure, soit environ 45 euros supplémentaires par mois, dont bénéficieront plus de 350 000 étudiants en stage dans les universités françaises. Enfin, la nouvelle prime d'activité destinée aux travailleurs dont les emplois dont faiblement rémunérés sera accessibles aux étudiants dont les revenus dépassent 0,70 fois le Smic, soit 900 euros net mensuels au cours des trois derniers mois : 100 000 étudiants salariés sont concernés.

Cet effort sans précédent est complété par le plan de 40 000 nouveaux logements étudiants d'ici 2017, engagé dès 2012. Grâce à des innovations en matière de construction, à la mobilisation du foncier par les collectivités locales et à des maîtrises d'ouvrage tout à fait habiles, c'est plus de la moitié du plan qui sera d'ores et déjà livré et occupé dès la fin de 2015. Les conditions financières sont particulièrement intéressantes : à Avignon, une studette de 17 mètres carrés se loue moins de 100 euros par mois ; à Arras, le loyer net mensuel pour les étudiants boursiers est inférieur à 200 euros. Le plan a été concrétisé rapidement et change les conditions de scolarité des étudiants ; l'objectif de 40 000 logements en 2017 sera tenu. Quant au parc locatif privé, la généralisation de la caution locative étudiante (CLE) depuis 2014 permet à des étudiants dépourvus de garant personnel d'accéder à un logement. Près de 6 000 demandes de CLE ont été validées à cette rentrée, soit deux fois plus qu'en 2014.

Enfin, la concertation nationale autour du Plan national de vie étudiante, dont les conclusions ont été remises au ministre le 6 juillet dernier, doit contribuer à simplifier les démarches, à renforcer l'accès au droit et à dynamiser la vie de campus. Le calendrier de sa mise en oeuvre a été présenté il y a quelques jours par le Président de la République.

Pour résumer, le gouvernement souhaite la progression des effectifs, il s'y est préparé en renforçant le volet social.

Des efforts considérables ont été portés pour rendre plus lisibles les parcours des futurs étudiants. Dès la loi de 2013, le nombre des intitulés de formation de licences et de masters a été considérablement réduit pour améliorer l'orientation : on est passé de 5 000 intitulés de masters en 2013 à 251, de 1 800 intitulés de licences professionnelles à 175 et de 322 intitulés de licences à 45. Le parcours a gagné en lisibilité et en fluidité, d'autant que l'on a également prévu une nouvelle modalité d'accès en deuxième année pour les études de santé, expérimentée dans dix universités, ce qui favorise la diversification des publics.

Troisième élément, la réorganisation des structures de l'enseignement supérieur vise à en reconnaître la diversité, avec la coexistence d'universités, de grandes écoles et d'écoles spécialisées, et à en faire une force grâce à des stratégies territorialisées, comme les 25 Comue qui facilitent la mutualisation des moyens et des compétences sans renier l'identité propre à chacun.

Ces trois réformes engagées depuis 2012 devront être complétées. Nous devrons adapter notre modèle économique pour faire face au nombre accru d'étudiants. Des efforts financiers seront nécessaires de la part de l'État mais aussi des opérateurs, qui devront développer leur capacité à trouver des ressources propres. Le développement de la formation professionnelle continue à l'université est une piste à creuser pour consolider le modèle économique des universités et diversifier leurs sources de financement.

L'orientation est un enjeu majeur si l'on veut répondre à l'objectif de 60 % de diplômés de l'enseignement supérieur. Le travail doit commencer dès le lycée, d'où notre collaboration étroite avec le ministère de l'Éducation nationale. Des mesures précises seront mises en oeuvre rapidement pour renforcer la qualité de l'orientation des élèves et donc celle du parcours des étudiants dans l'enseignement supérieur.

Enfin, nous veillerons à simplifier et à améliorer la vie quotidienne de la communauté éducative, trop souvent aux prises avec des procédures complexes. Elle doit être redynamisée par des expérimentations plus nombreuses et incitée à prendre des initiatives.

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