Intervention de Thierry Mandon

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 14 octobre 2015 à 16h30
Rentrée universitaire — Audition de M. Thierry Mandon secrétaire d'état chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche

Thierry Mandon, secrétaire d'État :

Merci de ces questions, qui montrent votre appétit de discussion. Ces débats doivent être sur la scène publique, en effet.

On a compté lors de cette rentrée une quarantaine de milliers d'étudiants supplémentaires, hors doubles comptes, c'est-à-dire en neutralisant ceux qui sont inscrits en classes préparatoires. C'est le chiffre le plus important depuis 2012. Je vous confirme que les 100 millions d'euros sont un supplément par rapport au PLF de l'an dernier. La progression budgétaire pour le programme 150 s'établit à + 165 millions d'euros. C'est un chiffre sans précédent depuis le début du quinquennat, qui marque une inflexion budgétaire importante et détermine la période nouvelle dans laquelle entre notre système d'enseignement supérieur. Les questions budgétaires doivent être appréhendées dans leur globalité : projet de loi de finances, mais aussi investissements d'avenir, plan Campus, financements européens, financements de l'Agence nationale de la recherche, etc. Au-delà de l'inflexion budgétaire, le Président de la République a annoncé, il y a trois semaines, qu'un nouveau programme d'investissements d'avenir serait voté durant l'année 2016, avec une enveloppe de 10 milliards d'euros qui nourrira entre autres le budget de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Quant aux conclusions de la StraNES, je considère qu'il s'agit d'un document d'orientation qui fixe un cap. À nous de faire des propositions pour tracer le chemin qui y mène. L'appareil statistique dont nous disposons n'est pas satisfaisant. Nous devrions nous doter d'outils nouveaux pensés à partir de l'autonomie des acteurs et plus proches de la conjoncture. C'est pour moi une priorité.

Prévoir 160 millions d'euros suffit-il à réussir la rentrée 2016 ? C'est satisfaisant sur le plan budgétaire, mais l'argent ne suffit pas : il faut un programme spécifique de préparation à la rentrée avec plus de moyens mais aussi un programme sur l'orientation, avec une réflexion sur la procédure Admission Post Bac, un travail plus fin sur l'articulation entre BTS et Bac pro... Nous travaillons déjà sur toutes ces mesures qui seront débattues lors de l'examen du budget et feront l'objet de décisions avant la fin de l'année 2016.

La reconnaissance du doctorat comprend tant la formation doctorale que l'insertion professionnelle. Le texte sur la formation doctorale est actuellement soumis à la concertation. Il va être retravaillé et aura un caractère définitif à la fin de l'année. Il devra être complété par un effort sur l'insertion professionnelle des docteurs. C'est une urgence nationale : il faut que les doctorants trouvent plus de débouchés professionnels. Dans le public, nous envisageons de créer un concours externe spécial réservé aux docteurs au sein de l'agrégation, auquel seraient réservées environ 15% des places. Les ministères devront également jouer un rôle moteur dans le recrutement des docteurs. Dans le privé, nous allons lancer un travail systématique et sans précédent avec les entreprises et constituer une équipe d'ambassadeurs, des chefs d'entreprises ayant déjà recruté des docteurs qui iront démarcher, avec les partenaires sociaux, leurs homologues. Ce n'est pas du romantisme : nous élaborons déjà des objectifs chiffrés.

Un groupe de travail finalise la position du ministère sur les masters. Les ajustements sont à la marge, ils concernent 150 000 masters 1 et 140 000 masters 2. Le master est un bloc dans l'esprit de la réforme LMD. C'est un moment du parcours étudiant qui doit être travaillé en matière d'orientation et d'outils.

Vous chiffrez l'effort à 1 milliard d'euros. Je n'en sais rien, mais il est sûr que les moyens devront augmenter. Depuis 2012, les programmes budgétaires 150 et 230 ont augmenté de 750 millions d'euros - on est loin de l'austérité généralisée ! On peut imaginer une augmentation du budget et surtout des ressources propres des universités. La solution ne passe pas, en tout cas, par le doublement ou le triplement des droits d'inscription, comme le préconisent certains. La France n'est pas une exception en la matière. En Allemagne, les droits d'inscription sont nuls ; idem dans les pays nordiques, où les étudiants se voient en sus attribuer une bourse, sorte de revenu minimum étudiant. Le modèle continental de l'université est plein d'avenir ! Aux États-Unis, certains candidats démocrates reconnaissent que l'envolée des droits d'inscription que les étudiants ne peuvent pas rembourser a été une erreur ; le président Obama a lui-même plaidé devant le Congrès pour la gratuité. L'augmentation des droits d'inscription est une fausse piste.

D'ici l'examen du budget, j'aurai des précisions sur toutes les mesures évoquées du plan national de vie étudiante. Certains guichets uniques sont déjà en place ; j'en ai visité un remarquable à la Cité internationale. Leur mise en oeuvre sera renforcée lorsque la loi relative aux droits des étrangers sera définitivement adoptée. L'alignement du droit de séjour des étudiants étrangers sur la durée de la scolarité renforcera l'attractivité de la France, qui est déjà une des destinations les plus courues pour la qualité de son université.

Jamais les bourses n'ont été payées aussi tôt que cette année : 160 000 bourses ont été versées le 2 septembre 2015, contre 3 000 l'année dernière à la même époque.

Il est temps de faire un diagnostic des structures de l'innovation créées depuis dix ans, comme l'Institut Carnot, les IRT, les sociétés d'accélération du transfert de technologies (Saat), les pôles de compétitivité... J'échange avec le ministre de l'économie sur les modalités de ce diagnostic et sur ses évolutions. Ces dispositifs ne rendent pas suffisamment justice à la recherche publique. Les entreprises françaises et étrangères développent des produits et augmentent leur compétitivité en utilisant les capacités technologiques et le savoir-faire des laboratoires publics, qu'il s'agisse de technologies ou de sciences humaines et sociales - la puissance de la recherche publique français se trouve dans l'hybridation des deux. Le retour sur investissement pour la recherche publique pourrait être amélioré.

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