Intervention de François Patriat

Réunion du 27 janvier 2009 à 22h00
Mise en œuvre du grenelle de l'environnement — Article 1er

Photo de François PatriatFrançois Patriat :

Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, avant de commencer la discussion sur l’article 1er, je voudrais dire en quoi notre action sur le bâti est importante dans ce processus et dire aussi quelle est la place des régions qui ont, pour certaines – c’est le cas de celle que je préside –, anticipé sur ce Grenelle dont nous débattons aujourd’hui.

Le développement durable, c’est une chance inespérée de redonner un sens au progrès. S’il est un secteur sur lequel nous pouvons agir collectivement, pour inverser le curseur, c’est bien celui du bâti et de la rénovation thermique.

Le bâti dans le monde représente 30 % de l’empreinte écologique, 50 % des matières premières, 46 % des consommations finales d’énergie et 26 % des gaz à effet de serre.

En France, le chantier de la rénovation thermique représente 31 millions de logements, un marché de 600 milliards d’euros et une perspective de création de 180 000 emplois non délocalisables en douze ans, soit 15 000 par an, un défi immense pour la profession.

En Bourgogne, le secteur du bâtiment représente plus de 100 millions de mètres carrés, la moitié de l’énergie finale consommée, plus de 20 % des émissions de gaz à effet de serre, 10 000 entreprises et 33 000 salariés.

Quand on sait que nos bâtiments consomment en moyenne 240 kilowattheures par mètre carré chaque année, agir sur le bâti en réduisant d’un facteur 4, voire 7, les consommations constitue une urgence écologique, un impératif social.

L’échelle régionale est la bonne échelle pour agir.

Les collectivités locales représentent 75 % de la dépense publique et elles ont un rôle majeur à jouer. De par l’ampleur de leur patrimoine, la pertinence de leur périmètre, de par leurs compétences – transports ferroviaires et intermodalité, formation professionnelle, développement économique, aménagement du territoire… –, les collectivités régionales ont un rôle encore plus important à jouer, celui d’impulsion, d’aiguillon, d’exemplarité, de laboratoire et de diffusion du changement, en prouvant que l’exemple peut devenir masse.

Oui, l’échelle régionale est la bonne échelle.

L’engagement responsable et précurseur du conseil régional de Bourgogne en la matière est une démarche écologique, citoyenne et responsable.

Sans attendre le projet de loi de programme sur le Grenelle de l’environnement, nous avons, il y a plus de deux ans, mis en place une politique de développement durable, avec des résultats tangibles qui ont permis d’élargir les champs du possible.

Comment ? Avec une volonté et avec des moyens.

Le budget qui y était consacré a été multiplié par cinq en cinq ans et toutes les énergies renouvelables s’y sont incorporées.

Surtout, un plan « énergie-climat », qui fut l’un des premiers, a été adopté en février 2007, avec trois priorités majeures : développer la sobriété énergétique, favoriser la mutation vers de nouvelles sources d’énergie et former, informer et sensibiliser nos concitoyens afin d’opérer les changements culturels nécessaires.

Ce plan mobilise, sur sept ans, des moyens financiers sans précédent : 140 millions d’euros de la région, auxquels s’ajoutent 20 millions d’euros de l’ADEME et 30 millions d’euros de l’Union européenne ! Nous aurions aimé que l’État nous accompagne dans cette démarche, il ne l’a pas fait.

Nous nous sommes voulu exemplaires en matière d’efficacité énergétique, d’abord en développant des bâtiments à basse consommation d’énergie qui, avec trois appels à projets successifs, ont formidablement fait avancer la démonstration que la réduction par plus de quatre des consommations dans le bâti est possible, sans entraîner de surcoûts inaccessibles.

Avant de connaître les résultats du troisième appel lancé en décembre, qui fait déjà l’objet d’une première vague de cinquante projets, notre politique a d’ores et déjà porté ses fruits et préparé l’avenir : avec une surface de 61 000 kilomètres carrés neufs et réhabilités totalisant à elle seule presque la moitié des bâtiments basse consommation de France, la Bourgogne a été pionnière.

Pour accélérer cette dynamique qui nécessite une mutation en profondeur de l’acte de construire, la collectivité régionale a organisé plusieurs sessions de formation destinées aux professionnels du bâtiment afin de les sensibiliser à la construction économe, compacte, saine – s’appuyant sur des filières locales telles que le bois, le chanvre, la laine de mouton, la brique avec Terreal –, voire productrice d’énergie. Plus des deux tiers des maîtres d’œuvre et architectes et tous les bailleurs sociaux de Bourgogne sont sensibilisés.

Enfin, troisième symbole de l’engagement régional, c’est le prêt à taux zéro que nous avons mis en place l’année dernière, avec l’objectif d’atténuer la précarité énergétique de nos concitoyens et de se concentrer sur les logements les plus énergivores où les gains d’économie sont les plus importants.

Ce prêt, qui a devancé l’éco-prêt à taux zéro du Grenelle, est un dispositif accessible et attractif. D’une durée de deux à sept ans pour un montant de travaux de 2 000 à 10 000 euros, il est cumulable avec le crédit d’impôt, centré sur les zones les plus déperditives – toiture, murs, plancher, fenêtres... – et original car il permet aux particuliers propriétaires d’effectuer eux-mêmes les travaux.

Monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, c’est par des initiatives décentralisées, des circuits réactifs, simplifiés que nous gagnerons la bataille d’un bâti économe et de pointe. C’est par une fiscalité écologique adaptée, reconnaissant la valeur de santé et d’environnement des filières comme des matériaux locaux, que nous pourrons établir un cercle vertueux.

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