Intervention de Alain Vidalies

Réunion du 14 octobre 2015 à 14h30
Organisation de la manutention dans les ports maritimes — Discussion en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche :

Madame la présidente, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, les ports constituent des maillons essentiels de notre chaîne de transports. On estime d’ailleurs qu’ils représentent quelque 40 000 emplois directs.

Vous le savez, les premières années d’existence des grands ports maritimes, ou GPM, procédant de la loi du 4 juillet 2008 portant réforme portuaire, ont permis d’assoir leur rôle d’ensemblier des activités de la place portuaire, garant de leur développement.

Les résultats sont encourageants, mais il nous faut encore poursuivre les efforts. Les trafics conteneurisés sont en hausse avec une croissance annuelle moyenne de 5, 3 % depuis 2012, soit plus que l’augmentation moyenne que connaissent les ports européens de la façade Manche–mer du Nord.

Le développement d’un système logistique compétitif et durable incluant la chaîne logistique de bout en bout doit permettre de renforcer l’attractivité des ports auprès des chargeurs et des armateurs.

C’est le travail que nous avons effectué avec le nouveau cycle qui s’ouvre : les instances de gouvernance des ports ont été renouvelées et de nouveaux projets stratégiques ont été définis dans chaque grand port maritime, afin de fixer le cap pour plusieurs années, au plus près des enjeux propres à chaque territoire.

Une dynamique s’est également enclenchée, dans le droit fil des recommandations du rapport établi en 2014 par Mme Herviaux, que je salue, dynamique tendant à renforcer la coopération portuaire avec les ports décentralisés et les ports intérieurs, qui sont des maillons complémentaires de la chaîne logistique.

Des efforts sans précédent sont prévus pour accompagner financièrement ces différentes initiatives. Ainsi, au titre des contrats de plan État-région, ou CPER, pour la période 2015-2020, les ports représentent un volume d’investissements de 1, 6 milliard d’euros, contre 1, 1 milliard d’euros pour le CPER 2007-2013.

En outre, à l’échelon européen, la France a déposé vingt-trois projets portuaires et fluviaux dans le cadre du mécanisme pour l’interconnexion de l’Europe. Sur ce front également, les résultats sont très encourageants : pas moins de 53 millions d’euros de subventions ont été accordés à la France au titre de la modernisation de ses grands ports, somme à laquelle s’ajoutent les 82 millions d’euros fléchés sur le projet « Calais Port 2015 ».

Le Gouvernement a une stratégie globale de développement de l’attractivité et de la compétitivité de nos ports, pour permettre de transformer l’essai de la réforme portuaire et donner à la France, en métropole comme dans les outre-mer, une place de premier plan dans le commerce mondial.

À présent, je tiens à rappeler le contexte qui nous conduit aujourd’hui à légiférer sur le statut des dockers et la démarche qui a permis d’aboutir à cette proposition de loi.

À la suite de tensions survenues dans le port décentralisé de Port-la-Nouvelle à la fin de l’année 2013, lesquelles étaient liées à certaines ambiguïtés des articles du code des transports, le Gouvernement a joué son rôle de facilitateur du dialogue en réunissant un groupe de travail chargé d’évaluer l’opportunité d’une évolution des règles d’emploi des dockers.

Des travaux de cette mission est sorti un texte équilibré entre les positions des différents acteurs œuvrant pour le développement de nos ports, à savoir les entreprises de manutention, les industriels implantés sur les terminaux et les représentants des ouvriers dockers. Cet équilibre a été obtenu par un dialogue riche et constructif et par un travail approfondi. Il résulte de près de trente réunions de travail qui se sont succédé entre les mois de février et de juillet 2014.

L’objectif était bien de concilier des enjeux essentiels à l’attractivité de nos ports et à leur développement économique : d’abord, la sécurité des personnes et des biens, fondée sur la qualification et le professionnalisme des dockers ; ensuite, la liberté d’entreprendre ; enfin, le respect des travailleurs et de leurs conditions d’emploi.

Les élus du groupe socialiste à l’Assemblée nationale ont alors décidé de déposer une proposition de loi respectant à la lettre le contenu de l’accord.

Ainsi, le présent texte instaure une définition de l’ouvrier docker professionnel fondée sur l’existence d’un contrat de travail à durée indéterminée, soumis à la convention collective nationale unifiée « ports et manutention », la CCNU ; une consolidation du principe de priorité d’emploi pour les ouvriers dockers ; une définition modernisée du périmètre dans lequel devrait s’appliquer la priorité d’emploi des ouvriers dockers, fondée sur le service au navire ; une charte nationale pour les nouvelles implantations industrielles dans les ports maritimes de commerce, comportant une obligation de négociation entre les différents acteurs de la place portuaire et des engagements réciproques de compétitivité, de fiabilité sociale et de respect des emplois portuaires et des clauses de la convention collective précitée.

L’Assemblée nationale a adopté cette proposition de loi sans y apporter aucune modification, afin d’en respecter l’équilibre.

L’objectif de ce texte est de sécuriser juridiquement le régime de priorité d’emploi, en vue de pérenniser l’emploi des dockers dans un cadre modernisé, répondant aux enjeux de développement de nos places portuaires. Le savoir-faire et l’expérience de cette profession sont des atouts précieux en matière de sécurité pour nos ports.

Il s’agit ainsi de contribuer à améliorer la fiabilité et la compétitivité de nos ports, dans un environnement fortement concurrentiel. Ce sujet est essentiel, et j’y suis très attaché.

J’ai rappelé le contexte particulier de l’élaboration de cette proposition de loi, car il marque sa singularité et induit la question qui doit, à l’évidence, être au cœur de votre discussion d’aujourd'hui : que doit faire le Parlement face à un texte qui résulte d’un accord des partenaires sociaux ?

Écartons tout de suite le débat sans fondement sur le conflit de légitimité qui opposerait la démocratie politique et la démocratie sociale. Dans notre République, il n’y a qu’une légitimité pour élaborer la loi, celle du Parlement, expression du peuple souverain.

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